La Ville de Montréal veut faire fermer une vaste maison de chambres clandestine ayant abrité une résidence pour aînés évacuée en pleine pandémie de COVID-19, selon une procédure judiciaire.

L’ex-Manoir Bellerive, rue Notre-Dame Est, à Pointe-aux-Trembles, accueille depuis 15 mois une « clientèle difficile et hétéroclite » qui a forcé la police et le milieu communautaire à intervenir « des centaines » de fois, selon la Ville. Les voisins se plaignent de vacarme nocturne, de bagarres et de vagabondage.

Le grand bâtiment de 122 chambres, sur le bord du Saint-Laurent, abrite actuellement une soixantaine de résidants, selon la Ville, qui les décrit comme « vivant manifestement dans un état de détresse matérielle ou intellectuelle ».

Or, le zonage du bâtiment situé au 14 536, rue Notre-Dame Est permet exclusivement l’exploitation d’une résidence pour aînés.

Montréal demande donc à la Cour supérieure de déclarer que la maison de chambres est illégale.

Comme l’hiver arrive à grands pas, la procédure propose d’autoriser les résidants actuels à demeurer sur place, mais d’interdire toute nouvelle arrivée. À terme, la municipalité veut que la maison de chambres ferme complètement.

« Depuis le début de l’opération dérogatoire de cet immeuble, et en raison de la clientèle difficile qui le fréquente, le nombre de plaintes de nuisance provenant du voisinage a explosé », écrit l’avocat de la Ville dans sa requête. « Une cellule de crise a été mise en place. »

Résidence évacuée

Selon la Ville, la « clientèle [de la maison de chambres] semble référée par le CIUSSS [de l’Est-de-l’Île-de-Montréal] ». L’établissement est donc mis en cause dans le processus judiciaire.

C’est ce même CIUSSS qui avait forcé la fermeture et l’évacuation du bâtiment alors qu’il était exploité comme résidence pour aînés, sous le nom de Manoir Bellerive, l’an dernier. Avant 2020, la résidence avait été visée par au moins trois rapports faisant état de négligence et d’inquiétudes pour la sécurité des résidants. Les autorités de la santé avaient cessé d’y envoyer des aînés, mais une vingtaine de personnes habitaient toujours sur place en avril 2020.

Ce mois-là, 70 % du personnel avait subitement quitté les lieux après qu’un aîné eut été déclaré positif à la COVID-19. Le propriétaire avait appelé le CIUSSS à l’aide. « Il mentionnait qu’il n’était plus capable de donner des soins. Il avait peur pour la sécurité de la clientèle », relatait Claude Riendeau, directeur du soutien à l’autonomie des personnes âgées du CIUSSS, dans les pages de La Presse, le même mois.

L’édifice appartient à une société à numéro enregistrée au nom de Guoji Shan et Tong Li, qui l’exploitaient déjà comme résidence pour aînés. La Presse a tenté de les joindre jeudi après-midi. L’homme qui a répondu au téléphone sans se nommer a indiqué qu’un avocat allait réagir au nom de l’entreprise. Il n’a pas voulu préciser le nom de l’avocat. La Presse n’avait pas reçu de réaction au moment de publier ce texte.

Avec la collaboration de Vincent Larouche, de Gabrielle Duchaine et d’Ariane Lacoursière, La Presse