(Paris) Des dizaines de rues fermées en face d’écoles, un centre-ville interdit aux plus polluants, des autos bannies des berges : Valérie Plante a dit jeudi être inspirée par la trajectoire actuelle de Paris, mais refuse de s’engager à importer ses idées.

De passage dans la capitale française, la mairesse de Montréal a salué la façon dont Anne Hidalgo transforme sa ville depuis près d’une décennie, tout en temporisant.

« Ce que Mme Hidalgo a fait et continue de faire, ça s’inscrit en ligne directe avec notre vision », a dit Valérie Plante, dans la cour intérieure de l’hôtel de ville de Paris.

La fermeture à la circulation automobile de 180 rues parisiennes en bordure d’écoles, « je pense que c’est une bonne idée, mais loin de moi l’idée [de l’annoncer pour Montréal] à ce moment-ci sans avoir discuté avec nos partenaires [les écoles, les commerces, le milieu] ». « On est en train de l’évaluer », a-t-elle ajouté.

Quant au programme Crit’air, qui limite radicalement la circulation des véhicules les plus polluants à Paris ? « Clairement, c’est une pratique qui semble s’appliquer dans plusieurs pays, dont la Scandinavie. Est-ce que nous, ça va être exactement pareil ? Je ne peux pas vous le dire aujourd’hui », a-t-elle dit.

« J’aime beaucoup la réappropriation de la Seine, la circulation tout autour », a-t-elle continué, faisant référence à la fermeture aux voitures de plusieurs quais au bord de l’eau.

Je suis très attachée à l’idée qu’on est des insulaires. Mais on ne le sent pas tout le temps. Comment est-ce qu’on fait pour se réapproprier nos berges ? […] Il faut toujours aller plus loin et réfléchir à l’extérieur.

Valérie Plante, mairesse de Montréal

Mais Paris pourrait aussi s’inspirer de Montréal, a souligné Mme Plante. « Mme Hidalgo prépare les Champs-Élysées qu’elle veut rendre beaucoup plus accessibles aux cyclistes, et même y enlever des voies de circulation. Je lui disais justement que c’est ce qu’on a fait à Montréal avec la rue Saint-Denis », a-t-elle dit. La maire de Paris « devrait venir à Montréal bientôt, j’ai hâte de la lui présenter ».

« Je m’inspire beaucoup de l’énergie de Valérie », dit Hidalgo

Valérie Plante et Anne Hidalgo se rencontraient, jeudi, au quatrième jour de la tournée européenne de la mairesse de Montréal. Elle est déjà passée par Londres et Vienne.

PHOTO PHILIPPE TEISCEIRA-LESSARD, LA PRESSE

Valérie Plante et Anne Hidalgo, dans le bureau de cette dernière, jeudi

Les deux femmes partagent un même statut, ont-elles souligné : des élues féminines à la tête de grandes métropoles, qui font l’objet de critiques acerbes, mais ont été réélues avec une large avance.

Élue en 2014 puis en 2020, Anne Hidalgo incarne la transformation de Paris en fer de lance de l’écologie, au prix d’un endettement municipal important et de critiques virulentes de plusieurs automobilistes. Sa candidature à l’élection présidentielle française, en 2022, s’est conclue par un échec cuisant.

« Moi, je m’inspire beaucoup de l’énergie de Valérie », a dit Anne Hidalgo, jeudi, dans son grand bureau de l’hôtel de ville de Paris. « On partage beaucoup, on est deux femmes, de deux grandes villes, deux très belles villes. »

On a des politiques qui sont très similaires sur les notions de mobilité. On est très engagées toutes les deux sur les questions écologiques. On va continuer à s’inspirer et à s’épauler. Parce que les femmes, on n’est pas si nombreuses que ça et on a besoin de s’épauler.

Anne Hidalgo, maire de Paris

En point de presse par la suite, Valérie Plante a renchéri, affirmant qu’elles tenteront de soutenir aussi les autres femmes élues à la tête d’autres grandes villes. Parce que « oui, la pression est différente. Oui, les attaques peuvent être extrêmement virulentes et basées sur notre genre. Oui, c’est difficile », a lancé Mme Plante.

Vendredi, les deux femmes participeront d’ailleurs à une réunion de l’Association internationale des maires francophones (AIMF) sur le thème des discours haineux. « On peut faire des liens » avec la « virulence et les attaques personnelles envers les femmes sur les médias sociaux », a-t-elle dit, s’incluant dans les victimes de ce phénomène. « C’est vraiment très difficile. »

« Il y a peut-être 20 ans ou même 10 ans, les maires étaient moins attaqués, mais maintenant, on se positionne et on s’intéresse de plus en plus à des enjeux de société qui sont – dans le contexte actuel – très polarisants », a-t-elle ajouté.

Les deux élues ont aussi renouvelé l’entente de coopération qui unit Montréal et Paris. Celle-ci facilite les échanges entre fonctionnaires municipaux et a notamment contribué à la création de l’équipe mobile de médiation et d’intervention sociale (EMMIS) à Montréal, une unité de civils qui répond à certains appels d’urgence.