Bernard Landry a raccroché le combiné après s'être entretenu avec le nouveau premier ministre, François Legault, la semaine dernière, en lui promettant de le rencontrer et de lui prodiguer quelques conseils.

Cette rencontre n'a jamais eu lieu, finalement. « Il m'a dit qu'il était prêt à m'aider, on s'était promis de se voir bientôt. Il se sentait bien. J'ai été surpris d'apprendre la nouvelle », a relaté de Québec le premier ministre Legault, mardi après-midi, après l'annonce du décès de l'ancien premier ministre péquiste.

« Le parti avant les hommes, et la patrie avant le parti. » Cette phrase, maintes fois répétée par Bernard Landry au fil des ans, M. Legault s'en souvient très bien.

Il était ministre de l'Éducation lorsque Bernard Landry a pris les rênes du gouvernement en 2001. Il se souvient d'une rencontre difficile avec lui, à son domicile.

« Quand il m'a demandé de passer de l'Éducation à la Santé, [...] je ne regardais pas ça nécessairement positivement. Il m'avait dit, et je m'en souviendrai toute ma vie : "François, c'est ton devoir". Pour lui, c'était important de remplir son devoir. »

Homme « brillant », « de grande stature », M. Landry marquera François Legault de par ses connaissances en économie.

L'homme surveillait de près le taux de chômage et avait toujours une « bonne bouteille » à portée de main, au cas où les nouvelles seraient bonnes.

« J'avais quelqu'un avec qui discuter. Bernard Landry connaissait [...] à peu près chaque entreprise dans chacune des régions du Québec. C'est comme s'il avait tricoté l'économie du Québec. »

Plus récemment, François Legault avait fait un velours à Bernard Landry en disant vouloir s'inspirer de lui pour adopter une nouvelle « Paix des Braves » avec d'autres nations autochtones.

Il n'était pas certain de pouvoir bénéficier de son appui étant donné son passage à la Coalition avenir Québec.

« Ça me fait plaisir de lui avoir fait plaisir [...] et, oui, je m'inspirerai de lui pour essayer de conclure des nouvelles ententes, comme il l'a fait », a-t-il affirmé.

À titre d'ancien premier ministre, M. Landry aura droit à des funérailles d'État.

Il s'agit d'un cérémonial plus strict et officiel. Il pourrait être exposé au Salon rouge, la salle du Conseil législatif de l'Assemblée nationale. Le drapeau du Québec a également été mis en berne.

La classe politique rend hommage à Bernard Landry

Un des compagnons de route de Bernard Landry, l'ancien député péquiste d'Abitibi-Ouest François Gendron, lui a également rendu hommage. Il l'a décrit comme un « batailleur, déterminé, convaincu », lui qui était à ses côtés dès l'élection du premier gouvernement Lévesque en 1976.

« C'est un orateur sans précédent, c'est un honnête homme, il a fait beaucoup pour l'économie du Québec », a déclaré M. Gendron en entrevue près des bureaux de la presse parlementaire. Il a notamment rappelé ses efforts pour diversifier l'économie de la capitale et des régions, ainsi que la « Paix des Braves », l'entente historique avec la nation crie.

Pour sa part, le chef intérimaire du Parti québécois, Pascal Bérubé, a affirmé qu'il avait le coeur brisé.

« J'offre mes plus sincères condoléances à sa famille, ses amis et à l'ensemble des indépendantistes québécois. Le Patriote de Verchères n'aura jamais voyagé vers d'autre pays que le Québec », a-t-il gazouillé.

« Merci pour tout, a renchéri la députée péquiste Véronique Hivon. Convictions et confiance inébranlable dans le Québec et le projet d'indépendance, la cause de votre vie, voilà ce qui vous animait avec passion, cher M. Landry. Vous avez contribué à bâtir un Québec fort économiquement, juste socialement et ouvert culturellement. »

Le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, Pierre Arcand, a quant à lui souligné la « passion » qui animait Bernard Landry. « Personne ne peut nier l'amour qu'il portait au Québec. Il s'est investi pendant plus de 50 ans dans la sphère politique et publique afin de militer pour ses idéaux. Il a contribué à bâtir le Québec d'aujourd'hui.

« Merci, Monsieur le premier ministre », a-t-il déclaré par voie de communiqué.

« Il faut aussi donner le mérite à M. Landry pour la Paix des Braves, un accord de nation à nation avec les Cris, duquel on peut tirer des enseignements pour nos relations avec les Premières Nations. Reposez en paix, M. Landry », a gazouillé la chef parlementaire de Québec solidaire, Manon Massé.

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En rafale...

Pauline Marois, ancienne première ministre du Québec :

« Comme ministre des Finances, comme ministre d'État à l'Économie, toujours il aura cette obsession de faire en sorte que le Québec grandisse, que le Québec devienne plus riche, plus fort, développe ses ressources, investisse en recherche et en développement... Il a été visionnaire jusqu'à un certain point avec cette question de la Cité du multimédia, qui a fait que Montréal, aujourd'hui, est une capitale du monde, parmi les trois plus grandes villes du monde, en matière d'emplois dans le domaine des jeux et du multimédia. »

« [Il y a eu] des tensions, des moments difficiles [...]. Chaque fois que j'ai eu à travailler avec lui, sous Lucien Bouchard, ou avant cela, avec M. Lévesque ou avec M. Parizeau, on a toujours eu une excellente entente, et je pense que notre amitié a quand même duré malgré tout, traversant toutes ces difficultés et ces aléas de la vie. »

Jean Charest, ancien premier ministre du Québec :

« Chaque fois qu'on lui posait des questions sur l'économie, c'était un adversaire très coriace. Même chose lorsqu'il devient chef de l'opposition officielle, alors, là, ce n'était pas facile. J'avais devant moi quelqu'un qui connaissait le Québec de fond en comble. Là-dessus, il a été un adversaire de taille pour nous. [...] J'avais beaucoup de respect pour lui, même si, lui et moi, on ne se faisait pas de cadeaux, on ne se faisait pas de quartiers. C'était une bataille dure, mais respectueuse. »

André Boisclair, ancien chef du Parti québécois :

« Monsieur Landry, vous m'aurez appris l'amour du Québec, de sa langue et de sa culture ainsi que, par votre exemple, le sens des mots militantisme et progrès. Aujourd'hui, c'est tout le Québec qui vous pleure. Reposez en paix. »

Pierre-Karl Péladeau, ancien chef du Parti québécois :

« Bernard Landry, le grand patriote, l'économiste, incarnait, et incarne toujours, notre marche vers le pays du Québec. Mes condoléances à son épouse, Chantal, à ses enfants, Julie, Philippe et Pascale, à sa famille, à ses proches et à tous les militants de l'indépendance nationale. »

Jean-François Lisée, ancien chef du Parti québécois :

« L'homme qui nous quitte aujourd'hui laisse un héritage à sa mesure : volontaire, visionnaire, ambitieux, audacieux. Du virage technologique à la Paix des Braves, deux des grands marqueurs de son action publique, il a été de tous les combats. Indépendantiste jusqu'à la moelle épinière, amant de la langue française et de l'histoire, patriote et fier de l'être, Bernard Landry était inépuisable. »

Jean-Pierre Charbonneau, ancien député et ministre du Parti québécois :

« C'était l'un des meilleurs propagandistes de la cause de l'indépendance du Québec depuis plusieurs décennies, c'est quelqu'un qui était acharné à cet égard-là [...]. Il a donné beaucoup de crédibilité au combat indépendantiste dans tout le créneau des conséquences économiques et de la capacité économique des Québécois de se prendre en main et de développer leur économie. »

« Je pense que, s'il avait eu la chance d'être premier ministre plus longtemps, puis d'être premier ministre non pas en remplacement de quelqu'un, M. Landry aurait eu la chance de se déployer, un peu comme Mme [Pauline] Marois... »

Richard Legendre, ancien député et ministre du PQ :

« J'ai eu la chance de le voir il y a à peine deux semaines, il était d'une humeur extraordinaire. J'avais passé une heure avec lui et son épouse, Chantal, c'était un moment extraordinaire. Écoutez, quand j'ai quitté, et ça me touche aujourd'hui, il me disait : "J'espère pouvoir retourner voir l'Impact le printemps prochain ». Je vais vous dire, quand j'ai appris son décès aujourd'hui, ça m'a beaucoup ébranlé.

« J'ai le souvenir d'un bon Québécois, d'une taille surdimensionnée. M. Landry, on parle beaucoup de lui comme l'homme d'économie, mais c'était aussi un homme de développement social, un homme de solidarité, un homme de culture et en ce qui me touchait moi un peu plus, un homme de sport aussi, qui était un fervent de sports.

Gilles Duceppe, ancien chef du Bloc québécois :

« Bernard Landry, on se connaît depuis 50 ans. Je voyais des images tantôt de Bernard Landry qui négociait avec un jeune homme en 1958, et c'était moi. Il était conseiller du ministre de l'Éducation, Jean-Guy Cardinal, moi j'étais un des vice-présidents de l'Union générale des étudiants pendant l'occupation des cégeps et des universités. C'est depuis ce temps-là qu'on se connaît. Après ça, c'est sûr, on a milité ensemble dans le mouvement souverainiste, on a été amis, on a fait un voyage ensemble... »

« C'est un homme de conviction, un homme de passion, pragmatique, visionnaire. La Paix des Braves, c'est Bernard Landry. Le multimédia et l'intelligence artificielle, c'est Bernard Landry, Il a mis le Québec au diapason de ces nouvelles technologies. Le premier budget équilibré, c'est Bernard Landry, ministre des Finances. Bernard disait toujours : "La patrie avant les partis". »

Valérie Plante, mairesse de Montréal

« M. Landry était, oui, un grand Québécois, mais aussi un patriote, comme il se nommait lui-même. Il avait le Québec tatoué sur le coeur. Il y a plusieurs choses qu'on peut retenir, mais je pense que je mettrai l'accent sur la vision qu'il y a eu pour toute la création, l'industrie technologique également, numérique, qui a non seulement permis à Montréal de prendre son envol, en tout cas de se démarquer, mais qui a également permis au Québec de se démarquer au niveau international. Bravo. Il fallait être visionnaire. »

Justin Trudeau, premier ministre du Canada :

« Mes premières pensées sont pour la famille et les proches de M. Landry. Ce fut un homme qui a bien servi le Québec de nombreuses années dans différentes positions. Et on doit reconnaître d'abord aujourd'hui son dévouement envers sa communauté, envers son pays. »

Roméo Saganash, porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière de réconciliation

« La Paix des Braves fut la plus grande contribution à la réconciliation entre nos peuples, avant même que le mot soit populaire. J'en suis encore reconnaissant à ce jour pour ce geste courageux. Il aura marqué un tournant sans précédent dans les relations Cris-Québec. Il était un grand ami des Cris, un ami respecté. »

Michael Sabia, président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec :

« M. Landry est un grand bâtisseur de l'économie du Québec moderne. Il était un ardent promoteur des intérêts du Québec et reconnaissait l'importance de ses institutions économiques et financières pour créer de la richesse, au service de la population. Au nom de la Caisse de dépôt et placement du Québec et en mon nom, je tiens à offrir nos plus sincères condoléances à sa famille et ses proches. »

Jacques Létourneau, président de la Confédération des syndicats nationaux :

« Bernard Landry était un bâtisseur, un homme d'une grande érudition qui a largement contribué à faire du Québec une nation moderne, comme ministre des Finances, vice-premier ministre et plus tard comme premier ministre du Québec. C'était un brillant économiste et un homme aux valeurs humaines remarquables. »

Daniel Boyer, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) :

« Premier ministre du Québec de 2001 à 2003, Bernard Landry a été de tous les combats qui ont fait du Québec une société plus juste, plus égalitaire et plus démocratique. Nous voulons saluer son engagement de tous les instants pour faire du Québec un pays. »