(Québec) Le gobie à nez tubulaire, une espèce de poisson envahissante, a été découvert dans le lac Saint-François. C’est la première fois qu’on observe ce poisson au Québec, a confirmé lundi le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP). Pour le moment, il est difficile de prévoir ses impacts, estiment les experts.

« On la voyait arriver, précise Olivier Morissette, professeur d’écologie des poissons à l’Université du Québec à Chicoutimi. Ce n’était qu’une question de temps, et elle est maintenant arrivée sur le territoire québécois. »

L’annonce du Ministère n’a donc pas surpris M. Morissette, qui s’intéresse particulièrement aux espèces aquatiques envahissantes. Mais le chercheur appelle tout de même à la vigilance. « Elle est là, et elle est nouvelle. Il faut la surveiller. Surtout que chaque nouvelle espèce envahissante ajoute de la pression sur un milieu. »

Traversée de l’Atlantique

Le gobie à nez tubulaire est un petit poisson qui est originaire de la région de la mer Noire, entre la Roumanie et la Bulgarie. Dans les années 1990, il a atteint le secteur des Grands Lacs par bateau, tout comme son cousin le gobie à taches noires.

La différence, c’est que le gobie à taches noires s’est rapidement établi et répandu dans le fleuve Saint-Laurent, perturbant les écosystèmes aquatiques depuis plus de 20 ans.

Qu’est-ce qui explique que le gobie à nez tubulaire a connu une expansion beaucoup plus lente que son cousin ? « À l’heure actuelle, il n’y a pas d’explication claire qui permettrait d’élucider ce décalage », estime Annick Drouin, biologiste et chef de la division des espèces aquatiques envahissantes au MELCCFP.

Pour le moment, il est difficile de prévoir si le gobie à nez tubulaire va proliférer lentement ou rapidement, et même d’évaluer ses impacts. Mais selon Annick Drouin, on peut tout de même s’attendre à ce qu’il entre en compétition avec d’autres espèces de poissons indigènes. « Une attention particulière sera portée à ses impacts sur les espèces menacées, comme le dard de sable et le fouille-roche gris. »

Une progression vers l’est

Le River Institute suit la progression du gobie à nez tubulaire dans la portion ontarienne du fleuve Saint-Laurent depuis 2015. « Depuis 2018, on observe que sa densité augmente, note Cristina Charette, chercheuse au River Institute. Mais son abondance demeure tout de même faible, surtout comparativement aux autres espèces de poissons, comme le gobie à taches noires. »

Pour Cristina Charette, l’important est de suivre cette espèce de près. « Il y a plusieurs scénarios possibles. Ses impacts dans les Grands Lacs peuvent être totalement différents de ceux que l’on pourrait observer dans le fleuve Saint-Laurent, parce que ce sont deux milieux distincts au niveau de l’hydrologie et des habitats pour les poissons. »

Annick Drouin assure que le MELCCFP surveillera le gobie à nez tubulaire de manière annuelle.

Parallèlement, le Ministère sollicite la collaboration de la population dans le but de mieux suivre sa progression. « Si les gens pensent voir un gobie à nez tubulaire, il faut qu’ils le prennent en photo et envoient leur photo au Ministère », précise Annick Drouin. Il est important de remettre le poisson à l’eau par la suite.

Autres espèces envahissantes à suivre

La moule zébrée

La moule zébrée est présente au Québec depuis presque 30 ans. De la taille d’un ongle, elle est originaire de la région ponto-caspienne, qui s’étend de la mer Caspienne à la mer Noire.

La renouée du Japon

La renouée du Japon est une plante exotique envahissante qui est originaire de l’Asie de l’Est. Elle a été introduite au Québec en 1901.

La tanche

La tanche est un poisson originaire d’Eurasie. Elle a été introduite de manière accidentelle dans la rivière Richelieu en 1991.

La carpe de roseau

La carpe de roseau est un poisson originaire d’Asie. Elle a été importée aux États-Unis en 1963, à des fins d’aquaculture.

Le gobie à taches noires

Le gobie à taches noires a été introduit par bateau, dans les Grands Lacs, dans les années 1990.