Détecter les mammifères marins en temps réel pour éviter des collisions avec les navires et de faciliter la cohabitation avec l’industrie de la pêche : c’est ce que souhaite Pêches et Océans Canada en octroyant 855 000 $ à l’entreprise montréalaise Whale Seeker.

Fondée en 2018, Whale Seeker a développé Möbius, un outil d’intelligence artificielle (IA) permettant de détecter la présence de mammifères marins à l’aide d’images aériennes. Cette technologie, qui permet détecter les mammifères marins 25 fois plus rapidement que l’œil humain, est déjà utilisée par Pêches et Océans Canada et Transports Canada, mais l’analyse des données nécessite un délai de quelques heures.

Avec ce financement qui lui est octroyé, Whale Seeker travaillera avec Edgewise International, une société d’experts-conseils en environnement marin de Terre-Neuve, pour fournir aux instances gouvernementales des données d’observation en temps réel au moyen d’images de drones.

Une collaboration qui, selon la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, Diane Lebouthillier, « révolutionnera les pratiques de surveillance des océans ».

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Emily Charry Tissier, PDG de Whale Seeker

« Avec notre solution en temps réel, il n’y aura plus d’à peu près. Les mammifères marins seront détectés plus rapidement et mieux protégés », a déclaré la biologiste et PDG de Whale Seeker, Emily Charry Tissier, lors d’une conférence de presse tenue dans les bureaux de l’entreprise, mercredi.

Il faudra compter environ deux ans avant que la technologie soit déployée, d’abord au sud de Terre-Neuve, puis dans huit autres zones prioritaires identifiées par le Fonds de la nature du Canada pour les espèces aquatiques en péril, notamment l’Arctique, les Basses-Terres du Saint-Laurent et les rivières du sud du golfe du Saint-Laurent.

Le projet débutera avec l’observation des baleines, particulièrement la baleine noire de l’Atlantique Nord, une espèce en voie de disparition, mais s’étendra ensuite à l’ensemble des mammifères marins.

Une meilleure prévisibilité

Les mesures mises en place par Ottawa pour protéger la baleine noire de l’Atlantique Nord ont parfois créé du mécontentement chez les pêcheurs, notamment la semaine dernière alors que la pêche aux homards a été suspendue dans une zone située au nord-est du Nouveau-Brunswick.

Lors de la conférence de presse, la ministre Diane Lebouthillier a souligné que la présence de baleines noires de l’Atlantique Nord dans les zones de pêche est une « source de stress » pour plusieurs pêcheurs. Selon elle, leur détection en temps réel permettra « d’offrir le degré de prévisibilité supplémentaire dont nos pêcheurs ont besoin afin de mener à bien leurs saisons de pêche. »

« Les baleines ne sont pas un problème, a-t-elle ajouté. C’est un défi et on doit trouver une solution pour aider les espèces en péril. »

La ministre a aussi insisté sur l’importance pour le Canada de conserver sa certification de pêche durable.

Whale Seeker, qui a été nommée par le Centre international de recherche sur l’intelligence artificielle de l’Organisation des Nations unies de l’UNESCO (IRCAI) comme l’un des 10 meilleurs projets d’IA au monde en matière de développement durable, souhaite que sa technologie devienne un standard international.

« La transparence, l’éthique, la responsabilité a toujours fait partie de nos affaires », a indiqué Emily Charry Tissier. Afin d’utiliser l’IA de façon responsable, l’entreprise dit s’assurer, par exemple, que ses données n’aident pas ceux qui veulent chasser les baleines.

En savoir plus
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    Population estimée de baleines noires de l’Atlantique Nord, en nombre d’individus, en 2022.
    North Atlantic Right Whale Consortium