Publier une longue liste de revendications au début d'une campagne électorale fédérale est «une formule dépassée», selon Pierre Moreau, ministre des Relations intergouvernementales du Québec. Cette fois, a-t-il expliqué, le gouvernement Charest compte faire état de ses revendications à plusieurs occasions jusqu'au 2 mai, jour du scrutin.

Pourtant, depuis son arrivée au pouvoir à Québec, en 2003, le premier ministre Charest a toujours transmis aux chefs des partis fédéraux en campagne électorale la liste des attentes du Québec dans différents dossiers.

En débat avec le ministre Moreau, le député péquiste Bernard Drainville a relevé que, de la liste des 14 demandes des dernières élections fédérales, seule celle portant sur le gisement sous-marin Old Harry a été exaucée. «M. Charest veut mettre entre parenthèses les intérêts du Québec» durant cette campagne, a affirmé M. Drainville.

Le député péquiste estime que les élections fédérales sont l'occasion pour Québec de mettre de l'avant ses revendications. «En décidant pratiquement de se retirer de la campagne électorale fédérale, M. Charest manque une occasion en or d'assumer ses responsabilités historiques, d'être la voix la plus forte des Québécois face au reste du Canada.»

M. Moreau, lui, croit que c'est plutôt six ou sept des revendications de 2008 qui ont soit reçu une réponse favorable, soit au moins permis des progrès notables. Au-delà de l'entente récente sur l'exploitation éventuelle d'Old Harry, M. Moreau rappelle la place du Québec dans la délégation canadienne à l'UNESCO, les ententes sur les congés parentaux, les infrastructures, le fédéralisme «asymétrique» pour le financement de la santé. Aussi, depuis 2003, les transferts fédéraux vers le Québec ont augmenté de 68% et atteignent 15 milliards, a-t-il fait valoir.

Intervenir ponctuellement

Le premier ministre Charest, a expliqué M. Moreau, compte intervenir «de façon ponctuelle et sur des sujets précis». Par exemple, Québec veut obtenir l'assurance que le chantier naval Davie, à Lévis, «aura sa part» du contrat de 35 milliards de dollars que lancera la marine canadienne pour de nouvelles frégates. Des doutes existent quant à la possibilité que le chantier québécois puisse même se qualifier comme fournisseur. Si Davie a des problèmes de solvabilité, Québec s'en portera garant, a indiqué M. Moreau. Aussi, le premier ministre Charest compte obtenir des garanties pour le remplacement du pont Champlain, un ouvrage fédéral dont la vie utile est terminée.

Pendant deux heures, MM. Drainville et Moreau ont croisé le fer, hier, à l'Assemblée nationale. Le député péquiste estime que le gouvernement Charest a abdiqué bien vite dans les négociations sur le gisement Old Harry, au large des Îles-de-la-Madeleine. La ministre Nathalie Normandeau a fait miroiter 9 milliards de dollars de redevances pour le Québec, un plat de lentilles qui ne représente que 5% des recettes, a soutenu M. Drainville. À son avis, le Québec devrait revendiquer 10 fois plus.

Indirectement, le ministre Moreau a fait des remontrances à sa collègue Normandeau. Personne ne sait exactement quelle quantité de pétrole ou de gaz pourra éventuellement être tirée d'Old Harry. «On n'a pas la capacité du gisement, il est prématuré d'avancer des chiffres très précis», a-t-il dit.