La violence par arme à feu est en baisse marquée à Montréal depuis le début de l’année par rapport à l’année dernière, une amélioration que la police attribue notamment à une série d’arrestations ciblées dans le milieu des gangs.

Ce qu’il faut savoir

  • Montréal était aux prises avec une hausse des évènements violents impliquant des armes à feu depuis 2017, mais ceux-ci ont légèrement diminué en 2022.
  • Pour les cinq premiers mois de 2023, les chiffres du SPVM dénotent une baisse marquée d’environ 30 % des crimes par arme à feu.
  • Après s’être attaquée aux têtes dirigeantes de certains groupes, la police cible maintenant les suspects considérés comme les plus susceptibles d’utiliser des armes à feu, afin d’intervenir avant que la violence éclate.

Le bilan 2022 du SPVM, dévoilé la semaine dernière, montre une tendance à la hausse en ce qui a trait aux tentatives de meurtre par arme à feu et aux décharges d’arme à Montréal depuis 2017, mais une légère baisse entre 2021 et 2022

Consultez l’article de Radio-Canada « Le bilan 2022 du SPVM confirme la hausse de la violence dans les rues de la ville »

Au cours des cinq premiers mois de l’année 2023, la métropole a été le théâtre de 40 évènements de décharge d’arme à feu, comparativement à 58 pour la même période en 2022. Les tentatives de meurtre par arme à feu sont passées de 20 à 16 et les meurtres par arme à feu sont passés de six à trois, toujours pour la période du 1er janvier au 31 mai. Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) calcule que dans l’ensemble, les statistiques démontrent une baisse globale des crimes par arme à feu de près de 30 % cette année.

« Une baisse de 30 % c’est vraiment, vraiment remarquable, mais il n’y a rien de garanti pour l’été. Surtout pour le crime organisé, on sent qu’il y a certaines vengeances en train de se préparer. Mais on réserve certaines surprises au crime organisé, avec des arrestations dans les prochains mois », a assuré le directeur du SPVM, Fady Dagher, lors d’un point de presse jeudi.

« Ce n’est pas gagné. Il reste encore plusieurs mois pour cette période estivale », a prévenu le chef de police.

Coup de main de la Sûreté du Québec

Le SPVM attribue en partie cette baisse à une série d’arrestations ciblées réalisées dans le milieu des gangs de rue en avril. Comme l’an dernier, les policiers montréalais priorisent présentement la lutte contre la violence par arme à feu, avec 120 arrestations reliées à ce phénomène et un total de 367 armes saisies en cinq mois. Les enquêteurs des Crimes majeurs ont aussi résolu plusieurs homicides dans un laps de temps très court dernièrement.

C’est vraiment du travail colossal, titanesque effectué par nos policiers et je leur lève mon chapeau.

Fady Dagher, directeur du SPVM

Le directeur a d’ailleurs accompagné le Groupe tactique d’intervention sur une de ces frappes le 5 avril. Trois jeunes hommes liés aux gangs de rue avaient alors été trouvés en possession de pistolets Glock et de chargeurs à haute capacité. L’âge des suspects l’avait troublé.

« C’étaient des enfants… et ils avaient des armes », se désole-t-il.

Le SPVM a par ailleurs bénéficié d’un gros coup de main de la Sûreté du Québec, qui participe à plusieurs projets communs de lutte contre la violence armée, à travers la stratégie Centaure, un effort national de coordination financé par Québec. La Sûreté du Québec a aussi accepté de prêter des dizaines d’enquêteurs qui viendront en renfort à la police de Montréal temporairement.

Cibler les individus plus à risque

Le SPVM a d’ailleurs adapté ses stratégies de lutte contre la violence par arme à feu cette année, a expliqué l’inspecteur David Shane lors du même point de presse.

« L’année dernière, nous nous sommes concentrés sur les têtes dirigeantes. C’était nécessaire, mais cette année, on identifie des individus qui portent des armes et qui sont à risque », explique l’inspecteur.

Quelques équipes multidisciplinaires formées de policiers et d’employés civils, appelées des « collectifs », réunissent autour d’une même table des spécialistes de divers horizons pour cibler spécifiquement les suspects les plus susceptibles d’ouvrir le feu prochainement dans les rues de la métropole et intervenir auprès d’eux avant que la situation dégénère.

Car l’immense majorité des fusillades sont causées par un nombre assez restreint de criminels à Montréal.

« On ne parle pas de 1000 personnes », illustre Fady Dagher.

Ces « collectifs » regroupent des patrouilleurs, des enquêteurs, des spécialistes du renseignement et de la prévention qui mettent une pression constante sur les sujets les plus dangereux et prennent aussi contact avec les victimes potentielles pour désamorcer certaines situations.

« Leur mission, c’est d’essayer d’empêcher que des coups de feu soient tirés à Montréal et d’essayer de sortir des jeunes du milieu de la violence », a expliqué l’inspecteur Shane.

Ils vont essayer de trouver quels leviers activer pour prévenir les coups de feu. Parfois, ce sera de vérifier si les suspects brisent leurs conditions de remise en liberté. Parfois, ce sera de solliciter l’aide de leur famille, de leur milieu. Parfois, ce sera de les référer à un organisme communautaire. Dans bien des cas, il sera aussi question de procéder à leur arrestation pour d’autres crimes, avant qu’une situation escalade jusqu’à une fusillade.

David Shane, inspecteur au Service de police de la Ville de Montréal

« Si on a identifié un individu à haut risque de passage à l’acte pour un crime de violence et qu’il est actif dans la fraude par cartes de crédit, on va le travailler en matière de fraude par cartes de crédit », affirme David Shane.

Récemment, le rapport annuel du SPVM révélait que Montréal a connu une hausse de crimes en 2022, alors que l’ensemble des infractions ont augmenté de 13,6 % par rapport à la moyenne des dernières années.