Des robots sont désormais chargés de la vaste majorité des massages cardiaques pratiqués dans les ambulances de Montréal et de Laval, après qu’Urgences-santé s’est vu adresser un ultimatum par les pompiers de la métropole.

Ce qu’il faut savoir

  • Urgences-santé a maintenant recours à des robots pour pratiquer les massages cardiaques dans ses ambulances en route vers un hôpital.
  • L’organisation ambulancière, qui couvre Montréal et Laval, avait été mise au pied du mur par les pompiers, qui refusaient de continuer à effectuer ces manœuvres.
  • Un pompier de Montréal avait été grièvement blessé en 2020. En novembre 2023, une infirmière avait été éjectée d’une ambulance en Estrie dans des circonstances similaires.

Ces appareils permettent d’éviter que les premiers répondants demeurent debout et non attachés pour tenter de ramener un patient à la vie dans un véhicule qui file à toute allure.

Un pompier de Montréal a été grièvement blessé dans ces circonstances en 2020, lorsque l’ambulance dans laquelle il se trouvait a été impliquée dans un accident. Il n’est toujours pas de retour au travail. En novembre dernier, une infirmière a aussi été grièvement blessée dans des circonstances similaires après une sortie de route, en Estrie.

PHOTO HAL NEWMAN, TIRÉE DU COMPTE TWITTER D’HAL NEWMAN

Un accident majeur impliquant une ambulance est survenu sur l’autoroute 10, à la hauteur d’Eastman, en Estrie, en novembre dernier.

« On a deux principales préoccupations : la sécurité de nos patients et la sécurité de nos intervenants », a indiqué Mathieu Campbell, directeur général adjoint d’Urgences-santé, en entrevue. Une vingtaine de robots, baptisés Lucas3, ont été achetés en tout début d’année. Ils forment une arche au-dessus de la poitrine du patient et sont munis d’une ventouse qui administre les compressions.

Un appareil appelé à se répandre

Pour l’instant, seules les équipes de soins avancées – celles qui sont appelées à intervenir dans les cas les plus graves – sont munies de ces robots. La majorité des arrêts cardiaques se retrouvent toutefois entre leurs mains.

On vise à ce que tous les appels pour lesquels cet appareil pourrait être utilisé [fassent l’objet d’un déploiement d’une ambulance qui en est équipée].

Mathieu Campbell, directeur général adjoint d’Urgences-santé

Quant à la performance du robot pour tenter de ramener un patient à la vie, le gestionnaire a indiqué qu’il n’y avait « pas d’écart » relevé par rapport à un massage cardiaque pratiqué par un humain. L’appareil, de fabrication suédoise, est déjà utilisé ailleurs au Québec.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

L'étui de transport d'un robot Lucas3

À terme, Urgences-santé pourrait équiper ses autres véhicules de la même technologie. « Ça fait partie des stratégies qu’on a retenues pour un déploiement dans l’ensemble de notre territoire », a affirmé M. Campbell.

Ultimatum

Selon un rapport de santé et sécurité au travail, le Service incendie de Montréal (SIM) et celui de Laval avaient adressé un ultimatum le 18 décembre 2023 à Urgences-santé, annonçant que leurs pompiers refuseraient de monter dans une ambulance en mouvement s’ils n’étaient pas assis et attachés. La nouvelle directive devait entrer en vigueur le 21 décembre. Radio-Canada avait déjà rapporté cette information.

Ce jour-là, un pompier avait officiellement informé la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) qu’il appliquerait la directive et refuserait de se mettre en danger en montant dans une ambulance sans ceinture de sécurité.

La CNESST a toutefois été rassurée par le plan d’action d’Urgences-santé, qui a décidé à la même période de procéder à l’acquisition d’un premier lot de robots masseurs.

Le contrat de près de 400 000 $ a été passé en urgence, sans appel d’offres, en raison du « refus des premiers répondants de Laval et Montréal de faire des massages cardiaques dans une ambulance en mouvement mettant en danger la vie des patients ».

« Urgences-santé Québec s’est vu dans l’obligation de faire l’acquisition de 20 masseurs cardiaques », explique l’organisation, dans sa déclaration sur la plateforme d’appels d’offres gouvernementale.

« On était déjà en démarche »

En entrevue avec La Presse, Mathieu Campbell nuance et souligne que la possibilité d’utiliser les Lucas3 était déjà à l’étude avant l’ultimatum des pompiers.

« Ce n’est pas la lettre du SIM [qui a déclenché les choses], a-t-il assuré. On était déjà en démarche avec eux. »

« On a voulu prendre le temps d’analyser et de s’assurer que le déploiement de ces mesures-là allait répondre […] à nos enjeux de sécurité des patients », a continué M. Campbell. « On a pris soin de faire ces évaluations-là pour être certains que le déploiement ne présente pas un risque. »

Urgences-santé a souligné que l’achat des robots n’était pas la seule mesure mise en place pour protéger les premiers répondants : les paramédicaux sont mieux formés à la conduite sécuritaire et des ceintures de sécurité ont été installées à l’arrière des ambulances, ce qui leur permet de pratiquer certains gestes en demeurant assis. Par ailleurs, la nécessité qu’un premier répondant soit présent dans l’ambulance fait dorénavant l’objet d’une réflexion plus poussée qu’auparavant.