Déjà durement éprouvé par la crise des moisissures, le personnel de l'école Baril d'Hochelaga-Maisonneuve lance un vibrant appel à l'aide. Dans une lettre adressée à la Commission scolaire de Montréal (CSDM) dont La Presse a obtenu copie, les enseignants disent ne plus y arriver.

Les élèves en difficulté accusent de plus en plus de retard, le gymnase temporaire de l'école Louis-Riel, où ils ont été relocalisés, est pratiquement inutilisable tellement il est bruyant, et les locaux où ils sont installés sont infestés de mouches et d'une mystérieuse poussière noire.

«L'équipe a assez enduré, le citron est pressé», écrit une enseignante dans un texte présenté au nom de ses collègues au dernier conseil des commissaires, à la fin du mois d'octobre. Selon Michèle Henrichon, professeur de 3e et de 4e année, le personnel n'arrive tout simplement pas à répondre aux besoins de plus en plus criants des élèves en difficulté, qui composent au moins 35% de leurs classes.

Depuis trois ans, la population de l'école primaire Baril a vécu cauchemar après cauchemar. Chassés de leur école en 2011 à cause de graves problèmes de moisissures, élèves et professeurs ont d'abord déménagé dans un autre établissement du quartier, qui s'est lui aussi avéré contaminé. Ils ont alors été déplacés vers des locaux de l'école secondaire Louis-Riel. En ce début d'année scolaire, les contrecoups de tous ces chambardements se font sentir.

«On a calculé qu'on perd environ deux mois d'enseignement à chaque déménagement avant que la classe revienne à son affaire», confie Mme Henrichon dans une entrevue accordée à La Presse. Avec un taux de décrochage frôlant déjà les 40% dans Hochelaga-Maisonneuve, elle ne peut cacher son inquiétude. «Ça va être quoi, le taux de cette cohorte-là? C'est à voir. Mais on n'est pas en train de les aider.»

Mouches et poussière

Comme si ce n'était pas assez, voilà que les locaux temporaires de l'école secondaire où ils sont accueillis ont encore une fois des problèmes de salubrité. «Nous avons des mouches en grande quantité dans certaines de nos classes, accompagnées d'une chaleur ou d'une froideur excessive dans d'autres. Depuis longtemps, et davantage depuis quelques semaines, une poussière noire se dépose partout. Les ressources matérielles s'affairent présentement à en trouver la source, mais, à ce jour, ils ne peuvent savoir d'où elle provient», dit la lettre.

Par temps chaud, ce sont jusqu'à 30 mouches qui prennent d'assaut certaines salles de classe. Quant à la poussière, elle se dépose en couches épaisses sur tous les meubles. «Ce n'est pas tant la couleur que la quantité qui nous inquiète. On respire ça, nous, dit Michèle Henrichon. Le stress et la fatigue combinés à ces irritants font que la coupe est pleine.»

De l'aide

Bonne nouvelle: le personnel recevra d'ici quelques semaines l'aide longtemps réclamée d'une orthopédagogue, d'une psychoéducatrice et d'une enseignante ressource une journée de plus par semaine. Un minimum pour garder la tête des enfants hors de l'eau, précise le personnel.

«Les bulletins de la première étape ont été remis la semaine dernière et on est en train d'analyser les résultats. On va s'assurer que les enfants terminent leur primaire sans retard», dit la présidente de la CSDM, Catherine Harel-Bourdon.

En ce qui a trait à la mystérieuse poussière noire, elle croit qu'il peut s'agir des contrecoups du nettoyage, l'été dernier, du système de ventilation. «On a fait des analyses. Tout est en ordre», dit-elle. Des travaux sont en cours pour régler les autres problèmes.

Dans l'espoir de changer leur karma, les élèves et parents de l'école primaire prévoient aussi publier un livre sur leur expérience et sur leur future école de rêve. «On voulait un projet motivateur», dit Mme Henrichon.

Décembre 2011

Les élèves et le personnel de l'école Baril quittent l'édifice d'urgence et sont installés de manière temporaire dans deux écoles primaires du quartier: l'école Hochelaga et l'école Saint-Nom-de-Jésus.

Juin 2012

L'équipe apprend qu'elle devra à nouveau déménager. L'école Hochelaga et l'école Saint-Nom-de-Jésus sont elles aussi contaminées. Le déplacement est prévu pour septembre, puis reporté à octobre.

Octobre 2012

Les élèves de l'école Baril s'installent à l'école secondaire Louis-Riel. Deux mois après le déménagement, la Direction de la santé publique avise la Commission scolaire de Montréal que certains membres du personnel ont des symptômes qui persistent. Une intense opération de nettoyage est entreprise.

Octobre 2013

Le ministère de l'Éducation octroie 20 millions pour la démolition et la reconstruction de l'école primaire Baril.

Novembre 2013

Les employés font part de leur ras-le-bol à la CSDM et exigent de l'aide.