Portée à bout de bras par des bénévoles, la P'tite École de Lac-Édouard est devenue le symbole de la revitalisation du village.

Au coeur d'un vaste territoire riche en gibier, en poissons et en lacs, le village a connu une époque prospère au siècle dernier. Un millier d'habitants y vivaient.

Un sanatorium accueillait plus de 200 patients tuberculeux venus chercher de l'air pur pour soigner leurs poumons. Le Canadien National avait ouvert un atelier de réparation de wagons et de locomotives pour la voie qui relie Québec et le Lac-Saint-Jean. Des scieries y prospéraient.

La réputation du Lake Edward Fish and Game Club - devenu depuis la pourvoirie de la Seigneurie du Triton - dépassait les frontières du Québec. Le président américain Theodore Roosevelt et le premier ministre britannique Winston Churchill y ont fait des séjours remarqués.

Puis, avec la découverte d'un vaccin contre la tuberculose, le sanatorium a fermé ses portes. Le CN a déménagé son atelier de réparation. Les scieries ont cessé leurs activités.

La construction d'une route vers La Tuque a brisé l'isolement des citoyens. Ils se sont mis à faire leurs courses en ville, ce qui a entraîné la fermeture de plusieurs petits commerces locaux.

«L'économie a périclité. On s'est retrouvés avec une municipalité qui était vraiment dans le creux de la vague», relate le maire, Larry Bernier.

En 2003, faute d'enfants en nombre suffisant, la commission scolaire de l'Énergie a fermé l'école du village. «C'était la catastrophe», se rappelle M. Bernier.

«Pas d'école, c'est comme s'il n'y avait plus de vie, tout s'endort tranquillement», illustre Nicolas Bernard, père de trois enfants et l'un des fondateurs de la P'tite École.

À l'époque, il venait de s'installer à Lac-Édouard avec sa femme, Annie Tremblay, enceinte de leur premier enfant. Le couple dirige la Seigneurie du Triton, qui emploie une trentaine de personnes.

À la même période, le village a été fusionné à la ville de La Tuque, à 65 km de là.

Les résidants se sont mobilisés pour sauver leur village. En 2004, ils se sont prononcés à 93% pour la défusion lors d'un référendum.

«On partait en petit avion chercher les gens qui voulaient voter mais qui étaient trop éloignés», se rappelle le maire en soulignant le vaste territoire de Lac-Édouard.

La municipalité a été reconstituée en 2006, ce qui lui a permis de connaître un nouvel essor. Ouverte deux ans plus tard, la P'tite École est le symbole de cette revitalisation.

En quelques années, Lac-Édouard a perdu son titre peu flatteur de village dévitalisé. Une coopérative de solidarité sociale a été mise sur pied. Les projets foisonnent. Les citoyens donnent de nombreuses heures pour dynamiser leur municipalité.

Un parc écotouristique offrant une formule de prêt-à-camper dans des tentes de prospecteur a vu le jour.

Un «centre de valorisation écotouristique» est aussi en construction. Il offrira aux résidants et aux visiteurs des services de proximité comme l'épicerie, la pharmacie ou le bureau de poste, mais il leur permettra aussi d'apprendre l'histoire du village et de faire des réservations pour le camping ou les pourvoiries.

Mais ce dynamisme est fragile, reconnaît M. Bernier. «Tout repose sur la bonne volonté et le bon vouloir d'un petit groupe de personnes. Le bénévolat est une grande richesse, mais ça demeure fragile.»

C'est pourquoi il rêve maintenant d'attirer de jeunes familles, notamment des travailleurs autonomes qui peuvent travailler à distance. Question d'assurer la pérennité de la P'tite École et du village, par la même occasion.