Le gouvernement du Québec avait promis d’installer 90 000 lecteurs de dioxyde de carbone (CO2) dans les écoles d’ici à la fin de décembre. Combien ont été livrés et installés ? Le bureau du ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, refuse de donner des chiffres.

« Vous n’aurez pas de pourcentage de notre part », a déclaré l’attaché de presse du ministre, Florent Tanlet, à La Presse. « Pourquoi ? Parce que ça bouge trop. L’important, c’était que malgré le contexte de pénurie mondiale, 100 % de nos classes prioritaires 1 et 2 soient réglées. Ça a été le cas. »

Au centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), cela représente seulement 25 % des écoles. En effet, selon le site du CSSDM, des lecteurs de CO2 ont été livrés dans les classes de 35 écoles jugées prioritaires en raison de très fortes concentrations de CO2 dans ces classes.

Au centre de services scolaire de la Pointe-de-l’Île, on nous a fait savoir que 555 lecteurs de CO2 avaient été reçus et qu’ils seraient tous installés d’ici à vendredi.

Le centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys précise qu’à la suite de « l’échantillonnage réalisé en 2020, aucune de [ses] écoles n’a été identifiée en priorité 1 par le Ministère ». Des capteurs sont en voie d’être installés dans les quatre écoles de priorité 2. « Nous venons tout juste de recevoir le matériel pour 20 autres écoles et il sera installé dans les plus brefs délais », souligne la directrice du bureau des communications, Chrystine Loriaux.

Pénurie de composants électroniques

Le retard dans la livraison des 90 000 lecteurs promis serait causé par des problèmes d’approvisionnement, en raison notamment de la pénurie de composants électroniques, selon le ministère de l’Éducation.

« Les quantités livrées couvrent toutes les classes qui avaient enregistré un résultat supérieur à 2000 ppm [parties par million] ainsi que celles qui avaient enregistré un résultat supérieur à 1500 ppm », a précisé le porte-parole du ministère de l’Éducation, Bryan St-Louis, dans un courriel envoyé mercredi soir, sans encore une fois préciser le nombre de lecteurs livrés à ce jour.

Des ententes ont été conclues le 10 septembre avec quatre entreprises (Honeywell, Nova Biomatique, Assek Technologie et Airthings) pour doter de lecteurs de CO2 l’ensemble des classes du préscolaire, du primaire, du secondaire, de la formation professionnelle et de l’éducation des adultes du Québec.

Le coût de cette mesure est de 76,4 millions.

Réduction des aérosols

À quoi vont servir ces 90 000 lecteurs de CO? « À mesurer la qualité de l’air et à gérer la ventilation dans les classes », explique Ali Bahloul, spécialiste de la ventilation industrielle et de la qualité de l’air intérieur, professeur associé et chercheur en prévention des risques chimiques, biologiques, mécaniques et physiques à l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail.

« La ventilation fait réduire la concentration des aérosols qui ont tendance à s’accumuler dans le temps dans une classe, ajoute l’expert. Plus les élèves sont dans la classe, plus il y a une probabilité d’accumulation d’aérosols qui sont issus de la respiration, de la toux, etc. »

PHOTO TIRÉE DU SITE DE L’INSTITUT DE RECHERCHE ROBERT-SAUVÉ

Ali Bahloul, spécialiste de la ventilation industrielle et de la qualité de l’air intérieur

Le CO2, comme les aérosols, « sort de la respiration », indique M. Bahloul. « Donc, on peut faire un lien. Ce n’est pas tout le temps exact, mais ça nous donne une indication sur la ventilation. Ce n’est pas ça qui va vraiment donner une description totale de ce qui se passe dans l’air, mais des concentrations de CO2 élevées peuvent indiquer que le local est mal ventilé. »

Pour réduire les concentrations de CO2 dans l’air, il y a deux méthodes : la ventilation naturelle (ouvrir des fenêtres et des portes) et la ventilation mécanique, qui se fait avec un échangeur d’air.

« Si on fait tout ce qu’il faut en ouvrant les fenêtres et qu’on n’arrive pas à atteindre [une concentration] de CO2 de 1000 ppm, par exemple, il faut ajouter un échangeur d’air », affirme M. Bahloul, qui ne recommande pas l’utilisation de purificateurs d’air, car ceux-ci, dit-il, pourraient perturber le travail de la ventilation au lieu d’améliorer la qualité de l’air.