(Montréal) La réforme de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, qui était attendue d’ici la fin de l’année, est finalement reportée.

La réforme sera déposée plus tard, cet hiver. Cette réforme a été maintes fois promise par les précédents gouvernements, mais elle n’a jamais été menée à terme. La loi d’origine date de 1979.

« Ça reste un dossier prioritaire pour moi. Je suis toujours en consultation. Je travaille beaucoup à dégager des consensus. On s’entend sur l’importance de cette modernisation », a assuré le ministre du Travail, Jean Boulet, en entrevue avec La Presse canadienne mercredi.

La loi n’a jamais été appliquée à tous les secteurs d’activité et industries. La construction, par exemple, où il y a le plus d’accidents mortels, n’a pas accès au comité santé-sécurité et au représentant en prévention — deux des quatre mécanismes de prévention prévus par la loi.

L’ensemble des quatre mécanismes — avec le programme de prévention et le programme de santé — ne s’applique que dans les secteurs dits prioritaires, comme les mines, les forêts, les scieries. Et ils ont porté fruit, puisque le nombre de décès a considérablement diminué dans les mines, par exemple.

« 40 ans qu’on attend », dit la FTQ

Dans le milieu syndical, les attentes sont grandes au sujet de cette réforme. Les signaleurs, notamment, ont été victimes de plusieurs accidents. Le secteur de la santé est aussi plus touché qu’avant, non seulement à cause des maux de dos, mais aussi de la détresse psychologique.

« On aurait aimé mieux que ça se fasse là. Ça fait 40 ans qu’on attend. Là, on n’attendra pas plus longtemps », a commenté le secrétaire général de la FTQ, Serge Cadieux, en entrevue.

Les congressistes de la FTQ, réunis cette semaine à Québec, doivent justement manifester à ce sujet, en plus d’adopter une Déclaration de politique pour que tous les mécanismes de prévention de la loi s’appliquent à tous les secteurs.

« Au Canada, on est les pires, on est les derniers de classe. Toutes les autres provinces ont accès aux mécanismes de prévention », a critiqué M. Cadieux.

À la FTQ-Construction aussi, le directeur général, Éric Boisjoly, affirme avoir « de la misère à comprendre » cet autre report, puisque les problèmes sont connus.

« La construction, c’est 5 % de la main-d’œuvre, mais 25 % des décès », s’indigne-t-il.

Patrons aussi

Le milieu patronal aussi a ses récriminations face à la Loi sur la santé-sécurité.

Lors d’une entrevue avec La Presse canadienne, le président du Conseil du patronat du Québec, Yves-Thomas Dorval, avait soutenu que « les portes sont trop grandes ouvertes dans le régime actuel » en matière d’indemnisation des accidentés. Il avait dit croire que les lésions causées à l’extérieur du travail sont trop facilement indemnisées, par exemple.

Il trouvait également qu’en matière de prévention, il y a duplication lorsqu’il y a à la fois un représentant à la prévention et un comité de santé et sécurité au travail.

Il critiquait aussi le principe de la prépondérance de l’avis du médecin traitant de l’accidenté.

En 2018, 226 personnes sont mortes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle et 103 406 ont été victimes d’un accident du travail. De 2014 à 2018, le nombre de victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles est passé de 88 046 à 103 406.