Si les nations respectent tous leurs engagements pour combattre les changements climatiques, la planète peut encore atteindre une des deux cibles internationales pour limiter l’impact du réchauffement, conclut une nouvelle étude.

Toutefois, la planète semble destinée à dépasser allègrement l’autre cible ― celle qui, selon les chercheurs, protégerait le plus la Terre.

Le monde semble en voie de limiter à 2 degrés Celsius, ou à quelques poussières de moins, le réchauffement planétaire par rapport à l’époque préindustrielle, une cible qui semblait auparavant hors de portée, selon une étude publiée mercredi par le prestigieux journal scientifique Nature.

Cela se produira non seulement si les pays respectent tous leurs engagements de réduction des émissions polluantes d’ici 2030, mais aussi s’ils respectent une promesse plus distante de neutralité carbonique d’ici le milieu du siècle, dit l’étude.

Un monde plus chaud de 2 degrés sera quand même radicalement différent de celui que nous connaissons, préviennent les experts qui mettent en garde contre des tempêtes plus violentes, des océans plus élevés, des extinctions de plantes et d’animaux, la disparition des coraux, la fonte de la glace et davantage de décès causés par le smog, la chaleur et les maladies infectieuses.

Les leaders de la planète préféreraient grandement un réchauffement limité à 1,5 degré Celsius par rapport à l’ère préindustrielle. Mais le monde ratera complètement cette cible (plus connue et plus publicisée) sans l’annonce et l’atteinte de nouvelles réductions des émissions dès cette décennie, et probablement d’ici trois ans, disent les auteurs de l’étude.

Les cibles de 1,5 degré et de 2 degrés font partie de l’Accord de Paris conclu en 2015 et du subséquent Accord de Glasgow signé en 2021.

« Pour la première fois, nous pouvons possiblement limiter le réchauffement sous la barre symbolique des 2 degrés avec les promesses sur la table. Mais cela suppose évidemment que les pays tiennent parole », a dit l’auteur principal de l’étude, le climatologue Malte Meinshausen de l’Université de Melbourne.

C’est un gros « si », ont dit les auteurs et d’autres climatologues, qui implique que les leaders politiques livreront la marchandise.

L’étude « examine seulement ce scénario optimiste. Elle ne vérifie pas si les gouvernements y vont d’efforts pour mettre en œuvre leurs cibles à long terme et s’ils sont crédibles », a dit Niklas Hohne, un scientifique allemand qui analyse les engagements gouvernementaux pour le New Climate Institute. Nous savons que les gouvernements sont loin de mettre en œuvre leurs cibles à long terme. »

L’équipe de M. Hohne et d’autres experts qui s’intéressent aux engagements officiels ont eux aussi constaté qu’il est possible de limiter le réchauffement à 2 degrés, tout comme l’équipe de M. Meinshausen. La différence est que l’étude de ce dernier est la première à être revue par les pairs et publiée dans un journal scientifique.

Oui, une planète réchauffée de 2 degrés exige que les pays tiennent parole. Mais des énergies solaire et éolienne de plus en plus abordables ont montré que les réductions d’émissions polluantes peuvent survenir plus rapidement que prévu, et certains pays sont en voie d’excéder les réductions promises, a dit M. Meinshausen.

Il a aussi rappelé qu’il n’est pas déraisonnable de supposer que les pays vont tenir parole, puisque les promesses précèdent toujours les gestes concrets dans ce domaine.

Mais à la base, limiter le réchauffement planétaire à 2 degrés représente une amélioration marquée par rapport à il y a cinq ou dix ans, quand « tout le monde riait comme, “ha, on ne verra jamais sur la table des cibles qui vont nous rapprocher de 2 degrés”, a dit M. Meinshausen. Des cibles et des politiques qui se concrétisent peuvent avoir un impact sur les températures futures. Je pense que l’optimisme est important. Oui, il y a de l’espoir. »

Entre 20 % et 30 % de cet espoir est attribuable à l’Accord de Paris. Le reste découle d’investissements précédents par les pays qui ont rendu les technologies vertes plus abordables que les combustibles fossiles polluants comme le charbon, le gaz naturel et le pétrole, a ajouté M. Meinshausen.

Mais même si les nouvelles sont bonnes, elles ne sont pas que bonnes, a-t-il précisé.

« Nous n’avons pas de marge d’erreur (pour tout juste limiter le réchauffement à 2 degrés) et nous n’avons pas les engagements pour nous rapprocher de 1,5 degré », a souligné M. Meinshausen.

Une étude réalisée par des experts des Nations unies en 2018 a constaté une différence marquée entre 1,5 degré et 2 degrés, avec des dommages considérablement plus importants et répandus à 2 degrés de réchauffement.

La planète s’est déjà réchauffée de 1,1 degré par rapport à l’époque préindustrielle, soit la fin des années 1800, donc un réchauffement de 2 degrés implique une hausse de 0,9 degré par rapport à aujourd’hui.

L’analyse de M. Meinshausen « est bonne et semble solide, mais il y a toujours des suppositions qui pourraient être importantes », a dit le climatologue Glen Peters, du Global Carbon Project.

La plus grande supposition est que les pays atteindront la neutralité carbonique promise, pour la plupart d’ici 2050, mais dix ou vingt ans plus tard pour la Chine et l’Inde, a-t-il dit.

« Prendre des engagements pour 2050 est facile, les appuyer avec des interventions à court terme est difficile », a ajouté M. Peters avant de souligner que, dans la plupart des pays, cinq ou six élections surviendront d’ici à ce moment.