La flambée des prix de l’énergie touche tous les pays, qui cherchent des moyens d’en atténuer les effets sur leur population. L’Allemagne a notamment réduit le tarif des transports en commun pour que les citoyens laissent leur voiture à la maison.

Une aubaine à neuf euros

« Prendre le bus et le train n’aura probablement jamais été aussi bon marché en Allemagne. » Codirigeante du parti des Verts, Ricarda Lang n’était pas peu fière jeudi de dévoiler cette mesure adoptée par le gouvernement de coalition au pouvoir en Allemagne. Pour les 90 prochains jours, les Allemands n’auront qu’à débourser 9 euros (12 $) par mois pour utiliser les transports en commun. La mesure vise à encourager les usagers à laisser leur voiture à la maison, et ainsi atténuer les effets de la flambée des coûts de l’essence. « Neuf euros, c’est très, très abordable », lance à La Presse Anne Gläser, de l’organisme écologiste allemand Germanwatch. « Le tarif ordinaire est autour de 90 euros [124 $]. Mais nous souhaiterions que le tarif ordinaire soit réduit de moitié, de façon permanente. »

Vert foncé, vert pâle

L’organisme Germanwatch, tout comme de nombreux observateurs, a favorablement accueilli cette réduction des tarifs des transports en commun. « Pour qu’une réelle transformation de la mobilité devienne réalité, nous avons impérativement besoin de changer nos façons de nous déplacer, y compris un passage du transport individuel motorisé au transport en commun. De notre point de vue, le transport en commun abordable est une priorité pour atteindre nos cibles climatiques », dit Anne Gläser. Le financement reste un enjeu crucial en Allemagne, particulièrement sur le plan local. « Les petites communautés tendent à avoir très peu de ressources financières disponibles », dit Mme Gläser. Des observateurs ont néanmoins noté que d’autres mesures adoptées par le gouvernement allemand vont dans le sens contraire de la lutte contre les changements climatiques, notamment la réduction de la taxe énergétique sur les carburants. Celle-ci sera également réduite de 0,30 euro le litre (0,40 $) pendant trois mois, atteignant ainsi le « niveau minimum européen ».

Pas que le prix

« Réduire les tarifs pour les transports en commun peut être une mesure d’incitation importante pour que les gens passent de la voiture au train, et tout en participant à une justice sociale, rappelle Anne Gläser. Cependant, les études montrent que la réduction des tarifs n’est pas suffisante, à elle seule, pour convaincre les gens d’utiliser les transports en commun. La rapidité, la fréquence, mais aussi le confort, sont également des facteurs importants. Donc, les gouvernements doivent aussi investir pour offrir de “bons” transports en commun, pas seulement des transports bon marché. » Sarah V. Doyon, directrice générale de l’organisme Trajectoire Québec, partage les mêmes observations. « Toutes les mesures qui permettent d’encourager l’utilisation des transports collectifs sont les bienvenues », dit-elle, rappelant que durant la pandémie, des sociétés de transport avaient offert des services gratuits pendant l’été. « Par contre, la réduction des tarifs doit être une mesure temporaire. Dans la situation actuelle du financement des transports collectifs, et la perte des revenus d’achalandage depuis le début de la pandémie, ce n’est pas une mesure qu’on pourrait maintenir très longtemps. »

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Sarah V. Doyon, directrice générale de l’organisme Trajectoire Québec

Des réductions mieux ciblées

Selon Sarah V. Doyon, une réduction temporaire des tarifs des transports collectifs, comme l’Allemagne a choisi de le faire, aurait été un « message intéressant » que le gouvernement aurait pu envoyer lors de la présentation du dernier budget. « À part le chèque de 500 $, il n’y a pas grand-chose pour aider les ménages », dit Mme Doyon, qui souhaite l’instauration d’une tarification sociale basée sur le revenu pour aider les plus défavorisés à accéder aux transports collectifs. « Se tourner vers les transports collectifs est certainement le meilleur moyen de réduire ses frais de déplacement. Le transport est le deuxième poste de dépenses des ménages québécois. » À noter qu’en Allemagne, la réduction des tarifs des transports collectifs s’inscrit dans un important plan d’aide budgétaire de plusieurs milliards d’euros qui vise à alléger la facture des ménages. Comme les Québécois qui recevront 500 $ (s’ils gagnent moins de 100 000 $), les Allemands qui se qualifient comme « salariés imposables » recevront un versement exceptionnel de 300 euros (413 $), en plus d’une aide supplémentaire de 100 euros (138 $) pour les ménages défavorisés, ainsi qu’un bonus de 100 euros pour chaque enfant.

Avec l’Agence France-Presse

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