La «provision» de 696 millions destinée aux universités n'est finalement pas conditionnelle à ce qu'une entente survienne au Sommet sur l'enseignement supérieur de février.

Le ministre Pierre Duchesne a corrigé le tir vendredi, à la suite de propos tenus la veille par sa sous-ministre, Christine Tremblay. «Si on s'entend, a-t-elle dit, l'argent sera au rendez-vous. S'il n'y a pas d'entente, l'argent sera alloué à d'autres fins.» L'opposition a crié au «chantage», et le milieu universitaire était interloqué.

Pierre Duchesne a contredit sa sous-ministre, vendredi. «Moi, je n'arrive pas en disant: si personne ne s'entend, il n'y a pas d'argent. Ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne. On croit aux universités, on croit au réinvestissement. Et dans tous les scénarios, il y aura un réinvestissement», a-t-il soutenu en conférence de presse, en marge de sa deuxième rencontre de consultation, à Trois-Rivières.

La somme au rendez-vous

Il a assuré que sa «provision» de 696 millions est «prévue» et «sera déployée» d'ici à 2018-2019. Cette somme revient à donner aux universités la moitié des revenus qu'elles auraient tirés de la hausse des droits de scolarité du gouvernement Charest. Elle s'ajoute à un réinvestissement de 954 millions sur une période de sept ans prévu au plan de financement des libéraux que le gouvernement Marois s'est déjà engagé à verser. Le Sommet permettra de «discuter» de tout ce réinvestissement et de déterminer à quelles fins il servira, a précisé M. Duchesne.

En 2018-2019, les universités auront droit à 396 millions de plus qu'à l'heure actuelle. «Ce n'est pas encore à la hauteur de nos attentes», a lancé la présidente de la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec, Luce Samoisette. Et même si, en plus de ce réinvestissement, le gouvernement indexe les droits de scolarité comme il le préconise, «ce n'est pas suffisant» à ses yeux.

Elle a souligné que les chiffres du ministre ne tiennent pas compte des compressions de 124 millions pour cette année. «Elles sont impossibles à réaliser, donc une grande partie des universités seront en déficit, a-t-elle souligné. Il y aura donc des plans de redressement dont il faudra convenir avec le Ministère. Et on va voir avec lui comment assouplir toutes ces règles-là.»

Le recteur de l'Université Laval, Denis Brière, a demandé au ministre d'annuler les compressions au lieu de réinvestir 696 millions plus tard. Pierre Duchesne a rejeté cette proposition. Sa décision est sans appel.

Luce Samoisette se dit cependant satisfaite que la «provision» du ministre ne soit finalement pas conditionnelle.

La deuxième de quatre rencontres de consultation en prévision du Sommet portait sur l'accessibilité aux études. Les positions divergent grandement sur les droits de scolarité.

Alors que le gouvernement Marois préconise l'indexation, les associations étudiantes ont plaidé pour le gel, voire la gratuité scolaire, appuyées par les syndicats. Le patronat réclame une hausse et les recteurs sont favorables à l'indexation, au minimum.

Un consensus

Pierre Duchesne a tout de même vu un «consensus»: «Le modèle de l'ancien régime libéral d'augmenter les droits de scolarité de 82% en sept ans est rejeté.» Yves-Thomas Dorval, du Conseil du patronat, a indiqué que personne ne plaide aujourd'hui pour une augmentation aussi «brusque» à la suite de la crise du printemps dernier.

Pierre Duchesne a demandé à ses fonctionnaires d'évaluer le coût de la gratuité scolaire, mais il a indiqué que le gouvernement n'est pas en accord avec cette option. Son ministère prépare «plusieurs options d'indexation» en prévision du Sommet. Jeudi, l'économiste Pierre Fortin avait indiqué qu'une indexation s'élèverait à 46$ par année si elle est liée à la hausse du coût de la vie, à 70$ si elle est fixée en fonction de l'augmentation du revenu disponible des ménages et à 84$ si on tient compte des coûts de fonctionnement des universités par étudiant.

Photo Yan Doublet, le soleil

En marge d'une consultation tenue vendredi à Trois-Rivières, le ministre de l'Enseignement supérieur, Pierre Duchesne, a contredit les propos tenus la veille par sa sous-ministre Christine Tremblay.