Dix terrains de football par minute
Les forêts tropicales primaires ont perdu 3,7 millions d’hectares en 2023, en baisse de 9 % par rapport à l’année précédente. Malgré une déforestation moins importante par rapport à 2022, cela représente néanmoins l’équivalent de la disparition de 10 terrains de football par minute, signale le plus récent rapport du World Resources Institute préparé par des chercheurs de l’Université du Maryland. Cette perte a entraîné des émissions de 2,4 milliards de tonnes de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère, soit presque la moitié des émissions annuelles des États-Unis, estiment les chercheurs. Signalons que 96 % de la déforestation à l’échelle mondiale survient dans les forêts tropicales.
Le cas du Canada
À l’échelle planétaire, la déforestation est souvent attribuable à la transformation de forêts en zones agricoles, comme c’est le cas au Brésil, par exemple. Mais bon an, mal an, des incendies en forêt boréale plombent le bilan mondial. En 2023, le Canada a perdu 8,6 millions d’hectares de forêt, dont plus de 90 % en raison d’une saison des incendies record, souligne le World Resources Institute. Des chiffres qu’il faut cependant prendre avec un grain de sel, puisque des pertes à la suite d’un incendie de forêt ne sont pas nécessairement permanentes, comme le fait remarquer Yan Boulanger, chercheur en écologie forestière à Ressources naturelles Canada.
Le Brésil s’améliore
Le Brésil, habitué de ce triste palmarès, a fait meilleure figure en 2023. La déforestation y a reculé de 36 % en un an, une période coïncidant avec le retour au pouvoir de Luiz Inácio Lula da Silva. Le président Lula a en effet annulé les politiques de son prédécesseur, Jair Bolsonaro, favorables au déboisement. De rares bonnes nouvelles alors que la forêt amazonienne pourrait franchir « un point de rupture » d’ici 2050, selon une étude parue dans la revue Nature en février dernier. Des épisodes de sécheresse, des incendies et la déforestation pourraient entraîner des perturbations permanentes pour la moitié de la forêt amazonienne, ont estimé des chercheurs brésiliens.
De petites hausses qui s’additionnent
Si le Brésil et la Colombie ont pu observer un recul de la déforestation à l’intérieur de leurs frontières, plusieurs pays ont connu des hausses importantes, dont la Bolivie (+27 %) et le Laos (+47 %). L’une des régions les plus préoccupantes demeure la République démocratique du Congo, rappellent les chercheurs de l’Université du Maryland. La déforestation n’a augmenté que de 3 % en 2023, mais les « petites augmentations, régulières depuis plusieurs années, s’ajoutent les unes aux autres » dans une région qui abrite « la dernière grande forêt tropicale qui est toujours un puits de carbone », note-t-on.
Des promesses non tenues ?
En 2021, 145 pays se sont engagés lors de la COP26, à Glasgow en Écosse, à mettre fin à la déforestation d’ici 2030. Une promesse qui risque de ne pas se concrétiser, précise le World Resources Institute (WRI). « Le monde a fait deux pas en avant et deux pas en arrière en ce qui concerne la perte de forêts l’année dernière, a rappelé Mikaela Weisse, directrice de l’Observatoire mondial des forêts au WRI. Les fortes baisses enregistrées en Amazonie brésilienne et en Colombie montrent que des progrès sont possibles, mais l’augmentation de la perte de forêts dans d’autres régions a largement contrecarré ces progrès. Nous devons tirer des enseignements des pays qui parviennent à ralentir la déforestation. »