Un refuge permanent pour les sans-abri autochtones, réclamé depuis longtemps dans le secteur Milton-Parc, n’est pas encore en voie de se concrétiser, malgré l’urgence de la situation, déplore l’ombudsman de Montréal.

« Le refuge [de Projets autochtones du Québec] PAQ2, qui est la clé de voûte et qui existe depuis janvier 2022, est crucial pour la communauté, mais son financement n’est pas assuré après le 31 mars 2023 », souligne l’ombudsman, Nadine Mailloux, qui se désolait mercredi qu’aucun lieu n’ait encore été identifié pour la mise en place de cette ressource permanente.

Bien que le financement de ce refuge relève de Québec et d’Ottawa, reconnaît MMailloux, la Ville peut agir comme « vecteur de changement et amener ses partenaires à sortir de l’inertie, que ce soit pour démarrer ou sécuriser une ressource d’hébergement ou un centre multiservice ou communautaire et culturel », dit-elle.

Mais le projet se heurte au manque de locaux dans le quartier visé, explique Heather Johnston, directrice de PAQ.

On cherche depuis des mois [un local], et on est très bien soutenus par la Ville, mais on cible un petit territoire et on a des besoins très spécifiques.

Heather Johnston, directrice de PAQ

Du côté de Québec, le cabinet du ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, indique que le financement « sera au rendez-vous » quand un lieu adéquat aura été trouvé.

« Crise humanitaire »

La sortie de l’ombudsman de Montréal fait suite au rapport qu’elle a publié le printemps dernier, intitulé Ne pas détourner le regard, au sujet de l’itinérance chez les membres des Premières Nations et les Inuits dans le quartier Milton-Parc. Elle y décrivait « une véritable crise humanitaire » et « une détresse humaine intolérable », qui provoquent notamment des problèmes de cohabitation avec les résidants du quartier.

Le rapport faisait cinq recommandations. MMailloux est satisfaite de voir que deux d’entre elles sont en voie d’être mises en place (souplesse dans la réglementation d’urbanisme et participation citoyenne) et qu’une autre est entièrement réalisée (financement des organismes à but non lucratif).

Mais il n’y a toujours rien de concret au chapitre de l’hébergement en itinérance et de la prévention, note-t-elle, après avoir pris connaissance de l’état d’avancement des actions de la Ville de Montréal.

Nadine Mailloux rappelle que 12 % des personnes itinérantes à Montréal sont autochtones, alors qu’ils ne représentent que 0,6 % de la population.

Le quart des sans-abri autochtones sont inuits, alors qu’ils ne constituent que 5 % de la population autochtone.

Prévention

Il est nécessaire pour ces personnes d’avoir accès à un refuge adapté à leurs besoins. De plus, l’ombudsman souligne qu’un centre communautaire et culturel pourrait permettre de faire de la prévention, pour éviter que des Inuits qui restent à Montréal, après avoir reçu des soins ou pour d’autres raisons, se retrouvent à la rue.

Le refuge temporaire PAQ2 occupe l’Hôtel des Arts, réquisitionné par la Ville de Montréal l’année dernière grâce à ses pouvoirs en vertu de l’état d’urgence. Situé près de l’intersection du boulevard Saint-Laurent et de la rue Ontario, c’est un refuge « à haut seuil de tolérance », c’est-à-dire que ses utilisateurs peuvent consommer de l’alcool et du cannabis sans être expulsés.

Le cabinet de la mairesse Valérie Plante souligne que le refuge temporaire semble répondre adéquatement aux besoins des personnes autochtones et inuites en situation d’itinérance, mais reconnaît qu’il faut une solution pérenne. « C’est ce sur quoi on travaille d’arrache-pied afin de mobiliser nos partenaires du réseau de la santé et du gouvernement pour rendre le tout possible », affirme l’attachée de presse Marikym Gaudreault.

À Québec, on assure que les ministres Lionel Carmant ainsi que Ian Lafrenière, responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuit, sont prêts à délier les cordons de la bourse pour financer un refuge permanent. « Notre vision de l’itinérance est d’avoir des refuges 24/7 financés 12 mois par année et c’est ce qui est visé pour le projet PAQ2. Cette semaine même, lors d’une rencontre avec Dominique Ollivier [présidente du comité exécutif de Montréal], le DCarmant a pu réitérer l’importance d’avoir une alternative pour loger l’organisme, » indique, dans une réponse écrite, le cabinet de M. Carmant.