Après des années d’attente, les usagers du transport collectif du Grand Montréal pourront finalement recharger leur carte OPUS avec un téléphone mobile d’ici la fin d’avril. Et plusieurs autres villes de la province devraient monter à bord du train piloté par l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM).

« On a vraiment hâte que tous les usagers y aient accès. Ça va être un gros changement et ça va lever beaucoup de barrières, surtout pour les gens qui habitent plus loin, pour qui ce sera très utile afin de pouvoir prendre leur bus plus facilement », affirme le chargé de projet à l’ARTM Youness Touzani en entrevue.

C’est son équipe qui mène depuis plusieurs semaines déjà des tests sur le futur système de recharge OPUS mobile, qui fonctionnera par l’entremise de l’application Chrono.

Le principe est simple : l’usager approche sa carte OPUS de son téléphone et peut en consulter le contenu grâce à une application. Celle-ci lui permet également d’acheter des titres et de les ajouter à sa carte. Cela dit, il ne sera toujours pas possible de présenter son téléphone aux tourniquets ; cela devrait être fait d’ici 2026. Il faudra pour le moment continuer d’utiliser sa bonne vieille carte physique bleu et orange.

Mis à part les simulations faites avec des employés de l’Autorité, trois phases de tests ont eu lieu depuis février, pour un total d’environ 11 000 usagers. Les résultats préliminaires montrent que 93 % d’entre eux « n’ont eu aucun problème à utiliser » l’application Chrono.

La Presse l’a aussi essayée et est parvenue à acheter des titres facilement.

En date du 6 mars, près de 6600 transactions avaient été conclues avec Chrono, soit un taux de 94 %, la moitié effectuée sur Android et l’autre moitié sur iOS d’Apple.

La dernière phase de tests doit prendre fin le 24 mars, après quoi les dernières validations seront faites sur les correctifs aux problèmes observés – des bogues de paiement, de connexion et d’affichage ont notamment été décelés. L’ARTM s’attend malgré tout à offrir la recharge mobile dans le courant du mois d’avril.

Selon les estimations actuelles, ce nouveau système numérique « devrait générer entre 5 et 6 millions de transactions par année, avec des pics en début de mois », affirme M. Touzani. L’application a d’ailleurs été « conçue pour bien tenir lors de ces périodes chaudes d’utilisation », assure-t-il.

Vers « OPUS 2,0 »

L’arrivée de la recharge mobile s’inscrit dans la vaste transformation numérique en cours à l’ARTM. D’ici 2027, un système « multi-modes » sera déployé, possiblement au moyen de la même application mobile, en réunissant le métro, le bus, le REM, l’autopartage, le vélopartage, le taxi, le covoiturage ou encore la trottinette électrique.

Fin août, La Presse révélait que cette transformation, baptisée projet « Concerto », coûterait 144 millions, avec un budget pour les imprévus de 18,5 millions, pour un total de 162 millions. L’ARTM évalue que ces investissements rapporteraient 364 millions de retombées d’ici 2035.

« Avec la recharge OPUS, on a repoussé les limites de la capacité du système actuel. Là, on arrive au maximum de ce que le système peut prendre en termes de nouvelles fonctionnalités », nuance toutefois le directeur des affaires publiques de l’Autorité, Simon Charbonneau.

Il rappelle qu’un appel d’offres est toujours en cours pour « changer toute l’architecture d’OPUS ». « On s’en va vraiment vers un modèle 2,0, en passant d’un système basé sur la carte à une banque de données décentralisées où on a toute l’information des usagers. Ça nous permettrait d’émuler des modèles de validation de billets avec le téléphone, par exemple », note M. Charbonneau.

Selon l’ARTM, l’achalandage pourrait augmenter en raison de la combinaison de nombreux modes de transport, avec un total de 155 millions de déplacements d’ici 12 ans, en plus de 364 millions de dollars de retombées financières dans le même intervalle.

Québec, Lévis et Joliette

Trois villes, Québec, Lévis et Joliette, recevront quant à elles d’ici juin prochain la solution logicielle de l’ARTM « en marque blanche ». Autrement dit, les sociétés de transport de ces villes pourront se servir de la technologie de recharge mobile, mais en développant leur propre application mobile, Chrono étant réservée au Grand Montréal.

D’autres municipalités pourraient aussi faire connaître leur désir d’obtenir ladite technologie dans les prochains mois, affirme M. Charbonneau, qui ne cache pas que « des discussions sont déjà en cours ».

L’arrivée de la recharge mobile signifiera par ailleurs la fin du service « OPUS en ligne », qui fonctionne à l’aide d’un lecteur de carte branché à un ordinateur. « Il est en fin de vie, ça va être décommissionné d’ici juin », affirme à ce sujet M. Touzani, qui souligne qu’une transition sera assurée avec les usagers assidus.

Outre les sociétés membres de l’ARTM dans le Grand Montréal, plusieurs autres transporteurs majeurs comme le Réseau de transport de la capitale (RTC) utilisaient « OPUS en ligne » depuis quelques années.