Première femme noire à diriger le comité exécutif de Montréal, Dominique Ollivier fera aussi bientôt partie de la première administration dirigée par deux femmes dans la métropole. Et celle qui a été élue aux côtés de nombreuses femmes noires promet déjà de s’attaquer à plusieurs chantiers.

« On avait rendez-vous avec l’histoire. On répète depuis des années qu’avoir des femmes à la tête d’entreprises et en politique, ça fait une différence. Là, je pense que ça va être notre chance de le prouver », a expliqué à La Presse la nouvelle conseillère du district du Vieux-Rosemont, qui sera la numéro deux de la mairesse Valérie Plante.

Native d’Haïti, elle sera la quatrième femme à occuper ce poste, et la première femme noire. « Avoir deux femmes à la tête de la Ville, je pense que ça ne peut faire autrement que de soutenir cette lancée d’une ville humaine, inclusive et verte », soutient la principale intéressée.

Partout au Québec, on a une nouvelle génération politique qui est encore plus concernée par l’avenir, par l’environnement, par les sociétés inclusives. À mon avis, ça va changer le paradigme.

Dominique Ollivier

Ex-présidente de l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM), la nouvelle présidente du comité exécutif aura rapidement du pain sur la planche, alors que l’adoption d’un budget de la Ville est imminente. « On va tenir notre promesse de ne pas augmenter les taxes à plus de 2 % la première année », assure Mme Ollivier, dont le parti s’est engagé à limiter les hausses au niveau de l’inflation par la suite.

« Ce que je veux tenir, plus globalement, c’est un vaste chantier pour repenser la fiscalité municipale, qui est beaucoup assise à l’heure actuelle sur la taxe foncière. Il faut trouver des modèles de diversification des revenus », soutient-elle.

Mme Ollivier compte aussi s’attaquer en priorité à l’atteinte de l’objectif de 60 000 logements abordables d’ici 2031, que Valérie Plante a promise en campagne. « On voit différents modèles émerger, mais il va falloir se servir du droit de préemption, des possibilités de rénovation, du registre des baux, etc., pour soutenir une métropole réellement abordable », insiste-t-elle encore.

Pour la femme de 57 ans, tout passera aussi par l’engagement des citoyens en politique municipale. Elle compte mettre en place plusieurs mécanismes de participation citoyenne, dont un budget participatif – qui serait de 60 millions d’ici 2025. « Reprendre une partie du contrôle et du pouvoir citoyen, surtout dans les quartiers plus défavorisés, c’est la clé », dit-elle, en ajoutant que l’intérêt de l’électorat sera accru « s’il peut donner son avis plus souvent qu’aux quatre ans ».

Au tour des femmes noires

IMAGE TIRÉE DE FACEBOOK

Onze femmes noires élues lors des élections municipales.

Dominique Ollivier a milité tout au long de la campagne pour une plus grande représentation de la diversité. À cet égard, les résultats du scrutin sont exceptionnels dans le Grand Montréal. Un montage de photos de 11 élues municipales noires a d’ailleurs suscité l’enthousiasme sur les réseaux sociaux lundi.

Parmi elles, la nouvelle mairesse de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce, Gracia Kasoki Katahwa, qui a finalement remporté le vote avec 177 voix d’avance sur l’ex-chef de l’opposition Lionel Perez, d’Ensemble Montréal. On y trouve aussi notamment Daphney Colin, Martine M. Muele, Ericka Alneus, Marie Sterlin et D-yana Bommier, toutes élues avec Projet Montréal, de même que Rolande Balma et Affine Lwalalika, du parti Coalition Longueuil.

Pour Dorothy Alexandre, qui a présidé le Conseil des Montréalaises de 2017 à 2020, « cette campagne représente un virage historique ».

« Je suis tellement émue ! », a-t-elle indiqué à La Presse lundi. « Je trouve ça extraordinaire. Pour moi, c’est ça, la masse critique. »

L’élection de la première Montréalaise noire remonte à moins de 30 ans, lorsque Kettly Beauregard est devenue conseillère, en 1994. Les élues noires de Montréal et des autres municipalités sont « des femmes qui ont fait leurs preuves dans leurs milieux respectifs depuis longtemps », fait valoir Mme Alexandre. « Elles étaient dans l’ombre et maintenant, elles rayonnent. »

Cette visibilité pourrait en inspirer d’autres, estime-t-elle. « Peut-être que des jeunes filles noires de 12 ou 13 ans vont se voir aujourd’hui et préparer le terrain pour être politiciennes. »

Pas de données précises

Le formulaire de candidature ne mentionnant pas l’appartenance ethnoculturelle, cet aspect ne fait pas partie des renseignements reçus par les présidents d’élection, indique-t-on au ministère des Affaires municipales.

Parmi les candidats qui ont répondu au formulaire volontaire d’Élections Montréal en 2021, 71 se sont identifiés comme minorité visible, une augmentation de 65 % par rapport à 2017 (43 candidats).

Mais seulement 82 % des candidats ont rempli le formulaire. Le tiers (34 %) des 340 candidats montréalais de 2021 appartenaient à une minorité visible, a déterminé l’Observatoire québécois de la diversité ethnoculturelle à l’aide d’informations publiques.

Ces deux organisations n’ont cependant pas mesuré la proportion de candidats noirs parmi ceux de minorités visibles.