L’homme criblé de balles en plein jour dans son véhicule alors qu’il s’apprêtait à entrer dans un lave-auto dans l’arrondissement de Saint-Léonard est Stéphane Dupuis, un proche de la mafia et des motards, a appris La Presse de plusieurs sources.

Dupuis, 51 ans, est considéré par la police comme un trafiquant de cocaïne et un prêteur, selon nos sources.

Il avait déjà survécu à une tentative de meurtre par balles le soir du 24 octobre 2020 à Laval, alors qu’il revenait à la maison.

C’est mardi vers 10 h 30 que le meurtre est survenu, rapporte le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). La victime se trouvait à bord d’une Chevrolet Tahoe sur le terrain d’un lave-auto situé sur la voie de desserte de l’autoroute Métropolitaine, près du boulevard Lacordaire.

Quelques heures après le crime, le VUS noir à la vitre fracassée était toujours aux abords du commerce. Un chandail noir et d’autres effets personnels traînaient à côté du véhicule, minutieusement inspecté par les policiers.

  • Un homme se serait approché du VUS conduit par Stéphane Dupuis et aurait tiré plusieurs coups de feu, avant de prendre la fuite à bord d’un véhicule qui aurait été retrouvé incendié.

    PHOTO PHILIPPE BOIVIN, LA PRESSE

    Un homme se serait approché du VUS conduit par Stéphane Dupuis et aurait tiré plusieurs coups de feu, avant de prendre la fuite à bord d’un véhicule qui aurait été retrouvé incendié.

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Selon une source, Dupuis avait une routine le matin et se serait rendu régulièrement dans ce commerce.

« La victime attendait visiblement pour entrer dans le lave-auto. Des témoins ont raconté avoir vu un ou des individus s’approcher du VUS de la victime, tirer plusieurs coups de feu en direction du conducteur, prendre la fuite en courant vers le stationnement d’un restaurant situé tout près et monter à bord d’un véhicule », raconte l’agent Manuel Couture du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

Le véhicule utilisé par les suspects, un Honda CRV noir, a ensuite été retrouvé incendié environ 500 mètres plus loin, à l’angle des rues Follereau et Montpetit. L’arrière du véhicule a subi de légers dommages, sans plus.

Cette façon de faire, mettre le feu à un véhicule et l’abandonner non loin des lieux du crime, portait la signature des motards durant la guerre des années 1990 et 2000.

« Un ou deux hommes » ont quitté le véhicule en trombe avant de s’engouffrer dans une autre voiture, confie une femme assise sur son balcon au moment des faits.

La victime a été transportée à l’hôpital où son décès aurait été constaté.

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE

Stéphane Dupuis au début des années 2000.

D’après nos informations, Dupuis serait un proche de l’ancien Hells Angels Mario Brouillette et aurait été observé à maintes reprises par les policiers ces dernières années dans des cafés italiens ou en compagnie de membres influents de la mafia.

Dupuis, qui était également soupçonné de financer des importations et d’être un distributeur de cocaïne, aurait été régulièrement flanqué d’un garde du corps en 2019-2020.

Selon nos renseignements, ces dernières années, Dupuis aurait été en conflit avec un individu lui-même victime d’une tentative de meurtre l’an dernier à Laval.

Les enquêteurs des Crimes majeurs du SPVM devront toutefois examiner toutes les hypothèses et c’est une enquête compliquée qui s’annonce pour eux.

Ils ont commencé à rencontrer des témoins et à repérer les caméras de surveillance des commerces qui sont omniprésents dans ce secteur.

Il s’agit du sixième meurtre commis depuis le début de l’année à Montréal.

Un coffre-fort bien garni

Durant les années 2000, Stéphane Dupuis avait été arrêté dans le cadre d’une enquête de l’ancienne Escouade régionale mixte – qui avait succédé à Carcajou – baptisée Ziploc.

Lors de l’enquête, Dupuis avait notamment échangé de fortes sommes d’argent avec un individu qu’il ignorait être une taupe pour la police.

Des membres des Hells Angels étaient également apparus dans l’enquête, mais n’avaient pas été accusés.

Durant l’enquête Ziplock, les enquêteurs avaient communiqué avec leurs collègues de la GRC, qui débutaient alors le projet antimafia Colisée, pour leur annoncer que Dupuis faisait affaires avec un joueur important du clan Rizzuto, Francesco Del Balso.

Les enquêteurs de Colisée s’étaient rendus en pleine nuit chez une proche de Dupuis, dans l’arrondissement d’Anjou, où il cachait son argent, et ils étaient repartis silencieusement avec un coffre-fort rempli de dollars en marchant sans chaussures dans les corridors, pour ne pas réveiller les résidants de l’immeuble.

Les enquêteurs avaient remarqué que Dupuis se penchait chaque fois qu’il entrait et sortait du condo. Ils se sont rendu compte qu’il coinçait un trombone dans le calfeutrage de la porte et ont pris soin de bien le remettre à sa place après leur perquisition.

La Division des produits de la criminalité de la GRC avait enquêté sur ce volet et demandé la confiscation d’une somme de plus de 300 000 $ canadiens et américains reliée à Stéphane Dupuis, selon des documents judiciaires obtenus par La Presse.

En 2008, Dupuis a été condamné à 35 mois pour trafic de cocaïne et gangstérisme dans la foulée de l’enquête Ziploc.

Après le coup de fil de la SQ, Del Balso est devenu un sujet d’intérêt pour les enquêteurs de Colisée, qui ont ainsi pu progresser dans cette enquête devenue historique.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.

Avec Mayssa Ferah, La Presse