(Québec) Même si la Loi sur l’instruction publique prévoit que les élèves en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage ont droit à des services éducatifs complémentaires, le Protecteur du citoyen, Marc-André Dowd, dénonce que des enfants « attendent leur tour » et que des services offerts ne sont « pas toujours basés sur [leurs] besoins réels ». Plusieurs parents se tournent désormais vers le privé.

M. Dowd a déposé lundi à Québec son rapport, ayant pour titre L’élève avant tout, dans lequel il fait 11 recommandations au gouvernement au terme d’une enquête sur l’offre, l’organisation et le financement des services éducatifs complémentaires destinés aux élèves du primaire. « Au Québec, près d’un élève sur cinq qui fréquente l’école primaire publique a besoin de [ces services] », rappelle le Protecteur du citoyen, qui propose au ministère de l’Éducation de « revoir et baser le financement des services sur les besoins réels des élèves ».

« Alors qu’ils "attendent leur tour"  pour des services auxquels la loi leur donne droit, ces élèves en difficulté ne font pas les progrès attendus et leurs retards persistent, freinant leur parcours scolaire et leur épanouissement personnel et social », affirme M. Dowd.

photo patrice laroche, archives le soleil

Marc-André Dowd

Dans son rapport, il dénonce que « les services sont souvent établis en fonction du financement et non des besoins réels des élèves, [que] le personnel spécialisé présent dans les écoles ne suffit pas à répondre aux besoins de tous les élèves [et que] certains élèves attendent longtemps avant de se faire offrir des services, [alors que d’]autres en reçoivent, mais de la part de personnel ne détenant pas toujours la formation la plus pertinente ».

De plus, certaines écoles cessent d’offrir des services lorsque l’élève n’est plus en situation d’échec dans une matière. « Or, l’atteinte de la note de passage n’est pas un barème pour conclure qu’un enfant n’a pas ou n’a plus de difficultés d’adaptation ou d’apprentissage. Dans certains cas, les services ont simplement cessé au moment où l’enfant a obtenu la note de passage, alors que les besoins étaient encore là », dénonce M. Dowd.

Un « non-respect des droits » des élèves 

Le Protecteur du citoyen rappelle que les services éducatifs complémentaires, comme ceux d’orthopédagogie, de psychoéducation, d’orthophonie, d’éducation spécialisée ou de psychologie, permettent d’intégrer dans les classes ordinaires les enfants ayant des difficultés d’adaptation ou d’apprentissage. Or, il existe « un manque d’arrimage entre les besoins réels des élèves et les ressources pour y répondre, ainsi qu’un risque important de non-respect des droits des élèves aux services éducatifs complémentaires qui leur sont nécessaires ».

M. Dowd dénonce que « l’offre de services est entre autres limitée par le financement disponible : souvent, les services sont offerts "selon ce qui est possible" plutôt que "selon ce qui est nécessaire" ».

« Pour certains élèves, les délais sont longs pour accéder aux services requis, alors que pour d’autres, les services ne sont pas offerts par un membre du corps d’emploi le plus à même de les offrir », déplore-t-il.

Dans cette situation, plusieurs parents se tournent désormais vers le privé pour obtenir des services à leur enfant, parfois à la suggestion même de l’école, remarque M. Dowd. Mais « si on veut respecter le principe de la gratuité scolaire, ils ne devraient pas avoir à payer pour ces services-là », affirme-t-il.

Des changements nécessaires

Le Protecteur du citoyen recommande à Québec de « valoriser les postes en services éducatifs complémentaires et effectuer un suivi des postes à pourvoir, de développer à l’intention du personnel enseignant l’offre de formation continue portant sur les besoins des élèves [ayant des besoins particuliers] et de revoir le modèle de financement des services éducatifs complémentaires [pour] établir et financer un seuil minimal de services à l’échelle de la province ».

Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, reconnaît pour sa part que le modèle de financement des services aux élèves en difficulté est « déficient ».

« En 2023, un nouveau modèle de financement sera en vigueur. Un modèle de financement qui sera plus efficace et qui répondra adéquatement aux besoins des élèves. On estime que le nouveau modèle pourra libérer 375 000 heures de bureaucratie en faveur des services directs aux élèves », a-t-il affirmé dans une déclaration écrite.