Le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) a interrogé jusqu'à 50 détenus afghans capturés par les Forces Canadiennes, mais insiste sur le fait qu'ils n'ont jamais fait l'objet de mauvais traitements, a révélé un document du gouvernement fédéral.

L'implication du SCRS dans les interrogations de présumés combattants ennemis avec des officiers militaires du renseignement avait été révélée en mars dernier par La Presse Canadienne, mais les détails des actions de l'agence étaient largement restés secrets.

Des notes préparées pour le directeur du SCRS, Dick Fadden, soulignent à grands traits que le comportement de ses agents avait été sans reproche et que l'agence de renseignement devait obéir «en tout temps à la loi, aux directives ministérielles et aux politiques internes».

Le SCRS affirme, au contraire de la CIA américaine, ne pas utiliser des techniques coercitives d'interrogations comme la simulation de noyade.

Selon le texte, les espions canadiens en Afghanistan étaient armés.

Le document, obtenu grâce à la Loi d'accès à l'information, a été rédigé pour préparer M. Fadden à une entrevue accordée au réseau anglais de Radio-Canada, mais aucune question sur le sujet n'a finalement émergé.

«Des officiers du SCRS ont servi aux côtés des Forces canadiennes et acceptent les mêmes risques que nos soldats», peut-on lire dans le document.

La note lève un peu le voile sur les activités de l'agence en Afghanistan, mais soulève aussi plusieurs questions juridiques, a indiqué un professeur de droit de l'Université d'Ottawa, Errol Mendes.

Selon lui, le document peut laisser l'impression que des espions accompagnent les soldats au combat ou qu'ils prennent part à des opérations ultra-secrètes des forces spéciales. Certaines de ces actions pourraient outrepasser le mandat officiel du SCRS, selon le professeur Mendes.

«Nous devons étudier ce dossier très attentivement et nous poser beaucoup d'autres questions», a indiqué M. Mendes. «Le renseignement fait partie du mandat du SCRS, mais l'organisation de missions pourrait constituer un dépassement des limites de la juridiction de l'agence».

La note soutenait que les agents du SCRS postés en Afghanistan avaient été autorisés à porter des armes à feu parce qu'ils «sont souvent obligés de rencontrer des individus dans des situations très dangereuses pour accomplir leur travail» dans la région.

Les experts estiment que l'armée canadienne aurait capturé des centaines de présumés combattants talibans dans les neuf dernières années d'intervention à Kandahar. Des documents récents ont indiqué que près de 500 détenus avaient été transférés aux autorités afghanes depuis 2006.