Une intervention visant à faire respecter le code vestimentaire de l’école Père-Marquette a provoqué une manifestation devant l’établissement de niveau secondaire vendredi dernier. Durant l’opération de vérification, des employés ont posé leurs mains sur les jambes des élèves – principalement des filles – pour mesurer la longueur des shorts.

« Ils prenaient quatre doigts de leur main et ils les posaient sur nos genoux ou en haut du genou pour voir si nos shorts étaient corrects. J’ai trouvé ça vraiment inapproprié », a raconté une élève de cinquième secondaire, Frédérique Vrignon, en entrevue téléphonique avec La Presse lundi.

Le code vestimentaire de l’école précise que jupes et bermudas doivent être assez longs pour que la partie découverte au-dessus du genou n’excède pas la largeur de la paume d’une main placée à l’horizontale. C’était cependant la première fois que des membres du personnel appliquaient la consigne de façon aussi littérale.

Des élèves ont même été retournés chez eux pour se changer.

L’opération a suscité d’autant plus d’indignation que les filles paraissaient visées de façon plus systématique.

« Il y avait une file de 35 à 40 filles qui attendaient de se faire vérifier, mais dans toute cette file-là, je n’ai pas vu un seul gars ! », nous a raconté Alexis Audette, également en cinquième secondaire. Bien que ses shorts aient été jugés « un tout petit peu courts », il n’a pas été soumis au mesurage manuel.

« Sur 30 filles, il y avait peut-être un gars, c’est ça qui était vraiment confrontant », a aussi constaté Frédérique lors de son passage.

Qu’ils posent leur main sans demander le consentement de la personne, c’est déjà compté comme du harcèlement, et qu’en plus, ce soit juste les filles qui se le fassent faire…

Alexis Audette, élève de cinquième secondaire

L’opération a été menée par des enseignants et une direction adjointe de l’établissement, nous a confirmé le directeur de l’école, Éric Benoît. Lui-même n’était pas sur les lieux, mais il avait fait un appel au respect du code à l’intention de tous les élèves la veille.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Éric Benoît, directeur de l’école Père-Marquette

« Je pense qu’ils essayaient de mettre la main pour montrer, mais on ne veut pas toucher aux élèves », a-t-il souligné lundi. « On a fait un retour et on a dit : ‟Non, non, non, on ne fait pas ça comme intervention !” »

Manifestation devant l’école

Une centaine d’élèves, selon l’estimation de la direction, ont manifesté devant l’école vendredi midi. Certains brandissaient des affiches mentionnant « Arrêtez de sexualiser nos corps », « Nos cuisses ne méritent pas d’être sexualisées » et « Je vais dans une école où la longueur de mon short est plus importante que mon éducation ».

La manifestation a cependant été de courte durée, la direction ayant fait savoir par l’entremise du conseil des élèves que le code vestimentaire serait temporairement assoupli.

Le « short court de type sportif » (jogging, volleyball, basketball, cuissard de vélo coussiné) n’est toujours pas autorisé, mais le « legging court (de type cuissard sans coussinet) et le short noir de type jeans » sont actuellement permis, confirme la lettre envoyée aux parents en fin de journée vendredi.

Père-Marquette s’est retrouvée dans cette situation après que son système de climatisation est tombé en panne la semaine dernière, en pleine canicule. Les parents ont dû sortir les vêtements d’été à la hâte, alors que les enfants avaient grandi depuis l’an dernier, a reconnu le directeur de l’école.

Le code vestimentaire sera discuté au prochain conseil d’établissement, le 6 juin. « J’ai bon espoir qu’on puisse en arriver à une solution sous forme d’amendement », a indiqué M. Benoît.

Consultez le code de vie de l'école Père-Marquette (guide vestimentaire à la page 6)

Tollé en Ontario

Une autre manifestation contre l’application du code vestimentaire s’est tenue devant une école secondaire ontarienne vendredi dernier, avec des conséquences autrement plus retentissantes.

Près de 400 élèves de l’école secondaire catholique Béatrice-Desloges, dans le secteur Orléans, à Ottawa, ont manifesté contre une opération menée la veille pour vérifier la longueur des vêtements portés en classe.

Des jeunes, surtout des filles, auraient été forcés par le personnel à se pencher en public pour montrer la longueur de leurs shorts et jupes, en salle de cours et dans les corridors, indiquaient les informations qui ont circulé jeudi et vendredi.

L’opération a suscité de vives réactions sur les réseaux sociaux, y compris de la part de candidats en campagne pour les élections provinciales.

L’administration du Conseil des écoles catholiques du Centre-Est (CECCE) a finalement présenté ses excuses par voie de communiqué samedi, se disant « sincèrement désolée de ce dénouement » et promettant « de s’assurer qu’une telle situation ne se reproduise plus ».

Le CECCE a confirmé que des élèves, « majoritairement des filles », ont dû sortir dans le corridor, et que certains « se sont fait demander de plier la jambe au genou vers l’arrière », mais a écrit que « aucun élève n’a été demandé de se pencher ».

La stratégie employée « n’est pas acceptable », a néanmoins reconnu le Conseil, ajoutant qu’« bon nombre d’élèves se sont sentis dégradés et humiliés ».

Avec Silvia Galipeau, Marie-Eve Morasse, La Presse, Le Droit, Radio-Canada et ONFR+

En savoir plus
  • « La jupe ou le bermuda doivent avoir une longueur d’une paume de main horizontale au-dessus du genou. »
    Extrait du Code vestimentaire de l’école Père-Marquette