Un projet pilote de « rues-écoles » réservera l’automne prochain une portion de deux rues de Montréal aux élèves et à leurs parents autour de trois écoles, le matin et l’après-midi.

Pendant des générations, les Québécois ont pu grandir en jouant avec leurs amis dans la rue. La priorité accordée par les élus municipaux à la fluidité des déplacements motorisés a largement fait disparaître cette pratique au cours des dernières décennies.

C’est pour redonner la rue aux enfants et augmenter la sécurité autour des écoles qu’un projet pilote visant à créer des « rues-écoles » verra le jour l’automne prochain à Montréal, une première dans la province.

« Le projet pilote vise à offrir un espace sûr, ouvert, agréable : les enfants peuvent jouer, les parents peuvent discuter », explique Katherine Frohlich, professeure au département de médecine sociale et préventive de l’École de santé publique de l’Université de Montréal.

Collaboration entre des chercheurs de l’École de santé publique de l’Université de Montréal et le Centre d’écologie urbaine de Montréal, le projet pilote prévoit la fermeture temporaire au trafic motorisé, le matin et l’après-midi, de deux portions de rues qui jouxtent trois écoles primaires de la métropole.

Des équipes de bénévoles composées de parents d’élèves qui auront suivi une formation seront chargées de fermer et de rouvrir les rues chaque matin et chaque après-midi.

C’est aussi simple que de prendre une barrière en bois ou en plastique, et de la mettre en travers de la rue pour signaler aux automobilistes que la rue est réservée aux enfants, aux riverains, aux parents, aux gens de la communauté. Ça ne coûte quasiment rien.

Katherine Frohlich, professeure au département de médecine sociale et préventive de l’École de santé publique de l’Université de Montréal

C’est un comité impliquant des parents des écoles concernées qui déterminera la durée de la fermeture le matin et l’après-midi, qui pourrait aller de 15 minutes à 90 minutes.

Les axes choisis sont la portion de l’avenue de l’Épée qui jouxte les écoles primaires Nouvelle-Querbes et Buissonnière, de même que la 7e Avenue près de l’école Marie-Rivier, dans le quartier Saint-Michel.

Les parents qui déposent leur enfant en voiture pourront le faire en plusieurs points situés tout autour du périmètre de l’école, au lieu de converger vers le même bout de rue devant l’établissement. « Comme il n’y aura pas de circulation motorisée tout juste devant l’école, l’endroit sera plus sûr et les enfants pourront se rendre à l’établissement et retrouver leurs amis », ajoute Mme Frohlich.

PHOTO TIRÉE DU SITE DE L’ORGANISME TRANSPORT SCOLAIRE ACTIF ONTARIO

Projet pilote de « rue-école » à Toronto

Les conducteurs de véhicule qui doivent absolument passer – ceux qui doivent assurer une livraison ou un service municipal, par exemple – pourront le faire à la vitesse d’un marcheur et seront accompagnés par un bénévole qui les guidera dans la zone sécurisée.

Trois ans de travail

Le concept des rues-écoles a d’abord émergé au Royaume-Uni et en Belgique. Ces dernières années, des projets pilotes semblables ont été réalisés à Toronto et à Winnipeg, notamment. « Ç’a été très populaire, dit Mme Frohlich. Il y avait de l’appréhension au départ, mais dès que ç’a été implanté, les gens se sont demandé pourquoi ils ne l’avaient pas fait plus tôt. »

Mikael St-Pierre, coordonnateur de projets et de développement, aménagement et environnement urbain, au Centre d’écologie urbaine de Montréal, note qu’il a fallu trois années pour monter le projet pilote.

« Nous avons travaillé avec la ville centre, les arrondissements, les centres de services scolaires, les écoles, dit-il. Dès le départ, il y a eu beaucoup d’engouement de la part de tous les acteurs impliqués. »

Le projet pilote doit durer toute l’année scolaire, soit de la rentrée de septembre jusqu’au mois de juin, dit-il.

On a hâte de voir comment ça va se passer l’hiver. Les parents nous disent que ça va être intéressant, car c’est particulièrement un fouillis autour des écoles, avec les bancs de neige et les automobilistes qui se stationnent en double, en triple ou même en quadruple file, comme on l’a déjà observé.

Mikael St-Pierre, coordonnateur de projets du Centre d’écologie urbaine de Montréal

Les données recueillies durant toute la durée du projet serviront à aider les autres écoles et municipalités tentées par l’expérience.

« Il y a déjà des municipalités un peu partout au Québec qui nous approchent, qui ont envie de le faire et qui attendent de voir comment nos projets pilotes vont se passer, dit M. St-Pierre. Il y a beaucoup d’intérêt. »