Une femme de la région de Laval qui se disait naturopathe vient d'être reconnue coupable d'avoir exercé illégalement la psychothérapie et d'avoir usurpé le titre de psychothérapeute - une première «historique», s'est réjoui mercredi l'Ordre des psychologues du Québec.

Marie-Micheline Corbin, qui offrait ses services sur sa page Facebook, a été dénoncée par un citoyen en 2015, puis coincée par une agente d'investigation, qui l'a consultée en prétendant souffrir de dépression.

Dès la première rencontre, la fausse thérapeute lui a expliqué qu'elle travaillait « avec l'énergie, le respirateur, l'ancrage », relate le jugement de la Cour du Québec rendu le 9 février.

Mme Corbin a aussi interrogé l'agente au sujet de son rang dans la famille, de ses relations familiales et de sa vie passée. « Très rapidement », elle lui a expliqué « l'origine de ses difficultés et de ses souffrances », précise la décision de la juge de paix Lucie Marier.

La naturopathe a aussi déclaré que sa cliente était « dans une conduite d'évitement », lui a promis de la « libérer de ses blocages émotionnels » et de l'aider à parvenir à la « guérison ». Elle prétendait y parvenir en faisant ressurgir des émotions refoulées - une approche bien précise utilisée par plusieurs psychologues.

« Le jugement rendu est déterminant. Le tribunal a campé la façon de comprendre ce qu'est la psychothérapie », dit Christine Grou, présidente de l'Ordre des psychologues.

En 2012, une loi a été adoptée pour réserver cette pratique aux psychologues, aux médecins ou à certains professionnels ayant obtenu un permis spécial, mais la définition qui s'y trouve n'avait encore jamais été testée en cour.

« Une mauvaise pratique peut créer des problèmes de dépendance à l'égard de la personne consultée, causer un sentiment de culpabilité, entraîner une perte de confiance ou, pire, augmenter la détresse », expose la présidente de l'Ordre. L'état des citoyens qui signalent les faux psychothérapeutes en témoigne, dit-elle. « Certains sont trop en détresse pour pouvoir témoigner. »

D'AUTRES CAS

Une fausse psychologue de Lévis, Mélanie Eugénie Chisholm, avait même décrété qu'un jeune de 19 ans pouvait cesser de prendre ses antidépresseurs, ce qui l'a fait sombrer de nouveau. Elle a écopé d'une amende de 55 000 $ l'an dernier après avoir plaidé coupable, comme l'ont fait sept autres personnes poursuivies par l'Ordre.

En Outaouais, la fondatrice du Centre canadien de dyslexie, Louise Ward, a été reconnue coupable d'avoir évalué des troubles mentaux - un autre acte réservé aux détenteurs de permis.

Depuis 2012, l'Ordre des psychologues a reçu 1754 signalements - presque tous fondés. Environ 800 à 900 dossiers ont été réglés sans l'intervention du tribunal. « Beaucoup de gens font de la pratique illégale et ne le savent pas, et plusieurs se sont engagés à ne plus le faire », explique Mme Grou.

« La moitié des signalements viennent du public, ce qui veut dire qu'ils connaissent la loi », se félicite la psychologue. Dans bien des cas, toutefois, « les personnes qui s'affichent avec des compétences semblent très crédibles aux yeux des personnes vulnérables ».

Les arguments sur la peine de Marie-Micheline Corbin seront entendus à une date ultérieure. Les infractions qu'elle a commises sont passibles d'une amende minimale de 1500 $ et maximale de 20 000 $.

À l'heure actuelle, six autres poursuites sont toujours pendantes.