Dans un geste inhabituel, le premier ministre François Legault a choisi de s'adresser directement aux Québécois, dimanche, pour les rassurer sur la portée réelle du projet de loi 21 encadrant les signes religieux.

À l'image des Québécois, ce projet de loi, déposé jeudi, est « modéré », en conformité avec les valeurs et l'histoire du Québec, fait valoir le premier ministre, dans un court message de deux minutes et demie, diffusé dimanche en fin de journée, simultanément sur son site web et sa page Facebook.

Sur cette question délicate et controversée, M. Legault a donc choisi de parler directement aux Québécois, sans le filtre des médias.

Le cadre est solennel : M. Legault est assis à son bureau et fixe la caméra, sans lire de texte, flanqué du fleurdelysé. Le bref message, qui ne comporte pas d'éléments nouveaux, a été enregistré il y a quelques jours à son cabinet.

« Enfin ! », affirme-t-il d'emblée, un gouvernement se décide à fixer des règles « claires pour tout le monde » en ce domaine, après une décennie de débats.

Sachant que le sujet est explosif, le premier ministre tente visiblement d'éviter tout dérapage en affirmant que son projet de loi 21 ne vise d'aucune façon à limiter la liberté religieuse, garantie par les chartes.

« Chacun va rester libre de pratiquer la religion de son choix », observe M. Legault, rappelant que « la laïcité (de l'État) ne va pas à l'encontre de la liberté de religion ».

Il rappelle les principaux éléments du projet de loi déposé jeudi dernier par le ministre de l'Immigration, Simon Jolin-Barrette. Il sera interdit aux enseignants du primaire et du secondaire du secteur public, de même qu'aux employés de l'État ayant un pouvoir coercitif (policiers, gardiens de prison, notamment) de porter des signes religieux.

Toute personne souhaitant offrir ou recevoir un service de l'État devra se présenter à visage découvert.

Une clause de droits acquis permet aux personnes déjà l'emploi de l'État de conserver leurs signes religieux, une preuve que le gouvernement fait preuve de compromis, selon lui.

Afin de s'assurer de l'implantation de ces nouvelles règles, Québec a prévu d'emblée décréter que la loi s'appliquera indépendamment de la loi constitutionnelle de 1982, grâce au recours à la clause dérogatoire.

Cette clause, qui permettra d'éviter de longues batailles judiciaires, est un « outil légitime », fait valoir M. Legault, rappelant que deux de ses prédécesseurs, René Lévesque et Robert Bourassa, l'ont utilisée avant lui.

« Au Québec, c'est comme ça qu'on vit », conclut le premier ministre.

Depuis le dépôt du projet de loi, plusieurs organismes de défense des droits le jugent raciste et réclament son retrait.