Il sera désormais plus avantageux de covoiturer que de miser sur les transports en commun dans le Grand Montréal. L’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) lance jeudi un projet pilote de 18 mois qui permettra aux passagers de payer moins cher que s’ils prenaient l’autobus et rémunérera les conducteurs.

Ce qu’il faut savoir

  • Les passagers paieront 0,12 $ par kilomètre sur la nouvelle application de covoiturage de l’ARTM
  • Les conducteurs pourront toucher jusqu’à 0,54 $ par kilomètre, en fonction du nombre de passagers et du trajet choisi. Des incitatifs sont prévus pour traverser les liens entre Montréal et la Rive-Sud.
  • Un maximum de deux trajets par jour par chauffeur sera pour l’instant autorisé, l’objectif n’étant pas d’en faire un commerce.

L’ARTM a annoncé jeudi qu’elle lançait une nouvelle application pour favoriser le covoiturage dans le cadre de la réfection du pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine. Les passagers devront payer 0,12 $ par kilomètre et les conducteurs pourront toucher jusqu’à 0,54 $ par kilomètre, s’ils transitent par l’un des quatre principaux liens entre Montréal et la Rive-Sud.

Disponible en version bêta sur iOS et Android depuis le jeudi 4 mai, l’application mobile de l’ARTM était en cours de développement depuis 2020. Des tests en circuit fermé se déroulaient aussi depuis le mois de janvier dernier. Elle sera disponible pour 18 mois dans un premier temps, mais pourrait demeurer en fonction après si tout se passe bien.

L’objectif est notamment de désengorger le secteur du mégachantier du pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, qui entraîne la fermeture de trois voies sur six jusqu’en 2025. Les citoyens de toute la région pourront toutefois participer, donc autant ceux des couronnes nord et sud que les résidants de l’île de Montréal.

Des revenus possibles

Au moyen d’un compte PayPal, le conducteur qui prend un passager et qui utilise l’un des quatre axes interrives – le pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine ou les ponts Jacques-Cartier, Samuel-De Champlain ou Victoria – recevra 0,34 $ le kilomètre. Avec deux passagers, il touchera 0,44 $ et avec trois, 0,54 $.

Sans emprunter les quatre axes névralgiques, le conducteur touchera toutefois beaucoup moins, soit 0,10 $ pour un passager, 0,20 $ pour deux passagers et 0,30 $ pour trois passagers. Le passager, lui, devra payer 0,12 $ par kilomètre franchi selon l’application, peu importe le trajet.

L’ARTM autorisera pour l’instant un maximum de deux trajets par jour pour le chauffeur.

Elle espère ainsi « lutter contre l’auto solo » sur les principaux axes de passages, affirme son porte-parole, Simon Charbonneau.

Bref, le covoiturage coûtera moins cher, la plupart du temps, que le transport collectif, selon les calculs de La Presse. Ainsi, pour se rendre au centre-ville de Montréal, une personne partant de Longueuil paiera en moyenne 1,09 $ avec l’application, contre 4,50 $ pour un billet de transport collectif. De Sainte-Julie, le covoiturage reviendra à 3,41 $, contre 6,50 $ pour un trajet en bus. En provenance de Saint-Hyacinthe, ce sera environ 7,29 $ contre 9,25 $ en transport en commun.

Comme les conducteurs recevront plus que ce que rapporteront les frais imposés aux passagers, le manque à gagner sera épongé par l’enveloppe budgétaire de la réfection du tunnel, d’environ 2,5 milliards. Pour éviter que des passagers soient incapables de trouver une voiture pour rentrer à domicile, trois « retours garantis » seront offerts aux passagers par année, en cas d’annulation à quatre heures et moins de préavis. L’ARTM donnera alors une somme maximale de 55 $ pour rentrer chez soi en taxi ou en transports en commun.

Une première canadienne

« C’est une première au Canada, la rémunération du covoiturage. C’est aussi la première fois que l’ARTM s’avance du côté du covoiturage. On invite vraiment les personnes seules dans leur voiture à y réfléchir. C’est une diminution minimale de 10 sous le kilomètre. C’est fort intéressant », affirme M. Charbonneau.

On le voit un peu comme une expérience sociologique. L’application est un outil, on veut voir l’appropriation que les gens vont en faire

Simon Charbonneau, porte-parole de l’ARTM

L’ARTM ne cache pas qu’un des buts de cette nouvelle application est de « collecter des données probantes » en vue d’un autre projet majeur : son Programme numérique de mobilité. Il s’agit d’une application qui regrouperait tous les services de mobilité, comme BIXI, Communauto, le métro, le bus, le taxi et le covoiturage, mais qui permettrait de payer une seule fois par mois en fonction de son utilisation.

C’est le propre du principe du « Mobility as a service » (MaaS), qui intéresse plusieurs sociétés de transport à travers le monde actuellement. « Le projet pilote sera très utile pour en apprendre davantage sur les opportunités et le potentiel du covoiturage dans un chantier qui mènera à la création d’un guichet unique d’offre de services en mobilité durable dans la région métropolitaine et ailleurs au Québec », affirme le directeur général Benoit Gendron à ce sujet.

Une entreprise d’Ottawa derrière le projet

C’est l’entreprise RideShark, située à Ottawa, qui a été chargée de développer l’application mobile de covoiturage urbain dévoilée aujourd’hui par l’ARTM. Sur son site web, RideShark affirme que « 500 entreprises dans le monde utilisent efficacement » son application, déjà active, « pour encourager et soutenir les voyages durables pour les employés, les étudiants et le grand public ».