Les enfants ont besoin d’un permis municipal pour jouer au hockey ou au ballon dans les rues à Les Cèdres, en Montérégie. La municipalité est loin d’être la seule à avoir encadré cette pratique tolérée de longue date.

L’hôtel de ville local a publié cette semaine un communiqué pour rappeler à ses jeunes citoyens que le jeu libre était encadré sur son territoire.

La Ville dit ainsi répondre à une exigence du Code de la sécurité routière, qui interdit effectivement d’« occuper la chaussée » sans y être autorisé. Depuis 2017, le Code donne aux municipalités le droit d’adopter des règlements pour permettre le jeu libre, ce que la petite municipalité a fait l’automne dernier.

À Les Cèdres, ceux qui veulent jouer dans la rue doivent remplir un formulaire, faire signer 66 % des résidants de leur rue (ou portion de rue), présenter leur demande au directeur des loisirs qui l’analysera et la transmettra au conseil municipal pour qu’il se prononce. La procédure doit être effectuée chaque année.

« L’objectif n’est pas d’interdire l’utilisation de la chaussée pour le jeu libre, c’est plutôt de démocratiser le choix d’un espace », a indiqué le directeur général de Les Cèdres, Jimmy Poulin, en entrevue téléphonique. « Il existe un enjeu important de sécurité avec la circulation automobile dans les quartiers. Les automobilistes ne respectent pas nécessairement les règles. »

En date du jeudi 6 juin, aucune zone n’avait reçu son permis à Les Cèdres.

M. Poulin a indiqué que la Ville ferait preuve de beaucoup de compréhension et de souplesse dans l’application de son règlement. Celui-ci prévoit des amendes allant jusqu’à 1000 $ pour les contrevenants.

Ailleurs aussi

Depuis 2017, plusieurs autres villes du Québec ont voté des règlements pour encadrer le jeu des enfants dans leurs rues.

À Mascouche par exemple, une longue liste de rues résidentielles viennent d’être désignées. « On veut faire bouger plus les jeunes en facilitant l’accès aux sports et aux jeux », a affirmé le maire Guillaume Tremblay dans une vidéo mise en ligne mi-mai. « Plus d’excuses : on lâche les écrans, on lâche les jeux vidéo, on met nos souliers et on va jouer dehors ! »

Saint-Bruno-de-Montarville a autorisé le jeu libre dans plus d’une quarantaine de rues, mais l’a refusé dans une trentaine d’autres. Chaque demande doit respecter des critères stricts puis être soumise à un sondage « auprès de tous les résidents de la rue concernée », indique la municipalité sur son site internet. La demande doit alors recevoir au moins 66 % avec au moins 66 % de taux de participation, à défaut de quoi elle sera refusée.

Les taux de soutien nécessaires ne sont d’ailleurs pas uniformes à travers la province. À Sainte-Agathe-des-Monts, le seuil minimal d’approbation des voisins est fixé à 60 %, alors qu’il est de 50 % à Charlemagne. À Verdun, il faut 5 % de signatures pour formuler une demande aux fonctionnaires de l’arrondissement, mais un autre mécanisme permet ensuite aux voisins de s’opposer.

« Une question de sécurité des enfants »

On peut discuter des modalités précises d’autorisation du jeu dans les rues, mais la cohabitation entre autos et jeunes est un vrai enjeu de sécurité publique, a fait valoir l’ex-ministre des Transports Robert Poëti en entrevue téléphonique avec La Presse.

« Les villes devraient évaluer chaque rue sur les risques potentiels » avant d’y laisser jouer les enfants, a-t-il plaidé. « Ça ne peut pas être dans toutes les rues qu’on peut spontanément jouer. Pour moi, c’est une question de sécurité des enfants. »

« Ce n’est pas dans toutes les municipalités qu’il y a des limites de 30 km/h ou de 40 km/h », a-t-il souligné. « Et souvent, ce sont les résidants de la rue eux-mêmes qui dépassent la limite. »

Pour Christian Savard, de l’organisme Vivre en Ville, obliger des enfants à faire signer un formulaire à leurs voisins pour jouer dans une rue est complètement déraisonnable.

« Il y a quelque chose comme du gros bon sens », a-t-il dit. « Dans une rue résidentielle, surtout dans une ville de banlieue, le jeu devrait être permis d’office, à mon avis. D’avoir à demander des permis, ça ressemble à une bureaucratie tatillonne et invasive. »

Face à l’argument qui fait valoir qu’il s’agit d’un transfert de pouvoir entre les mains des résidants, M. Savard fait plutôt valoir que « c’est une manière de donner un pouvoir de blocage à d’éventuels voisins bougonneux ».

Rectificatif 
Une version précédente de ce texte contenait une erreur quant au nom de famille du directeur général de Les Cèdres.