La Ville de Montréal a finalement accepté de payer pour une partie des dommages causés à des bâtiments accidentellement incendiés par sa faute en 2015. La métropole vient de conclure une entente à l’amiable avec l’assureur de quatre immeubles et prévoit régler sous peu au moins sept autres dossiers similaires.

L’hiver avait été particulièrement rigoureux dans le sud du Québec en 2015. Le froid avait été tel que le sol avait gelé plus profondément qu’à l’habitude, au point où les conduites d’eau de milliers d’immeubles à Montréal avaient gelé.

Pour rétablir l’alimentation en eau des résidants, la métropole avait effectué pas moins de 2600 opérations de dégel au cours de l’hiver, misant principalement sur une technique risquée, l’induction électrique. Il s’agit de faire passer du courant dans la canalisation afin de faire fondre le bouchon de glace qui s’est formé.

Voilà, « cette méthode peut mener à des incendies si elle est mal réalisée », reconnaît aujourd’hui la Ville. En effet, un « courant de fuite » peut survenir et affecter des immeubles voisins, y provoquant des brasiers.

Une quinzaine de poursuites

La métropole a d’ailleurs été poursuivie par les assureurs d’une quinzaine de propriétaires ayant subi des dommages à la suite de telles opérations à l’hiver 2015. Ceux-ci réclamaient pour près de 3 millions en dédommagement.

Après des années de démarches devant les tribunaux, la Ville vient tout juste d’accepter un premier règlement à l’amiable avec Intact Assurance, à qui elle versera 300 000 $. L’assureur représentait les occupants de quatre bâtiments voisins incendiés le 5 mars 2015 dans une portion de la Plaza St-Hubert.

Peu après une opération de dégel électrique dans un immeuble, des flammes avaient pris naissance dans une boutique de robes de mariage qui se trouvait chez le deuxième voisin.

Le bâtiment avait été lourdement endommagé dans le brasier, ainsi que trois autres immeubles voisins.

Tant l’enquête du Service de sécurité incendie de Montréal, menée à la suite du sinistre, que les rapports d’expertises commandés par la Ville pour tenter de se défendre sont clairs : « L’incendie est la conséquence de l’opération de dégel qui avait lieu dans un immeuble du secteur », reconnaît désormais la métropole.

Sous-traitant en faillite

Montréal a tenté de rejeter le blâme sur le sous-traitant qu’elle avait embauché pour réaliser les travaux, mais plusieurs éléments la poussent maintenant à payer pour une partie des dommages. D’abord, un employé de l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie était présent lors de l’opération du 5 mars 2015, engageant la responsabilité de la Ville.

Ensuite, l’entreprise ayant mené l’opération pour le compte de la métropole est en processus de faillite. Son assureur, Promutuel Portneuf-Champlain, a demandé la résiliation de son contrat, arguant que sa couverture n’incluait pas les travaux de dégel électrique.

Enfin, Montréal note que l’entrepreneur qu’elle avait embauché est un « témoin hostile ». Ce dernier rejette tout blâme et accuse la Ville d’être responsable des lacunes qui ont mené à l’incendie.

Intact Assurance réclamait 1,2 million à l’origine, mais la Ville est parvenue à une entente afin de lui verser 300 000 $. La métropole a fait valoir que le principal bâtiment incendié présentait des problèmes électriques qui ont contribué au brasier. Promutuel versera pour sa part 50 000 $ pour faciliter le règlement à l’amiable.

Ce règlement ouvre la porte à des ententes avec d’autres plaignants. Sept autres dossiers judiciaires, pour une valeur totale de 754 000 $, avaient en effet été suspendus en attendant la conclusion du cas d’Intact Assurance. La métropole dit envisager des règlements à l’amiable avec ces plaignants.

Procédure révisée

Montréal utilise toujours la technique de dégel des conduites par induction électrique. La métropole dit toutefois avoir révisé la procédure pour réaliser ces opérations depuis l’hiver 2015 afin d’éviter de nouveaux incidents. Les pratiques ont ainsi été uniformisées entre les 19 arrondissements, responsables de ce type de travaux.

« Dorénavant, la présence d’un plombier et d’un électricien certifié est requise lors des opérations », explique Marie-Ève Courchesne, porte-parole de la Ville.

La métropole rapporte n’avoir enregistré aucun incident depuis la révision de ses pratiques de dégel des conduites.