La ministre des Affaires municipales et de l'Habitation, Andrée Laforest, estime que les réformes qu'elle apporte à la Régie du logement - qui devient le Tribunal administratif du logement - permettront de réduire ses délais de traitements de 16 à 2 mois.

Dans un projet de loi qu'elle a déposé mercredi à l'Assemblée nationale, Mme Laforest modifie entre autres les règles qui encadrent les conciliations, afin de désengorger le tribunal des causes qui pourraient être réglées sans passer devant un régisseur.  

«Les impacts qu'on va avoir avec ce projet de loi, on a évalué qu'on pourrait passer de 16 à 2 mois d'attente. [...] On augmente [notamment] de neuf régisseurs [et] on a un montant de 24 millions qui a été [inclus dans le dernier] budget pour la Régie du logement spécifiquement. Pour les propriétaires autant que pour les locataires, ce projet de loi était vraiment attendu parce que les délais [actuels], c'est incroyable comment c'est trop long», a dit la ministre.  

Le directeur des affaires publiques de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ), Hans Brouillette, accueille toutefois avec prudence le projet de loi déposé par le gouvernement Legault. Il rappelle aussi que les réformes proposées par Québec reprennent essentiellement un ancien projet de loi (mort au feuilleton) qui a été déposé quelques jours avant la fin de la dernière législature par le gouvernement Couillard.  

«J'étais [aussi] là en 2006 quand la ministre Nathalie Normandeau avait annoncé huit régisseurs de plus en promettant de faire tomber le nombre de causes civiles, qui étaient de 22 000 à l'époque, à 7000. C'est [finalement] monté à 26 000 [...]. Donc les objectifs de réduire les délais, on les partage, [mais] l'assurance qu'on va atteindre ces délais-là, on en doute», a-t-il dit.  

«Une occasion manquée», disent les comités de logement 

Le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) se dit pour sa part «amèrement déçu» du projet de loi de la ministre Andrée Laforest.

«Le projet de loi 16 propose des modifications techniques au fonctionnement interne du tribunal qui ne s'attaqueront pas aux nombreuses injustices vécues par les locataires. La ministre décide de prioriser des mesures cosmétiques comme de changer le nom de la Régie pour le Tribunal administratif du logement plutôt que de revoir de fond en comble le tribunal», a déploré le porte-parole du RCLALQ, Maxime Roy-Allard.

«Il est urgent d'instaurer un contrôle obligatoire des loyers et de favoriser des ententes de paiement pour limiter les expulsions de locataires. Le tribunal doit non seulement mieux protéger les locataires, mais aussi favoriser l'accès à la justice en réduisant significativement les délais et en ouvrant des points de service dans toutes les régions du Québec», a-t-il poursuivi.  

Sur ce point, Andrée Laforest a affirmé en point de presse qu'en «donnant plus de pouvoirs aux greffiers, des causes seront entendues dans toutes les régions du Québec» et que «des régisseurs vont se déplacer [à l'occasion] dans les régions».

Nouveaux règlements pour les propriétaires de condos 

Le projet de loi de la ministre Laforest change aussi le Code civil en matière de copropriété divise, pour forcer les syndicats de copropriétés d'effectuer tous les cinq ans une étude du fonds de prévoyance pour que celui-ci soit «suffisant pour couvrir le coût estimatif des réparations majeures et de remplacement des parties communes».  

Selon Mme Laforest, cette nouvelle obligation de maintenir un fonds de prévoyance suffisamment élevé représente en moyenne une augmentation de 5,50 $ de frais pour les propriétaires.  

«Le parc immobilier du Québec est vieillissant. Cette constatation s'applique aux copropriétés qui représentent 12% des habitations sur tout le territoire. [...] L'étude [du] fond de prévoyance sera constituée à l'aide d'un carnet d'entretien qui dressera un portrait des besoins de l'immeuble. Nous souhaitons éviter que les copropriétaires aient à débourser des cotisations spéciales qui sont de plus en plus courantes et qui peuvent avoir un effet considérable sur leur budget», a dit la ministre.  

«Le problème qu'on a présentement au Québec, c'est qu'on a des copropriétaires qui ont des intérêts divergents. Certains veulent acheter à court terme et faire du profit, d'autres veulent y vivre à long terme et s'assurer que le fonds de prévoyance soit suffisant», a pour sa part expliqué Hans Brouillette de la CORPIQ.  

«Si on regarde par rapport au marché locatif, il y a une iniquité. On construit des condos neufs, [puis] on les met en location à des prix qui ne reflètent pas la réalité. Alors si on a des fonds de prévoyance, on va probablement avoir des cotisations mensuelles qui seront plus élevées [et qui vont] assurer une certaine équité en fonction des prix de location dans le marché», a-t-il ajouté.