Le prédateur sexuel accusé jeudi d’avoir drogué, puis agressé sexuellement cinq femmes rencontrées en ligne avait fait plusieurs victimes il y a quelques années en utilisant un stratagème similaire. Décrit par un expert comme un sadique sexuel, Samuel Moderie avait tout d’une bombe à retardement.

Cinq femmes seraient tombées dans les griffes de l’homme de 28 ans entre juillet 2022 et janvier 2023. Selon les policiers, il aurait drogué à leur insu ces femmes rencontrées sur des applications de rencontre, puis les aurait agressées sexuellement. Il aurait même filmé ses victimes. Il fait face à 13 chefs d’accusation.

Signe de la gravité de ses crimes : Samuel Moderie a fait l’objet d’une rare conférence de presse du Service de la police de la Ville de Montréal (SPVM) jeudi, puisque les enquêteurs ont de « fortes raisons » de croire qu’il aurait fait d’autres victimes. D’ailleurs, certaines femmes pourraient ne pas savoir qu’elles ont été agressées, puisqu’elles étaient inconscientes, a fait savoir une commandante du SPVM.

Mais le résidant de Saint-Zotique n’en était pas à ses premières victimes. Il a été condamné à deux ans de pénitencier en août 2019 pour des crimes sexuels commis entre 2017 et 2018.

Il avait plaidé coupable au palais de justice de Saint-Jérôme à des chefs d’agression sexuelle, d’agression sexuelle armée, de voyeurisme et d’avoir vaincu la résistance en administrant une drogue.

Son modus operandi à l’époque était semblable à celui décrit par le SPVM jeudi. Samuel Moderie a donné des somnifères à une femme sans son consentement à plusieurs reprises dans le but de l’agresser sexuellement, alors qu’elle était inconsciente. On évoque des « gestes à connotation sexuelle intrusifs » dans une décision de la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) rendue en mars 2020.

De plus, Samuel Moderie a photographié des femmes nues ou partiellement nues en plaçant une caméra dans leur salle de bain à quelques reprises. De telles vidéos ont été retrouvées dans son cellulaire. Des gestes « prémédités et perpétrés de façon répétitive » entre mai 2017 et juillet 2018, indique la CLCC.

De la déviance sadique

Un psychologue a conclu en 2019 que Samuel Moderie présentait un risque de récidive sexuelle au-dessus de la moyenne. Selon l’expert, le délinquant montrait des « indications claires » d’un trouble de voyeurisme et de sadisme sexuel. Également, même si Samuel Moderie niait son intérêt pour le viol et la violence envers les femmes, un test « phallométrique » a exposé ses intérêts sexuels déviants.

« Le scénario auditif qui a généré la plus forte excitation sexuelle est l’un de ceux qui décrivent l’agression sexuelle avec humiliation d’une femme adulte. Ainsi, le facteur “déviance sadique des intérêts sexuels” est identifié comme étant un facteur de risque impliqué dans votre dynamique de délinquance sexuelle », indique-t-on.

Dans la décision, on évoque également la jeunesse de Samuel Moderie. Ainsi, sa mauvaise relation avec la conjointe de son père lui aurait fait vivre « un sentiment d’exclusion et d’impuissance face à cette figure d’autorité féminine ». Un sentiment qui l’aurait mené à avoir du plaisir à « objectiver la femme, l’abuser et la dénigrer », explique la décision.

Sa consommation « excessive » de méthamphétamines à l’âge de 19 ans aurait aussi eu une influence « marquée » sur ses pulsions sexuelles, ajoute-t-on. Notons qu’il est également accusé aujourd’hui d’avoir possédé des stupéfiants.

Mais le profil de Samuel Moderie n’était pas que négatif en 2020. Il avait suivi avec succès un programme pour délinquants sexuels qui lui avait apparemment permis de reprendre le contrôle de ses émotions et d’identifier ses « erreurs de pensées » alimentant ses fantasmes.

Son niveau d’empathie envers les victimes s’était également amélioré, selon une agente de libération conditionnelle.

La CLCC avait refusé de lui accorder sa libération conditionnelle totale en raison de son risque de récidive au-dessus de la moyenne. « Bien que votre EGC [Équipe de gestion de cas] estime maintenant que votre risque de récidive se situe à modéré, ces informations et le fait que votre criminalité soit sérieuse militent en faveur de la prudence dans votre cas », avait écrit la CLCC en mars 2020.

Mais en évoquant son « cheminement important », les commissaires lui avaient accordé une semi-liberté, assortie de nombreuses conditions, pour contribuer à sa réinsertion sociale. Les commissaires avaient alors souligné sa démarche de changement « honnête et profonde » et la reconnaissance de sa déviance sexuelle.

Notons que Samuel Moderie avait terminé sa peine lorsqu’il aurait récidivé en juillet 2022. Il était toutefois sous le coup d’une probation de trois ans.

Son dossier retournera devant un juge la semaine prochaine.