Réagissant à la fermeture partielle de la plus grande décharge du Québec, le Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets (FCQGED) dénonce ce qu’il considère comme un stratagème pour obtenir un rehaussement des quantités autorisées de matières à enfouir.

« C’est une crise montée de toute pièce pour forcer le gouvernement à endosser l’agenda et les demandes de ces compagnies », a dit Denis Blaquière, président du FCQGED, cité dans un communiqué publié jeudi.

« Ce qu’elles y gagnent, c’est qu’elles vont avoir plus de tonnage, donc plus d’argent éventuellement », renchérit Karel Ménard, porte-parole du Front commun, dans un entretien avec La Presse. « Pour moi, c’est une pression indue qui est mise sur le gouvernement pour qu’il accède aux demandes des compagnies. »

Le FCQGED, composé d’une soixantaine d’organisations environnementales dont Équiterre, la Fondation David Suzuki, Greenpeace et des organismes locaux, rappelle qu’une grande partie des matières éliminées au Québec pourraient être traitées ailleurs que dans un site d’enfouissement.

Une étude de caractérisation de Recyc-Québec montre qu’en 2019-2020, plus de 55 % des matières éliminées étaient composées de papier, carton, verre, métal, plastique ou de matières organiques, et auraient donc pu être recyclées ou compostées.

« Le [Conseil des entreprises en technologies environnementales du Québec (CETEQ)] a consulté ses membres qui opèrent des lieux d’enfouissement technique (LET) dans la grande région de Montréal et le constat est unanime, ils sont à pleine capacité ou le seront sous peu », soutient le Conseil en réponse au communiqué du FCQGED.

« Nous devons fournir un effort collectif pour réaliser un meilleur tri à la source », ajoute le CETEQ, d’accord sur ce point avec le Front commun.

Quoi qu’il en soit, le Complexe Enviro Connexions (CEC) fermera ses portes à certains clients à partir du 27 juin afin d’éviter de dépasser sa limite de tonnage annuel autorisée par Québec.

Plus de matière vers l’enfouissement

CEC a demandé l’autorisation de recevoir 100 000 tonnes de déchets de plus d’ici la fin du mois de juillet, pour un total de 1 355 000 tonnes cette année. Selon des documents obtenus par La Presse, cette demande a été faite le 4 février, mais le ministère de l’Environnement soutient qu’elle a plutôt été déposée le 1er juin.

Invité à réagir, le ministre de l’Environnement du Québec, Benoit Charette, dit être « bien au fait de l’enjeu qui touche les sites d’enfouissement ». Une situation attribuable, selon lui, aux gouvernements précédents.

« Rien n’a été fait pour diminuer la quantité de matière qui s’en va à l’enfouissement » par les prédécesseurs du gouvernement actuel, affirme-t-il dans une déclaration écrite, ajoutant avoir amorcé « un sérieux virage pour diminuer la quantité de matière qui s’en va à l’enfouissement ».

Dans son rapport publié en janvier dernier sur la gestion des déchets au Québec, le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement notait – sur la base de données de 2019 – que « les quantités de matières résiduelles éliminées sur l’ensemble du territoire québécois ont augmenté au cours des dernières années ». Une situation qui s’est depuis stabilisée, selon le Ministère.

100 000

Nombre de tonnes de déchêts additionelles que CEC a demandé l'autorisation de recevoir d'ici la fin du mois de juillet