Nouveau jalon, nouveau retard. Le prolongement de la ligne bleue du métro semble bel et bien sur les rails, mais arrivera à destination avec au moins une année supplémentaire de retard, a appris La Presse.

La Société de transport de Montréal (STM) n’espère plus inaugurer ses cinq nouvelles stations avant 2030. On évoquait 2026 au début de la pandémie, puis 2029 dans les dernières années.

« J’ai hâte de pouvoir prendre le métro, mais une chose qui est sûre, c’est qu’on est responsables, a affirmé le président de la Société de transport de Montréal, Éric Alan Caldwell, en entrevue téléphonique. On a écouté le marché. Ce sont de gros projets, des projets complexes, et c’est à la suite de cette relation d’écoute et d’ajustement avec le marché que l’équipe de projet en est venue à cette conclusion. Et je lui fais confiance. »

« Ce dossier-là, il faut qu’il avance, a-t-il ajouté. On a très hâte d’offrir le service aux gens de l’Est. »

Ce sont les entreprises intéressées au mégacontrat de creusage du tunnel de 5,7 kilomètres qui ont fait comprendre à la STM qu’elle devait revoir son échéancier, a indiqué l’organisation.

En 2022, au moins deux entreprises ou consortiums se sont qualifiés pour participer à l’appel d’offres en question. En 2023, ils ont pu participer à un processus préliminaire à l’issue duquel une phase de discussion et de négociation avec la STM s’est tenue, cet été.

Ce mardi, la STM lance la phase finale du processus d’attribution du contrat, qui devrait lui permettre d’annoncer un gagnant dans les premiers mois de 2024.

« On est heureux de lancer l’étape finale de l’appel d’offres pour ce contrat-là », a dit Maha Clour, directrice du bureau de projet du prolongement de la ligne bleue. « La période de discussion a porté fruit parce que ça nous a permis justement de mieux connaître les contraintes et les conditions de marché. Ça a permis également au marché de mieux connaître nos contraintes et nos conditions. »

Début de l’excavation en 2024

Le mégacontrat, que Mme Clour surnomme la « colonne vertébrale » du projet, comprend le perçage de l’ensemble du nouveau tunnel à l’aide d’un tunnelier, ainsi que l’excavation des futures stations vis-à-vis des boulevards Pie-IX, Viau et Lacordaire. « Le trou horizontal à la grandeur, puis trois des cinq trous verticaux », a résumé Éric Alan Caldwell.

Le tunnelier sera inséré à l’emplacement de la station prévue à l’intersection Pie-IX et Jean-Talon.

On ne devrait pas tarder à commencer le creusage de ce trou, selon la STM. Le retard d’un an, « ça ne change absolument rien à la cadence et à l’intensité des travaux qui sont faits pour faire atterrir ce projet-là », a dit M. Caldwell. Le début des « grands travaux d’excavation des trois premières stations, comme j’ai mentionné tantôt, sont planifiés pour 2024, a ajouté Maha Clour, sur la même ligne. Le tunnelier devrait arriver quelques mois plus tard pour commencer l’excavation du tunnel en souterrain. »

La STM ne veut pas révéler la valeur approximative du contrat du tunnelier, de peur de donner des indications aux soumissionnaires. On sait toutefois qu’elle s’attend à payer de 710 à 990 millions pour un autre contrat d’excavation et de bétonnage, de moins grande ampleur.

Pour l’instant, le budget du projet demeure inchangé à 6,4 milliards, ont indiqué les deux interlocuteurs de La Presse.

« L’appel d’offres se fait dans le cadre de l’enveloppe de 6,4 milliards qui a été accordée, en toute connaissance de cause de tous les impacts, a dit M. Caldwell. L’équipe de projet regarde tous les éléments et nous propose les meilleures solutions possible. »

« Ce projet-là a assez attendu »

Demeure toujours le danger que le long processus d’attribution du contrat se termine mal : avec aucun ou un seul soumissionnaire intéressé à creuser le tunnel.

Le premier scénario constituerait un problème d’ampleur. Le second ne semble pas faire paniquer la STM.

« Même si, ultimement, il n’y a qu’un prix déposé, le processus est conforme, donc on peut aller de l’avant techniquement avec l’adjudication du contrat », a expliqué Mme Clour. Elle y est ensuite allée d’un avertissement visiblement adressé aux soumissionnaires.

On a écouté le marché. On s’est adaptés. Et on s’attend à ce que le marché s’adapte à nous aussi. On s’attend à ce que le ou les prix soumis reflètent le meilleur prix pour les travaux qui doivent être réalisés.

Maha Clour, directrice du bureau de projet du prolongement de la ligne bleue

« En gros, ce projet-là a assez attendu, a continué M. Caldwell. Une des leçons de l’histoire, c’est que plus on attend, plus c’est compliqué et que ça coûte cher. Enfin on a fait débloquer la ligne bleue, clairement il faut aller de l’avant. » Il a ensuite nuancé en spécifiant qu’il ne voulait pas commenter un scénario hypothétique.

Ce qui n’est pas hypothétique, par contre, c’est le caractère complexe du processus d’appel d’offres, a fait valoir l’élu municipal. Avis de qualification, puis de premier appel d’offres, puis second appel d’offres avec relativement peu d’espace de négociation entre STM et entreprises.

« On veut travailler avec le gouvernement justement pour revoir le cadre pour la réalisation des grands projets », a-t-il affirmé, en lien avec l’annonce récente de la volonté de Québec de créer une agence pour les grands projets de transport. Il faut « un mode de collaboration entre promoteurs et entrepreneurs pour trouver les meilleures solutions techniques de mise en œuvre de séquences afin de minimiser les risques et avoir le meilleur modèle de réalisation possible. »