Des milliers d’habitants ont dû quitter Yellowknife depuis mercredi, puisque les Territoires du Nord-Ouest sont ravagés par d’importants incendies de forêt progressant dangereusement vers la capitale. L’évacuation se fait par avion ou en voiture.

Ce qu’il faut savoir

  • Des milliers de personnes ont évacué cette semaine plusieurs villes des Territoires du Nord-Ouest en raison des incendies.
  • Mercredi, l’état d’alerte a été lancé dans la capitale, Yellowknife. Les gens évacuent de l’aéroport ou s’engagent dans une longue route vers l’Alberta.
  • WestJet et Air Canada affirment prendre des mesures pour aider les citoyens à s’en sortir par voie aérienne. La première ministre locale, Caroline Cochrane, a appelé au respect des lois routières malgré l’urgence.
  • Les 236 incendies en activité jeudi ont brûlé une superficie équivalente à quatre fois celle de l’Île-du-Prince-Édouard, mais aucun décès n’a été recensé jusqu’à maintenant.

« Ça n’a pas pris beaucoup de temps hier après-midi pour que la rumeur comme quoi les autorités allaient déclencher l’état d’alerte commence à circuler. Quand j’ai entendu ça, je n’ai pas pris de chance, on est partis tout de suite. On était deux véhicules, six adultes et quatre chiens. »

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Simon Cloutier vient de vivre deux journées extrêmement éprouvantes. Au moment où il accorde une entrevue à La Presse, il se trouve près d’Edmonton avec sa famille. Une connaissance a accepté de les loger aussi longtemps qu’ils en auraient besoin, compte tenu de la situation critique.

On est contents que ce soit derrière nous. On va essayer de dormir. On n’a pas dormi beaucoup avec le stress.

Simon Cloutier, résidant de Yellowknife

Mercredi soir, un avis d’évacuation officiel a été émis à Yellowknife. Un incendie de forêt ravageur se trouvait à 16 km de la ville d’environ 20 000 habitants, ce qui a notamment poussé la municipalité à suspendre les services de transports en commun, d’eau et d’égout ainsi que de collecte des ordures ménagères. L’ordre d’évacuation concerne aussi les communautés autochtones voisines de Ndilǫ et de Dettah.

Des convois organisés par des secouristes du gouvernement ont été lancés jeudi pour évacuer le nord de Yellowknife, a indiqué un agent d’information local. L’objectif est de faire partir tout le monde avant midi ce vendredi, étant donné que les vents du nord risquent de pousser le feu vers la route utilisée pour l’évacuation.

PHOTO JEFF MCINTOSH, LA PRESSE CANADIENNE

Des automobilistes font la queue pour faire le plein d’essence à Fort Providence, dans les Territoires du Nord-Ouest, sur la seule route menant de Yellowknife vers le sud.

Sur les routes ou à l’aéroport, on retrouve des milliers de gens qui ont emporté quelques effets personnels à l’improviste, ne sachant pas s’ils seraient en mesure de retrouver leur domicile ou si leur communauté serait intacte une fois la catastrophe naturelle passée.

C’était notamment le cas à l’école secondaire Sir-John-Franklin à Yellowknife, où on pouvait voir une file de plus d’un kilomètre formée de personnes désirant se rendre à l’aéroport pour attraper un vol.

C’était 1600 km de route. Il a fallu passer dans le feu. On a vu beaucoup de fumée à des périodes où on devait rouler lentement, à 5 ou 10 km/h… Et tout le monde toussait dans l’auto.

Simon Cloutier, résidant de Yellowknife

« On a vu beaucoup de forêt brûlée sur la rive sud du grand lac des Esclaves et dans la ville d’Enterprise. Voir de la tôle tordue, c’est vraiment pas évident, raconte M. Cloutier. Pour moi, les Territoires du Nord-Ouest, c’est la maison. Pour la décennie à venir [de douloureux souvenirs] vont nous revenir à la mémoire chaque fois qu’on va voir les dizaines de kilomètres brûlés sur notre chemin. »

« Nous sommes tous dans le même bateau, mais individuellement, c’est à nous de choisir comment nous comporter », a écrit la première ministre Caroline Cochrane, sur les réseaux sociaux, dans un message invitant la population à respecter le Code de la route malgré l’urgence.

PHOTO BILL BRADEN, LA PRESSE CANADIENNE

À Yellowknife, des gens ne disposant pas de véhicules font la queue pour s’enregistrer à bord d’un vol à direction de Calgary.

« Nous en avons tous assez d’entendre le qualificatif “sans précédent”, mais il n’y a pas d’autre façon de décrire la situation dans les Territoires du Nord-Ouest. Le pays nous regarde et nos voisins nous gardent dans leurs pensées et leurs prières », a-t-elle déclaré.

Effort important

« Aujourd’hui, je suis en train de m’organiser. J’ai de la nourriture, mais pas d’endroit où aller. » Charlie Labelle, qui était partie une semaine dans l’Ouest pour ses vacances, ne les passe pas exactement comme prévu.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM MCKUGLOVIN, FOURNIE PAR REUTERS

Dévastation causée par les incendies dans la région de Yellowknife

Mardi, les restaurants et les bars près d’elle à Yellowknife ont commencé à fermer. Elle a dormi sur un terrain de camping, avant d’être évacuée de l’endroit mercredi. Elle a donc pris un taxi pour se rendre dans un hôtel avoisinant, qu’elle a aussi été obligée de quitter, jeudi matin.

Charlie a donc abouti dans un campement aménagé à l’improviste dans une salle communautaire, qui peut accueillir jusqu’à 160 personnes dans une zone jugée plus sûre de Yellowknife. Elle attend avec incertitude un avion.

Je fais juste aider le plus que je peux. Je ne suis pas anxieuse, mais si c’était moi qui habitais ici, je la trouverais moins drôle. Je devais revenir samedi, mais mon vol a été annulé. Ils me disent : “On a de la place le 21”, mais le 21… on ne sait pas ce qui va se passer d’ici là.

Charlie Labelle

Au total, les autorités locales dénombrent 236 incendies, qui font ensemble quatre fois la superficie de l’Île-du-Prince-Édouard. Les villes de Jean Marie River, Hay River et Fort Smith, largement menacées par les flammes, ont elles aussi dû être évacuées durant la semaine. Il n’y a cependant aucun décès lié aux incendies recensé jusqu’à maintenant.

À Calgary, où sont dirigés les vols partant des Territoires du Nord-Ouest, des centres d’accueil pouvant recevoir jusqu’à 5000 personnes ont été ouverts. Il y en a également plusieurs autres dans différentes villes en Alberta.

PHOTO JASON FRANSON, LA PRESSE CANADIENNE

À Valleyview, en Alberta, des bénévoles préparent des fournitures pour bébés qui seront offertes aux évacués de Yellowknife.

Chez les compagnies aériennes, WestJet soutient avoir ajusté ses prix et ajouté un vol à destination de Calgary. Air Canada affirme pour sa part avoir établi un plafond sur les prix pour les vols directs depuis Yellowknife.

Le premier ministre Justin Trudeau, qui était en vacances en Colombie-Britannique, a convoqué le Groupe d’intervention en cas d’incident « pour discuter des incendies de forêt et des conditions météorologiques extrêmes dans tout le pays avec des ministres et de hauts responsables ».

De son côté, Simon Cloutier « ose espérer » que sa demeure au centre-ville de Yellowknife est hors de danger. Il connaît des gens qui ont été touchés et salue les habitants de Hay River, qui ont été forcés de quitter leur chez-soi « avec des maisons et des bâtiments qui brûlent » pour la troisième fois en quinze mois.

M. Cloutier a également réalisé que l’accès aux nouvelles, dans une situation d’urgence comme celle-là, était crucial. « C’est un problème que Meta ait banni les publications médiatiques. On a besoin de cette information. J’ose espérer que ces entreprises et le gouvernement arriveront à une entente parce que je ne souhaite ça à personne d’autre. C’était pas drôle », dit-il.

Avec La Presse Canadienne