Un jeune rappeur montréalais qui a exhibé une dizaine d’armes à feu avec ses complices vêtus de cagoules dans un populaire vidéoclip a été condamné mercredi à trois ans de détention. Yahya Mouhime, un membre de gang d’allégeance rouge, est soupçonné d’avoir menacé de mettre un « contrat » sur la tête d’une avocate criminaliste.

« C’est VT dans le S1 qui te texte. Je te le dis juste une fois petite pute fuck. […] c’est la fin de ta tite carrière d’avocate. On connaît ton adresse. […] Next time, tu vas voir c’est quoi vivre avec un contrat sur sa tête*. »

C’est l’inquiétante menace qu’une avocate de la défense a reçue par message texte en janvier 2022, révèle une dénonciation du Service de police de la Ville de Montréal en vue d’obtenir une ordonnance de communication. Pour des raisons de sécurité, nous avons choisi de ne pas nommer la plaignante, qui n’a jamais représenté le suspect.

Le « VT » mentionné dans le texto est Yahya Mouhime, qui serait membre des « Profit Boyz » de Saint-Léonard, selon le document judiciaire.

En guerre avec ses rivaux des quartiers voisins, ce gang est en partie responsable de la flambée de violence par armes à feu à Montréal.

Quand les textos menaçants ont été envoyés à l’avocate, Yahya Mouhime était détenu à la prison de Rivière-des-Prairies, en attente de procès dans son dossier d’armes à feu qui s’est conclu mercredi. Les agents correctionnels ont fouillé la cellule de « VT » et ont mis la main sur un petit téléphone cellulaire noir caché sous une semelle de soulier, indique le document judiciaire. Or, ce téléphone ne serait pas à l’origine des textos, écrit la sergente-détective dans le document. L’enquête se poursuit donc.

Notons qu’aucune accusation n’a encore été déposée dans cette affaire.

Véritables armes à feu dans un vidéoclip

Le jeune rappeur « VT » est suivi par 27 000 personnes sur YouTube, où ses vidéoclips sur son mode de vie criminel accumulent jusqu’à 2 millions de visionnements. Dans sa plus récente chanson, il dresse par exemple la liste des gens qu’il veut abattre. C’est d’ailleurs pour l’un de ses vidéoclips, intitulé Pause, que Yahya Mouhime a été condamné mercredi à trois ans et trois mois de prison par le juge Pierre Dupras, à la suite d’une suggestion commune des avocats.

Compte tenu de sa détention préventive depuis son arrestation en janvier 2021, sa peine à purger à ce jour est de 14 mois et demi. Il avait plaidé coupable en mars dernier à des accusations de possession de dispositif prohibé (un silencieux) et de possession d’arme à feu prohibée.

Dans ce vidéoclip, le rappeur de 20 ans s’affiche à visage découvert, alors que ses complices et lui exhibent huit véritables armes à feu vers la caméra. On peut voir Yahya Mouhime manipuler un pistolet de calibre .45 et un second pistolet muni d’un chargeur haute capacité, selon les faits admis. Malgré la prétention des auteurs de la vidéo, les armes à feu étaient authentiques.

Quatre des armes à feu apparaissant dans le vidéoclip ont plus tard été saisies par les policiers, dont à l’occasion d’une fusillade en janvier 2020 et lors de trois perquisitions en matière de drogue en 2021 à Montréal, Laval et Longueuil.

D’autres hommes envoyés en prison

Visé par un mandat d’arrêt, Yahya Mouhime a nargué les policiers pendant des mois en 2020 en s’affichant avec des armes à feu dans ses nouveaux vidéoclips. Devant le juge, en mars dernier, le jeune homme s’est permis de fanfaronner en quittant le box des accusés, provoquant les rires de ses coaccusés en liberté.

L’enquête policière a permis de découvrir l’identité de la plupart des hommes masqués dans le vidéoclip. Trois d’entre eux ont plaidé coupable en mars dernier à diverses accusations liées à la possession d’arme à feu, soit Wiliam Tshidibumvu, Jemsley Printemps-Sanon et Devon Vilmond Kylel.

Mercredi, Jemsley Printemps-Sanon a été condamné à 18 mois de prison. Quant à Wiliam Tshidibumvu, il a reçu une peine de deux ans, moins un jour, pour l’ensemble de ses dossiers en mai dernier. L’homme de 25 ans était aussi un « exécutant » dans un réseau de vol d’identité.

Me Éric Poudrier et MJean-Philippe MacKay ont représenté le ministère public dans ce dossier, alors que MFrançois Gauthier a assuré la défense de MM. Mouhime et Printemps-Sanon.

* Propos corrigés pour en rendre le contenu compréhensible