La famille Krieg, de Sutton, dans les Cantons-de-l’Est, vient de transférer le site de sa ferme à l’organisme Conservation de la nature Canada (CNC). Ce projet de près d’un million de dollars vient bonifier un important corridor écologique qui s’étend jusqu’au Vermont.

Le terrain couvre une centaine d’hectares sur une longueur d’environ 2,4 kilomètres. Situé au sud de la Réserve naturelle des Montagnes-Vertes, il se trouve au cœur d’un corridor forestier reliant le mont Sutton à des territoires protégés dans l’État du Vermont, aux États-Unis.

Un tel corridor, qui permet le déplacement des espèces, devient particulièrement important dans le contexte de changements climatiques, a indiqué la biologiste Cynthia Patry, à l’annonce du transfert, lundi matin.

Les changements climatiques modifient les conditions (précipitations, températures, etc.) des habitats situés plus au sud, incitant les animaux à migrer vers le nord, donc vers le Québec, a expliqué Mme Patry dans une vidéo tournée en forêt, avec un ruisseau en fond sonore.

« Si la connectivité est coupée, si on ne protège pas les grands territoires comme les Montagnes Vertes, on risque de perdre certaines espèces qui ne pourront pas s’adapter en migrant vers le nord », a souligné la biologiste

L’orignal, l’ours, le pékan et le lynx roux fréquentent ce corridor vert. Mais CNC porte une attention particulière à la protection de la salamandre pourpre, une espèce qualifiée respectivement de vulnérable et menacée dans les lois québécoise et fédérale.

PHOTO CNC

La salamandre pourpre

August et Linda Krieg, qui avaient acquis la terre dans les années 1950, ne voulaient pas que le site où ils ont élevé leur famille serve à du développement.

« Pour ma mère […] c’était très naturel de conserver, pour le reste de sa vie et pour les générations à venir », a témoigné l’un des fils, Henry Krieg, par vidéoconférence. « Elle avait peut-être une vision que nous, on ne voyait pas dans le temps. »

Après le décès du père, les cinq enfants ont organisé le transfert du domaine à CNC. Celui-ci a été vendu en deçà de sa valeur marchande, ce qui représente un don de près de 250 000 $, a indiqué l’organisme. Le gouvernement fédéral a fait une contribution de plus de 430 000 $ et celui du Québec, de 215 000 $. D’autres organisations, dont la fondation américaine Sweet Water Trust et l’entreprise CGI, ont aussi au participé au financement du projet, dont la valeur totale est évaluée à près d’un million de dollars. Cette somme finance à la fois le coût du terrain et le fonds de gestion nécessaire pour couvrir les dépenses récurrentes (entretien, signalisation, taxes, assurances, etc.)

La nouvelle zone protégée est accessible au nord par la base de plein air Au Diable Vert. CNC veut rendre accessible l’entièreté des sentiers qui la traversent, mais n’a pas annoncé de date pour ce faire. Le terrain acquis de la famille Krieg est traversé par une portion du Sentier de l’Estrie, mais celle-ci est fermée depuis quelques années. « Avant qu’il y ait un accès, il va y avoir travaux d’aménagements et d’amélioration du sentier. On veut s’assurer que la boucle soit complète », a précisé Joël Bonin, vice-président associé à CNC au Québec.