(Québec) C’est en janvier que l’on verra l’étendue des dégâts.

Les élèves recevront un premier bulletin et, si la tendance se maintient, le tiers d’entre eux seront en situation d’échec.

L’année 2020 se termine sur une statistique effarante : le taux d’échec des élèves du secondaire est de trois à cinq fois plus élevé qu’à pareille date l’an dernier, soit de 30 % à 50 %, selon les régions.

Confronté à cette réalité il y a un mois, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, a dit qu’il attendrait le premier bulletin pour avoir un portrait plus clair.

Il a balayé le 3 décembre dernier une proposition de la porte-parole péquiste en éducation, Véronique Hivon, visant à offrir rapidement aux élèves un programme de mentorat.

« Il faut attendre le bulletin qui s’en vient avant de prendre des décisions », a déclaré au Salon bleu M. Roberge, qui a décliné une demande d’entrevue de La Presse Canadienne.

« Il ne faut pas prendre une décision qui est précipitée », a ajouté le ministre, disant vouloir « voir si vraiment les élèves utilisent le temps qu’on leur a donné (avant le premier bulletin) pour rattraper ».

Les oppositions accusent le ministre d’avoir toujours été « deux pas en retard » ; M. Roberge rétorque que les centres de services scolaires ont toujours eu les sommes nécessaires pour aider leurs élèves.

Une année pas comme les autres

Le quotidien de dizaines de milliers d’élèves a été chamboulé le 13 mars dernier, lorsque le gouvernement a fermé les écoles en raison de la propagation de la COVID-19.

Ce qui était censé être une pause de deux semaines (des vacances pour les élèves, a dit le ministre) s’est transformé dans certaines régions en une fermeture de quatre mois.

Si l’on prend en compte la pause estivale, les écoles de Montréal ont été fermées la moitié de l’année ; les problèmes d’apprentissage, de motivation, de santé mentale chez les élèves se sont creusés.

La grande réussite de 2020 est sans contredit la réouverture des écoles en septembre, a claironné M. Roberge, qui a omis d’expliquer que les tournois sportifs et le parascolaire seraient mis au rancart.

Pour assurer la protection de tous, on a imposé des mesures sanitaires : des bulles-classes, en passant par le port du masque obligatoire au secondaire et l’école en alternance pour les plus vieux.

Mais le coronavirus s’est tout de même invité dans les écoles. À la mi-décembre, 40 % d’entre elles recensaient des cas de COVID-19. Plus de 1500 classes à travers la province étaient fermées.

A pour absent

Tout ça était prévisible, et peut-être évitable, affirment les députées d’opposition et les organisations syndicales qui ont été invitées par La Presse Canadienne à dresser le bilan de l’année en éducation.

Elles reprochent au ministre Roberge d’avoir ignoré plusieurs de leurs propositions, dont celles d’agir dès l’été pour garantir une bonne qualité d’air dans les écoles et de former des demi-classes au secondaire.

Elles demandaient en outre de faciliter le rattrapage en priorisant les contenus essentiels, en annulant des épreuves ministérielles et en réduisant la pondération du premier bulletin, qui vaut 50 % de la note finale.

« Ce n’est pas parce que ça ne saigne pas que ce n’est pas urgent d’agir », résume en entrevue Mme Hivon, qui craint que l’on crée une « génération COVID » dont les problèmes vont continuer de s’accentuer.

La libérale Marwah Rizqy donne au ministre un « A » pour « absent », sa grande erreur ayant été d’avoir planifié l’année 2020-2021 comme une année « normale », ajoute Christine Labrie, de Québec solidaire.

Il faut donc s’attendre à un premier bulletin « désastreux » en janvier, poursuit-on dans les rangs syndicaux, à moins que l’on demande aux professeurs de « tripoter les notes » afin de rendre le portrait plus agréable.