Défait dans sa tentative de regagner la mairie de Montréal, Denis Coderre a déploré avoir vécu « la campagne électorale la plus sale » de sa carrière, mais n’a pas indiqué s’il avait l’intention de rester en politique comme chef de l’opposition à l’hôtel de ville.

« Je n’ai ni regrets ni remords, et j’ai l’impression d’être allé au bout de mes idées », a dit M. Coderre, prenant la parole vers 22 h 45 dimanche soir devant une quarantaine de partisans et de candidats de son parti.

Semblant encaisser difficilement ce revers, Denis Coderre avait la mine basse.

Sans préciser à quoi il attribuait son revers électoral, il s’est félicité d’avoir mené une « campagne d’idées », et a appelé tous les élus à « mettre la hargne de côté ».

« Je demande à tous les gens d’Ensemble Montréal qui se sont fait élire de jouer leur rôle au niveau de l’opposition. Il faut transcender les partis politiques et arrêter de continuellement pointer du doigt », a-t-il demandé, la voix parfois chancelante, sous le coup de l’émotion.

Comme il l’a répété tout au long de sa campagne, M. Coderre a réitéré que, selon lui, Montréal était sale, peu sécuritaire et avait besoin d’amour.

Après avoir donné l’accolade à plusieurs de ses candidats, Denis Coderre a quitté la salle sans répondre aux questions des journalistes qui tentaient de savoir s’il resterait à la tête de son parti, Ensemble Montréal, comme chef de l’opposition.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Lors d’un débat à l’antenne de Radio-Canada, il y a quelques jours, M. Coderre a laissé entendre qu’il « aimerait » rester comme chef de l’opposition en cas de défaite à la mairie de Montréal.

Sa colistière Chantal Rossi a été réélue dans Montréal-Nord. Cette conseillère pourrait donc lui céder son siège au conseil municipal, si M. Coderre le désire.

« Déception »

C’est sa deuxième défaite contre Valérie Plante. Le scénario de 2017 s’est répété : alors que Denis Coderre était considéré comme favori lorsqu’il a annoncé son retour dans la course, en mars dernier, ses appuis se sont graduellement effrités en cours de campagne.

La soirée a été morose pour les partisans d’Ensemble Montréal, par ailleurs peu nombreux à l’hôtel Plaza du centre-ville, où se tenait le rassemblement du parti.

De nombreux ténors du parti étaient d’ailleurs absents pendant le discours de leur chef.

Plusieurs des candidats-vedettes du parti ont aussi été défaits : Guillaume Lavoie dans Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension, Heidi Hollinger dans le Sud-Ouest, Karine Boivin-Roy dans Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, Antoine Richard, Nadine Gelly et Jean Airoldi dans Verdun.

Denis Coderre s’est fait attendre, tant et si bien qu’il a pris la parole après la mairesse réélue, Valérie Plante. Normalement, lors des soirées électorales, la tradition veut que le perdant prononce son discours avant le gagnant.

Nadine Gelly, qui devait être la numéro deux d’une éventuelle administration Coderre, avait les larmes aux yeux après avoir écouté son chef. « Ce que j’éprouve en ce moment, c’est de la déception, parce que pendant cette campagne, j’ai découvert une équipe et des gens exceptionnels », a-t-elle dit, émue.

Le conseiller sortant Francisco Miele, qui ne se représentait pas, agissait comme directeur de campagne de Denis Coderre. Il a dit respecter le choix des Montréalais, mais a lui aussi dénoncé le fait que le parti adverse ait, selon lui « cherché des bibittes dans les placards des candidats ». Tandis qu’Ensemble Montréal a mené une campagne « positive », a-t-il fait valoir.

Denis Coderre aura donc perdu son pari de « Retrouver Montréal », tel qu’il disait le souhaiter dans son livre, publié le printemps dernier.

Les engagements phares de Denis Coderre

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Ensemble Montréal compte notamment embaucher au moins 250 policiers et équiper tous les policiers de caméras portatives dans les 100 premiers jours de son mandat.

Embaucher au moins 250 policiers supplémentaires pour s’attaquer aux problèmes de sécurité dans les rues de Montréal. Ensemble Montréal estime que cet enjeu constitue actuellement la priorité et entend s’y attaquer avec force. Denis Coderre a précisé que ces nouvelles troupes seraient réparties équitablement partout dans l’île.

Assouplir la réglementation imposée aux promoteurs immobiliers afin de « doper l’offre » de logements neufs : Ensemble Montréal espère favoriser la construction de 50 000 nouveaux logements en quatre ans. Le parti propose de revenir aux anciennes règles – qui prévoient que chaque projet domiciliaire doit inclure 15 % de logement social et 15 % de logement abordable, à moins que le promoteur ne paie une compensation.

Limiter la hausse des taxes foncières résidentielles au taux d’inflation ou à 2 %, selon la donnée la plus basse. Ensemble Montréal veut élargir l’assiette fiscale de la Ville de Montréal en imposant une taxe sur l’insalubrité et une taxe sur les stationnements commerciaux qui ne répondent pas à certains critères écologiques.

Équiper rapidement tous les policiers de Montréal de caméras portatives. Denis Coderre a promis de lancer l’appel d’offres pour acquérir l’équipement nécessaire dans les 100 premiers jours de son mandat. À son avis, la présence d’une caméra rassurera à la fois les agents et les citoyens dans leurs interactions.

Organiser un sommet sur le camionnage avec l’objectif de diminuer la présence des poids lourds au cœur de Montréal pendant la journée et de les rendre plus sûrs. M. Coderre a notamment évoqué l’idée de limiter les livraisons à certains créneaux horaires afin de soulager les artères le reste de la journée. En outre, il voudrait que les camions soient équipés de caméras 360 degrés afin de réduire les risques d’accident.

Biographie de Denis Coderre

Denis Coderre en quelques dates

1963

Denis Coderre naît à Joliette. Dix ans plus tard, sa famille et lui déménagent à Montréal. Il fait un baccalauréat en science politique à l’Université de Montréal et une maîtrise en administration des affaires à l’Université d’Ottawa.

1997

Après de nombreuses tentatives, Denis Coderre est élu député libéral dans la circonscription fédérale de Bourassa, à Montréal. Durant les 16 ans qu’il occupe ce poste, il est nommé secrétaire d’État au sport, président du Conseil privé et ministre de l’Immigration.

2002

Des doutes sont soulevés quant à l’intégrité de Denis Coderre, puisqu’il a été hébergé gratuitement en 1997 dans le condo du publicitaire Claude Boulay, président du Groupe Everest. Affirmant que M. Boulay est un ami de longue date, le député nie tout lien entre ce séjour et le fait que le Groupe Everest a obtenu un plus grand nombre de contrats de commandite et de publicité durant l’année ayant suivi son arrivée au Cabinet. Deux ans plus tard, M. Coderre témoigne devant la commission Gomery sur le scandale des commandites, d’où il ressort sans blâme. Il est toutefois évincé du Conseil des ministres à la suite de ces révélations.

23 mai 2013

Denis Coderre, qui est toujours député libéral fédéral, se lance en politique municipale avec la création officielle de la formation Équipe Denis Coderre pour Montréal.

3 novembre 2013

Il est élu maire de Montréal avec un peu plus de 31 % des voix, alors que ses adversaires, Mélanie Joly et Richard Bergeron, obtiennent respectivement 26,5 % et 26 % des voix.

5 novembre 2017

Dans son discours où il reconnaît la victoire de Valérie Plante, M. Coderre annonce qu’il quitte la politique municipale.

28 mars 2021

Denis Coderre annonce son retour en politique pour les élections municipales de novembre 2021, à l’émission Tout le monde en parle. Il se présente au poste de maire avec son ancien parti, rebaptisé Ensemble Montréal à la suite de sa défaite de 2017.

Avec Florence Morin-Martel, La Presse