La Ville de Montréal a déposé au gouvernement du Québec un avis de projet pour raccorder les deux tronçons du boulevard Cavendish, un chantier de près de 200 millions. Un projet attendu avec impatience dans l’ouest de l’île depuis un demi-siècle et redouté depuis aussi longtemps dans la municipalité de Côte-Saint-Luc.
Selon le document de 32 pages déposé par la Ville, le raccordement des tronçons nord et sud du boulevard Cavendish se fera en passant sous des voies ferrées du CN et du CP, qui ont toujours constitué le principal obstacle au parachèvement de cette artère, entre l’arrondissement montréalais de Saint-Laurent, au nord, et la municipalité de Côte-Saint-Luc, au sud, qui compte 35 000 habitants.
Le « concept de franchissement des voies ferroviaires » n’est pas définitif, mais comprend « plusieurs options à l’étude ». Dans tous les cas, ces options prévoient « un passage inférieur sous les voies, en raison des contraintes opérationnelles et de sécurité relatives à l’exploitation des gares de triage ferroviaires ».
En plus de rabouter les tronçons du boulevard, juste à l’ouest des limites de la municipalité de Mont-Royal, le projet de la Ville prévoit une connexion routière à l’avenue Royalmount qui permettra de désenclaver le secteur industriel de la municipalité. Ce secteur en aura doublement besoin avec la construction prochaine du mégaprojet immobilier Royalmount, à l’intersection des autoroutes 15 et 40.
L’autre élément majeur du projet est la construction d’une nouvelle rue suivant l’emprise privée actuelle de l’avenue Pacifique, qui borde les voies ferrées. Cette nouvelle rue reliera le boulevard Cavendish à la rue Paré ainsi qu’au site de l’ancien hippodrome de Montréal, qui est promis à un vaste projet résidentiel, dans l’arrondissement de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce.
Un boulevard, deux vocations
C’est toutefois le concept d’aménagement retenu pour le raccordement du boulevard lui-même qui mérite le plus d’attention. Il vise à réconcilier les vocations diamétralement différentes de deux tronçons routiers portant le même nom et qui ne sont séparés que par environ un kilomètre de distance, mais qui pourraient aussi bien coexister dans des univers parallèles.
Au nord, dans l’arrondissement de Saint-Laurent, le boulevard Cavendish dessert une large zone industrielle traversée par les autoroutes 40 et 520, où prédominent les magasins à grande surface, des commerces de gros et des entreprises. La fonction résidentielle y est complètement absente. Le boulevard à six voies de circulation – trois par direction – s’y présente comme une artère industrielle à grand débit, fortement utilisée par les camions et souvent congestionnée en périodes de pointe.
Au sud, c’est un autre monde. Le boulevard Cavendish traverse essentiellement des secteurs habités. Et pas qu’un peu. Ce sont des tours résidentielles qui s’élèvent de chaque côté du boulevard jusqu’à la hauteur du chemin Fleet, à Côte-Saint-Luc. Au-delà, la densité résidentielle diminue autour du boulevard, mais pas la vocation de cette artère, dont l’aménagement ressemble davantage à celui d’une collectrice locale que d’un boulevard urbain.
La Ville de Montréal a donc opté pour la construction d’un large boulevard urbain, avec une forte présence végétale, des trottoirs et pistes cyclables de chaque côté du boulevard, des voies de circulation réservées en tout temps aux transports collectifs et seulement deux voies de circulation prévues pour la circulation automobile (une voie par direction).
De plus, sur la portion sud du raccordement, les camions seraient formellement interdits, en concordance avec le règlement de Côte-Saint-Luc qui proscrit le camionnage de transit sur le boulevard Cavendish et où seules les livraisons locales sont permises. Les camions en provenance du secteur industriel seraient donc détournés par les nouvelles rues projetées en direction de Mont-Royal et de l’arrondissement de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce.
Légende urbaine
Il reste à voir si ces aménagements suffiront à vaincre les réticences légendaires de la population, et de la municipalité, de Côte-Saint-Luc, dont la tranquillité est en partie préservée grâce à son enclavement au nord et dont les résidants craignent une importante augmentation de la circulation automobile.
Le projet de raccorder les extrémités du boulevard Cavendish figurait au schéma d’aménagement de l’ex-Communauté urbaine de Montréal au début des années 1980, mais a fait l’objet de projets ou de concepts, jamais aboutis, dès les années 1960.
Au fil des années, au moins neuf variantes d’aménagement pour le projet ont été élaborées pour aboutir à un « scénario préférentiel de raccordement favorisant davantage le transport actif et collectif », selon l’avis publié par la Ville.
La publication de cet avis de projet lance officiellement la procédure d’évaluations environnementales du projet. Selon l’échéancier présenté, l’étude d’impact sera déposée en 2023. Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement mènera une consultation sur le projet à la fin de 2023 ou au début de 2024. La construction doit débuter seulement en 2027, et les travaux dureront au moins cinq ans.
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- 2032
- Année de mise en service du boulevard Cavendish raccordé, selon l’échéancier présenté par la Ville de Montréal
SOURCE : Avis de projet, Ville de Montréal -
- 30
- Nombre de jours durant lesquels les municipalités, organismes et citoyens peuvent faire part de leurs observations sur les enjeux que l’étude d’impact du projet devrait aborder, au plus tard le 15 avril 2022, au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques.
SOURCE : Avis public d’évaluation environnementale, MELCC