Le réaménagement d’une rue empruntée chaque jour par des milliers d’élèves et de cégépiens divise les élus de Longueuil et de Saint-Lambert. L’impasse pour améliorer la sécurité de la route pousse à bout la patience des parents alors que s’amorce au Québec la deuxième journée nationale pour mettre fin à l’insécurité routière sur le trajet scolaire.

« C’est une situation assez unique : sur un petit tronçon, on a un cégep, trois écoles secondaires et deux écoles primaires », signale David Bowles, directeur général du collège Charles-Lemoyne et ancien conseiller municipal à Saint-Lambert.

Au total, ce sont environ 7500 enfants, adolescents et jeunes adultes qui convergent chaque jour dans le secteur du chemin Tiffin, où 50 % de la chaussée est à Longueuil et l’autre 50 %, à Saint-Lambert.

« Une grande majorité utilise les transports scolaires et autres transports collectifs, mais il y a aussi pour toutes sortes de raisons des gens qui viennent en voiture », dit M. Bowles, lui-même père de quatre enfants qui fréquentent les établissements scolaires du secteur.

Depuis des années, des comportements dangereux récurrents de la part de personnes qui conduisent un véhicule motorisé sont déplorés par les comités de parents, notamment du stationnement dans la bande cyclable, des demi-tours, des arrêts obligatoires faits à la sauvette et le non-respect de la priorité des piétons aux intersections, ce qui décourage la pratique de la marche et du vélo chez les enfants qui fréquentent les écoles du secteur.

La solution proposée par les directions des écoles est d’implanter un sens unique sur une portion du chemin Tiffin, ce qui permettrait de rehausser la protection des piétons et de dégager l’espace sur la voie publique nécessaire pour implanter une piste cyclable unidirectionnelle séparée de la circulation automobile par des bacs à fleurs et des bollards.

L’automne dernier, les équipes d’experts de Longueuil et de Saint-Lambert ont recommandé aux élus des deux villes de mettre en place un réaménagement qui intègre un sens unique sur une petite partie du chemin Tiffin.

« Le trafic va déborder »

Les élus de Longueuil ont donné leur feu vert, mais ceux de Saint-Lambert ont jusqu’ici refusé ce scénario. Une consultation citoyenne sur le projet doit avoir lieu le 16 mars à Saint-Lambert.

Selon Pascale Mongrain, mairesse de Saint-Lambert, il est important de sécuriser ce tronçon, qui est surtout problématique à l’heure de pointe de l’après-midi.

Ça devient dangereux pour les piétons et les cyclistes parce qu’il y a trop de véhicules automobiles sur le chemin Tiffin. C’est tellement le chaos que c’est pare-chocs à pare-chocs.

Pascale Mongrain, mairesse de Saint-Lambert

Saint-Lambert craint que l’aménagement d’un sens unique fasse dévier la circulation automobile dans les rues résidentielles du quartier, faisant augmenter le bruit et le danger. « Les citoyens sont déjà alarmés. Ils nous disent : ‟le trafic va déborder dans nos petites rues tranquilles”. Ce sont des rues où les enfants jouent librement. »

Des interdictions de tourner à gauche sur le chemin Tiffin pourraient être installées, « mais il n’y a pas assez de surveillance policière, alors on n’y croit pas », dit Mme Mongrain, qui ajoute que des discussions sont en cours afin de trouver une solution acceptable par les deux villes qui pourrait être implantée avant le début de l’été.

M. Bowles a bon espoir qu’un réaménagement sera mis en place rapidement. « Qu’il y ait le sens unique ou non, nous, les directions d’école on va l’appuyer et on va tout faire pour encourager nos parents à privilégier les transports en commun et les transports actifs afin de réduire le nombre de voitures autour de l’école », dit-il.

Mobilisation panquébécoise ce mercredi

Par ailleurs, une mobilisation panquébécoise des parents des écoles de la province a lieu ce mercredi afin de demander à Québec de rehausser le financement d’aménagements sécuritaires pour les enfants autour des écoles.

Désormais présent dans une cinquantaine d’écoles au Québec, dont à Montréal, Longueuil, Brossard, Québec, Drummondville et Saint-Flavien, le mouvement Mettons fin à l’insécurité routière sur le trajet scolaire réclame une hausse des budgets consacrés à la sécurité routière, la concrétisation de la Politique de mobilité durable 2030 afin d’adopter une « vision zéro accident », de même que des modifications aux normes d’aménagement du « tout-à-l’auto » au profit des usagers de la route les plus vulnérables, signale Ariane De Blois, mère et l’une des porte-parole.

« À quelques jours du dépôt du budget provincial, on demande du financement qui est à la hauteur des dangers qui sont rencontrés chaque jour par nos enfants, dit-elle. La sécurité représente un faible pourcentage du budget actuel des dépenses liées à la route. »

La ministre des Transports, Geneviève Guilbault, ainsi que ses collègues de l’Assemblée nationale ont d’ailleurs été invités à s’arrêter aux écoles Anne-Hébert et Saint-Malo, à Québec, lorsqu’ils se dirigeront vers leur lieu de travail au parlement « pour constater l’insécurité routière dans les quartiers centraux causée par la circulation de transit », note le mouvement.

« Lors d’une journée de mobilisation, en janvier, aucun élu de la CAQ ne s’était déplacé dans une école, dit Mme De Blois. Alors on espère qu’ils vont pouvoir le faire cette fois-ci. »