Les défenseurs des droits des réfugiés dénoncent les modifications aux lois fédérales proposées lundi par le gouvernement de Justin Trudeau qui empêcheraient les migrants entrés au Canada de façon irrégulière de présenter une demande d'asile au pays.

Selon l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés, ces modifications priveraient les demandeurs d'asile vulnérables des protections fondamentales en matière de droits de la personne.

En vertu de l'Entente sur les tiers pays sûrs, les demandeurs d'asile ne peuvent présenter une demande au Canada s'ils ont déjà présenté une demande similaire dans certains autres « pays sûrs », dont les États-Unis. Mais cette entente ne s'applique pas aux migrants qui franchissent la frontière de façon irrégulière - comme on l'a souvent vu au chemin Roxham, en Montérégie. Les demandeurs peuvent alors rester au Canada le temps que le gouvernement fédéral étudie leur dossier.

Le gouvernement Trudeau souhaite fermer cette voie. Mathieu Genest, porte-parole du ministre de l'Immigration, Ahmed Hussen, soutenait lundi que la mesure visait avant tout les personnes dont la demande d'asile avait été rejetée aux États-Unis et qui tentaient ensuite leur chance au Canada. Mais le libellé du projet de loi stipule que le simple fait d'avoir présenté une demande auprès d'un autre pays suffit à rendre la demande irrecevable au Canada.

Les changements ont été discrètement inclus dans le projet de loi omnibus sur la mise en oeuvre du budget, un document d'environ 400 pages déposé lundi à la Chambre des communes par le ministre des Finances. Cette discrétion a d'autant plus choqué les défenseurs des réfugiés.

Janet Dench, directrice du Conseil canadien pour les réfugiés, estime que toute modification importante aux lois sur l'immigration, comme celle proposée lundi, devrait faire l'objet d'une étude approfondie au Parlement plutôt que d'être enfouie dans un projet de loi omnibus, adopté de façon accélérée.

Mme Dench indique que ses membres - plus de 100 organismes canadiens oeuvrant directement avec les réfugiés et les immigrants - sont sous le choc et consternés par les changements proposés, les qualifiant d'« atteinte dévastatrice aux droits des réfugiés au Canada ».

Les migrants dont la demande au Canada serait jugée irrecevable ne s'exposeraient pas nécessairement à une expulsion immédiate vers leur pays d'origine, soutenait M. Genest lundi : le gouvernement canadien évaluerait alors les risques afin de déterminer s'il serait prudent de les renvoyer.