Cinq ans après avoir été condamné pour l’exploitation sexuelle d’une adolescente, le chanteur déchu Luck Mervil est accusé d’avoir agressé sexuellement une femme en juin 2000. L’artiste nie fermement les accusations et affirme être victime d’une « erreur sur la personne ».

« Ce n’est pas arrivé. Ce n’est pas vrai. Ce n’est pas moi », a martelé l’artiste en entrevue avec La Presse mercredi.

« C’est plate. Je me sens vulnérable », lâche-t-il.

Sans tambour ni trompette, l’auteur-compositeur-interprète Luck Mervil (dont le vrai nom est Lucknerson) a été accusé d’agression sexuelle, le 23 novembre dernier, au palais de justice de Rimouski. L’homme de 56 ans doit comparaître en janvier prochain. Selon le mandat d’arrêt, il est accusé d’avoir agressé sexuellement une femme dans la nuit du 23 au 24 juin 2000 à Rimouski.

À cette époque, le chanteur était au sommet de sa carrière. Il avait déjà fait paraître quatre albums et jouait un rôle important dans la célèbre comédie musicale Notre-Dame de Paris. Il a de plus animé les festivités de la fête du Canada cet été-là.

En entrevue avec La Presse, Luck Mervil a défendu son innocence avec conviction. Il assure notamment ne pas connaître la plaignante.

« Je n’ai pas reconnu son nom. Je n’ai pas reconnu sa photo. Je ne connais pas la personne. […] Quand je lis [la preuve], ce n’est pas moi. Ce que la personne décrit, ce n’est pas moi. J’ai juste de la peine. Elle a peut-être vécu quelque chose avec quelqu’un. Une chose est sûre, ce n’est pas moi », a-t-il affirmé.

« Un show à Rimouski il y a 23 ans. J’étais dans un bar après un show. C’est ça, la preuve. J’ai une page qui faisait la promo du show deux jours avant », lance-t-il, sans en dire davantage sur le récit de la plaignante.

Selon Luck Mervil, il est improbable qu’il se soit retrouvé seul dans un bar, comme l’avance la plaignante. « D’habitude, on sort en gang [après un spectacle] », dit-il. Également, personne au Québec ne peut affirmer qu’il a déjà bu avec excès ou s’est battu dans un bar, jure-t-il.

Bref, à ses yeux, il y a « très clairement erreur sur la personne ».

Il assure appuyer le mouvement de dénonciation #metoo. Mais du même souffle, il ajoute que la présente accusation date d’il y a deux décennies et qu’il a déjà présenté ses excuses publiquement à la suite de sa condamnation pour exploitation sexuelle en 2018.

« J’ai tout fait ce que je devais faire. Un moment donné… On essaie de reprendre notre vie. J’ai participé à la société québécoise… C’est une société que j’aime », poursuit-il.

« J’avais vraiment peur »

C’est la deuxième fois que Luck Mervil doit faire face à la justice. Il avait été condamné à six mois de prison à domicile en 2018 – une peine très clémente – pour avoir exploité sexuellement une adolescente de 17 ans qu’il connaissait depuis l’enfance en 1996.

Devant la cour, la victime avait relaté une violente agression sexuelle commise pendant une séance « d’improvisation », alors que Luck Mervil voulait évaluer le talent de l’étudiante en arts dramatiques. Il l’avait agrippée et embrassée sur la bouche, puis l’avait jetée sur le sofa pour l’agresser.

« Il a réussi à me violer. […] J’avais vraiment peur. […] J’ai mis toute la force possible pour m’enlever de son emprise. Mais il était suffisamment fort pour pas qu’un millimètre ne bouge », avait-elle témoigné à l’enquête préliminaire. L’adolescente lui avait dit non au moins 60 fois.

Luck Mervil avait aussi été condamné à s’inscrire au Registre des délinquants sexuels pendant 20 ans.

L’artiste avait d’ailleurs déposé l’été dernier une requête pour être exclu du Registre des délinquants sexuels. Il devait témoigner plus tôt ce mois-ci. Toutefois, l’audience a été reportée, visiblement en raison de la nouvelle accusation.

Dans sa requête, l’artiste se plaignait du lourd fardeau de cette inscription : nuisance au développement de sa carrière, difficulté de voyager, incapacité à créer des relations personnelles intimes, crainte de la surveillance aléatoire des policiers. À ses yeux, cette inscription violait son droit à la vie, à la liberté et à la sécurité.

La Cour suprême a récemment rappelé que l’objectif de ce registre était d’aider les policiers à prévenir les crimes sexuels et à enquêter sur ceux-ci. Ainsi, un délinquant qui n’a pas de risque « accru » de récidive sexuelle ne devrait pas en principe être inscrit au Registre.

Comme Luck Mervil disait présenter peu de risque de récidive, il demandait à la Cour supérieure de le retirer du Registre. Il déplorait également que son inscription garde « omniprésent un acte qui a eu lieu il y a plus de 25 ans ».

L’histoire jusqu’ici

  • 14 mai 2018 : Luck Mervil plaide coupable à une accusation d’exploitation sexuelle sur une adolescente de 17 ans.
  • 23 mai 2018 : L’artiste est condamné à six mois de prison dans la collectivité.
  • 4 juillet 2023 : La Presse révèle que Luck Mervil souhaite être retiré du Registre des délinquants sexuels.
  • 23 novembre 2023 : Luck Mervil est accusé d’agression sexuelle au palais de justice de Rimouski.