Après deux ans de pause forcée, Les amis de la montagne ont renoué avec leurs traditionnelles corvées de nettoyage, une occasion pour eux de prendre le pouls d’un mont Royal touché par un fort achalandage pandémique.

Dimanche, 9 h, la clairière du parc Tiohtià:ke Otsira’kéhne, aussi connu sous le nom de sommet Outremont, grouille de monde. Environ une centaine de bénévoles venus prêter main-forte aux Amis de la montagne se font distribuer gants, pinces de préhension et seaux.

Cette année, en plus bien sûr de ramasser les déchets omniprésents dans le parc comme chaque printemps, on souhaite étudier certains phénomènes qui touchent la montagne, certains naturels, d’autres un peu moins.

« On observe : est-ce qu’il y a des éléments de vandalisme, des arbres endommagés, la présence de la spongieuse [insecte ravageur qui dévore le feuillage des arbres] », énumère la directrice générale des Amis de la montagne, Hélène Panaïoti.

L’organisme tente aussi d’étudier un autre phénomène inquiétant, soit l’état des sous-bois du mont Royal.

Si vous vous promenez dans le parc, vous allez voir qu’il n’y a rien en dessous des arbres, aucune relève. Les arbres sont magnifiques, la forêt a l’air en santé, mais un biologiste va vous dire : “Il n’y a rien qui se passe.”

Hélène Panaïoti, directrice générale des Amis de la montagne

Une fois récoltées toutes ces données, elles seront remises à la Ville de Montréal sous la forme d’un rapport et de recommandations dans l’espoir qu’elle agisse pour prévenir la dégradation du parc.

En cause, « l’équilibre entre la présence humaine et les besoins de la nature », dit Hélène Panaïoti. Durant la pandémie, « tout le monde est venu dans le parc, et toutes sortes de nouveaux sentiers sauvages ont été créés, les points d’entrée dans le parc se sont multipliés, et là, on veut vraiment le documenter », ajoute-t-elle.

Épidémie de « sentiers sauvages »

Loin d’être banale, la multiplication de ces « sentiers sauvages » peut entraîner une dégradation précoce de la montagne, souligne le conseiller scientifique pour Les amis de la montagne depuis plus de 30 ans, Éric Richard.

« C’est surtout dans les secteurs escarpés, dans les zones où la pente est un petit peu plus grande. Chaque fois que quelqu’un prend un raccourci, ça crée facilement de l’érosion, de nouveaux sentiers », explique-t-il.

Des conséquences à long terme sont à craindre, ajoute le conseiller, surtout dans un environnement comme le mont Royal, où le couvert forestier est parfois mince et le sol rocheux affleure.

On peut aider la végétation à repousser, mais plus un sol est piétiné, compacté, moins c’est propice à la régénération de la forêt. Ça va demander qu’on mette plus d’efforts pour décompacter, planter, alors que si le milieu était en bonne santé, il se régénérerait de lui-même.

Éric Richard, conseiller scientifique aux Amis de la montagne

Évidemment, tous les secteurs de la montagne ne sont pas autant touchés. Moins fréquenté, le parc Tiohtià:ke Otsira’kéhne s’en tirerait plutôt bien, alors que le parc du Mont-Royal et plus précisément les alentours du belvédère Camillien-Houde sont plutôt amochés.

En savoir plus
  • 23 %
    Augmentation du nombre de kilomètres de sentiers informels dans le parc du Mont-Royal de 2019 à 2020. Des 65 km de sentiers que compte le parc, 64 % seraient informels.
    Source : les Amis de la montagne
    750 hectares
    Superficie du site patrimonial du Mont-Royal, dont 423 hectares (ha) sont constitués d’espaces verts et de milieux naturels. Ce nombre comprend une quinzaine de parcs, dont trois au sommet de la montagne : le parc du Mont-Royal (200 ha), le parc Tiohtià:ke Otsira’kéhne (23 ha) et le bois Summit (23 ha).
    Source : les Amis de la montagne