Deux semaines avant de trouver la mort à moto dans une collision impliquant une famille de canards, Félix-Antoine Gagné avait reçu une formation avancée de conduite de moto donnée par son oncle, un instructeur spécialisé. L’homme de 19 ans conduisait d’ailleurs des véhicules depuis sa petite enfance, selon sa mère.

« [Félix-Antoine] maîtrisait les éléments de la moto, comme le contre-braquage », a affirmé au jury Luc Poulette, son oncle et parrain.

L’expérience de la victime au volant d’une moto s’est retrouvée mercredi au cœur des témoignages au troisième jour du procès devant jury d’Éric Rondeau. L’homme de 47 ans est accusé d’avoir causé la mort de Félix-Antoine Gagné en conduisant de façon dangereuse pour le public, le 22 juillet 2019, à Sainte-Élisabeth, près de Joliette.

Une vidéo présentée mardi au jury montre la collision dans son entièreté. On y voit l’accusé s’arrêter dans un virage de la route 345 au volant de sa camionnette Ford F-150 pour laisser traverser une famille de canards. Quelques secondes plus tard, il s’avance à très basse vitesse en empiétant considérablement sur la voie inverse. C’est à ce moment que survient la collision fatale.

IMAGE TIRÉE D’UNE VIDÉO PRÉSENTÉE EN PREUVE

On peut voir sur cette image la famille de canards sur la route et le véhicule immobilisé de l’accusé.

Selon la théorie de la Couronne, ce n’est pas la décision de l’accusé de s’immobiliser qui constitue une conduite dangereuse, mais plutôt sa manœuvre « volontaire » consistant à circuler à contresens à basse vitesse.

Par ailleurs, le procureur a souligné auprès du jury lundi qu’il ne s’agissait pas du procès de la victime, mais de celui de l’accusé.

PHOTO DÉPOSÉE EN PREUVE

Sur cette photo, on peut voir le véhicule de l’accusé et sa longue remorque se trouvant dans la voie inverse. Un témoin a toutefois précisé que le véhicule avait été déplacé d’un mètre par rapport à sa position initiale pour secourir la victime.

Mardi, un témoin a raconté que la victime avait dépassé son véhicule en franchissant une ligne double, peu de temps avant la collision mortelle. Le motocycliste roulait à environ 115 ou 120 km/h, selon le témoin. Ce dépassement n’était toutefois pas « téméraire », a-t-il insisté.

Cette route, la 345, Félix-Antoine Gagné la connaissait « énormément », puisqu’il l’empruntait matin et soir depuis trois ans, selon sa mère. « Il allait s’entraîner à Berthier, ses amis étaient là. Il pouvait aller trois, quatre fois à Berthier dans la même journée », a expliqué Lynda Poulette dans un témoignage émotif.

PHOTO TIRÉE DU SITE DOMAINEFUNERAIRE.COM

La victime, Félix-Antoine Gagné, 19 ans

Le jeune homme de 19 ans connaissait si bien cette route qu’il « aurait pu la faire les yeux fermés, comme dit l’expression », a résumé son oncle, Luc Poulette.

Informaticien de formation, M. Poulette est devenu moniteur de moto en 2019. Il a consacré une bonne partie de son témoignage à détailler le contenu de ses formations destinées aux motocyclistes d’expérience. D’ailleurs, deux semaines avant la collision, Félix-Antoine avait suivi l’une de ses formations de huit heures. Il avait ainsi appris, entre autres, des notions de freinage d’urgence et de contre-braquage.

« Il était content, il était heureux. Je le voyais dans son sourire, par ses yeux. La passion, ça paraît dans le regard de quelqu’un », a affirmé Luc Poulette.

La victime conduisait des véhicules depuis l’âge de 4 ans, selon sa mère. « Il a toujours conduit des moto-cross, des quatre-roues. Il aimait beaucoup conduire, Félix-Antoine », a-t-elle confié.

Félix-Antoine Gagné a grandi dans un « environnement de moteurs », a soutenu son oncle. « La moto, c’est pratiquement de génération en génération. Ça fait partie des gènes », a-t-il renchéri.

Le jour de la collision, la victime conduisait une Yamaha R6 de 600 cc, une moto considérée comme « sport », a expliqué Luc Poulette. En contre-interrogatoire, il a ajouté que cette moto était identifiée par la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) comme une moto « à risque ».

Le juge Marc-André Blanchard a précisé au jury que ces témoignages servaient uniquement à déterminer si la conduite de l’accusé avait « contribué de façon appréciable » à la mort de la victime. Il s’agit d’un élément clé pour établir la culpabilité ou la non-culpabilité de l’accusé.

MAlexandre Dubois et MJade Coderre représentent le ministère public. MRichard Dubé défend l’accusé. Le procès se poursuit ce jeudi au palais de justice de Joliette avec le témoignage d’un expert en reconstitution d’accident.