Furieux de l’infidélité de sa conjointe et de sa rechute d’alcool, Alexandre Boudreau-Chartrand s’est acharné sur Andréane Ouellet en la frappant avec une force « inouïe ». Il a ensuite « camouflé » son crime en faisant croire qu’elle avait tenté de se suicider avec des médicaments et en déboulant dans les escaliers.

C’est la version qu’a plaidée au jury la procureure de la Couronne MValérie Michaud vendredi au procès d’Alexandre Boudreau-Chartrand, accusé du meurtre au second degré de sa conjointe et mère de leurs cinq enfants, en septembre 2021, à Saint-Donat.

Un « amalgame de constatations et d’hypothèses », a répliqué la défense. Aucune preuve ne permet de prouver qu’Alexandre Boudreau-Chartrand est à l’origine des blessures mortelles d’Andréane Ouellet, et qu’il avait l’intention de la tuer, a insisté la défense, en minimisant les possibles mobiles de l’accusé.

PHOTO DÉPOSÉE EN PREUVE

Alexandre Boudreau-Chartrand, accusé du meurtre au second degré de sa conjointe Andréane Ouellet en septembre 2021 à Saint-Donat.

La Couronne a brossé le portrait d’un homme « excédé ». D’un homme qui avait une relation « toxique et acrimonieuse » avec sa conjointe. D’un homme qui, « devant les difficultés de son couple et les nombreuses sources de frustration, a déversé sa colère » sur Andréane Ouellet.

L’infidélité de sa conjointe a « très bien pu être la goutte qui a fait déborder le vase », a souligné MMichaud. Peu importe quand Alexandre Boudreau-Chartrand l’a appris, cette infidélité était « de nature à accentuer la colère que l’accusé avait envers la victime », selon la Couronne.

La femme de 32 ans était pratiquement défigurée à sa mort. Aucune zone de son visage n’avait été épargnée. Ses blessures étaient si graves que seuls de « multiples impacts répétés » ont vraisemblablement pu les causer, selon le pathologiste judiciaire, a rappelé MMichaud.

La procureure a également insisté sur une conclusion du pathologiste : Andréane Ouellet n’a pas pu se causer des blessures aussi graves en déboulant les escaliers. D’ailleurs, elle n’avait aucune fracture du crâne et pratiquement aucun sang n’a été retrouvé dans les escaliers.

Dans un appel 911 présenté au procès, Alexandre Boudreau-Chartrand a répété que sa conjointe avait fait une « overdose » en ingérant des médicaments et en déboulant les escaliers. Il raconte au 911 que sa conjointe était « soûle » et avait chuté dans les marches une première fois ce matin-là.

Extrait de l’appel 911

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Or, le rapport d’expert est clair : Andréane Ouellet n’avait aucun alcool dans son sang et la quantité de médicaments dans son sang équivalait à une dose normale prescrite, a souligné la Couronne.

« Sur quoi l’accusé insiste-t-il sans arrêt [dans son appel 911] ? Il insiste sur les médicaments, l’overdose probable de la victime, le fait qu’elle a possiblement fait une tentative de suicide. […] Je vous suggère qu’il essaie […] de convaincre tout le monde que la victime a ingéré des médicaments, a déboulé les marches, le tout en son absence. Le croyez-vous ? », a lancé MMichaud.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE FACEBOOK D’ANDRÉANE OUELLET

Andréane Ouellet, retrouvée morte dans sa maison de Saint-Donat en septembre 2021

Dans la trame narrative, une voisine entend la victime et l’accusé crier vers minuit. Vers 13 h 18, Alexandre Boudreau-Chartrand se présente à un rendez-vous extrêmement important pour le couple, sans sa conjointe. Une heure plus tard, il repart chez lui, tout près. Neuf minutes plus tard, il appelle le 911. Selon son récit, c’est donc pendant cette absence d’une heure qu’Andréane Ouellet serait morte.

Au 911, l’accusé dit que le corps de sa conjointe est froid et qu’elle vomit du sang. Or, le corps de la défunte est déjà si rigide que les ambulanciers ne sont pas capables de l’intuber. D’autre part, un corps demeure chaud pendant une période conséquente après sa mort, selon un expert.

En outre, le récit d’Alexandre Boudreau-Chartrand est « improbable et invraisemblable », tranche la Couronne.

Le doute raisonnable évoqué par la défense

La défense a invité le jury à faire bénéficier Alexandre Boudreau-Chartrand du « doute raisonnable ». « Il est impossible avec la preuve que vous avez de reconstituer ce qui s’est passé exactement », a insisté l’avocate de la défense Me Élise Pinsonnault dans sa plaidoirie.

Aux yeux de la défense, le flou persiste dans la preuve. Comment Andréane Ouellet est-elle morte ? « Est-ce un coup ? Une chute. On ne sait pas ! », a insisté MPinsonnault. Si elle concède que la victime n’est pas « tombée toute seule », on ignore combien de coups l’accusé a pu donner, s’il en a donné.

« On essaie de dire qu’il est meurtrier. On ne sait pas ce qu’il a fait exactement. Prouvez-le ! », s’est-elle exclamée. « On n’est pas devant quelqu’un qui poignarde avec sang-froid. Ce sont des coups à la tête. Il y aurait beaucoup d’intention de tuer sur la planète si on se basait là-dessus », a fait valoir MPinsonnault, qui fait équipe avec MCatherine Ranalli.

Le jury devrait amorcer les délibérations la semaine prochaine.