Après plus de 22 heures de négociations, Québec a annoncé samedi après-midi la conclusion d'une entente de principe avec les quatre associations étudiantes. Ces dernières préfèrent parler d'une «offre» présentée par le gouvernement. Son contenu sera rendu public à 20 h.

«Ce n'est pas la fin, mais, du moins, c'est le début d'une fin que l'on voit poindre au niveau du conflit étudiant», a déclaré la présidente de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ), Martine Desjardins.

«C'est une offre, ce n'est pas la fin de la grève. Ce seront les assemblées générales qui se positionneront sur le contenu de cette offre tout au long de la semaine prochaine», a indiqué Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole de la Coalition large de l'association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE).

De son côté, la ministre de l'Éducation, Line Beauchamp a soutenu que c'est bel et bien « une entente de principe». « Lorsqu'il y a entente, c'est que chacun a fait son bout de chemin », a-t-elle noté. « Nous espérons vraiment que cette entente puisse permettre un retour pour aller poursuivre les cours, subir ses examens, obtenir son diplôme le plus rapidement possible pour les étudiants qui étaient en boycott en ce moment. Ce qui me rend la plus satisfaite dans les circonstances, c'est le fait de savoir que les étudiants qui souhaitent retourner suivre leurs cours pourront le faire.»

Mme Beauchamp était entourée de la présidente du Conseil du trésor, Michelle Courchesne, et du ministre délégué aux Finances, Alain Paquet. Ils étaient eux aussi à la table.

Sortant de la salle où étaient réunis les 500 délégués réunis pour le conseil général de Victoriaville, le premier ministre Jean Charest s'est contenté d'un court commentaire pour exprimer son soulagement évident. «Il y a une entente, et l'objectif est de permettre aux étudiants de retourner à leurs cours, et de créer un espace de discussion, où on peut se parler, comme il faut, correctement», a-t-il dit.

En anglais, M. Charest s'est fait un peu moins catégorique sur l'issue de la discussion. L'entente est «importante», a-t-il affirmé. «Un des objectifs était de créer une place, un forum où on aura un dialogue, qui est le début d'essayer de mieux s'entendre entre nous. Cela ne veut pas dire qu'on s'entend sur tout, mais on a certainement besoin d'un endroit où nous pouvons parler. C'était le premier objectif. Il y aura d'autres étapes, vous verrez. C'est certainement bien meilleur que ce qu'on a vu depuis 24 heures» a-t-il dit, une allusion au dérapage de la manifestion de vendredi soir à Victoriaville.

Line Beauchamp n'a pas voulu donner de détails sur l'entente, « par respect pour le climat de négociation ». Elle le fera en soirée, après que les leaders étudiants eurent informé leurs membres. Ils comptent émettre un communiqué à 20 h.

Toutes les associations soumettront le document à leurs membres, dans des assemblées générales cette semaine. Les leaders étudiants ont convenu de ne pas faire de «recommandation formelle» quant à son adoption, a précisé le président de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), Léo Bureau-Blouin. Il compte « prendre son bâton de pèlerin » pour expliquer ce qu'il considère comme une « offre ».

Notons que les quatre leaders ont signé le document présenté à la table de négociation.

Selon le secrétaire général de la Table de concertation étudiante, Paul-Émile Auger, «le gouvernement a mis du sien, nous aussi. Les associations étudiantes ont agi de bonne foi, de concert. On est extrêmement satisfaits de ce qui se passe». Martine Desjardins a parlé de « rencontres respectueuses et fructueuses ».

La présidente désignée de la Conférence des recteurs des universités, Luce Samoisette, se dit «confiante» qu'une reprise des cours dans les établissements touchés par une grève puisse survenir rapidement.

Le retour en classe «va se faire très rapidement pourvu que les assemblées générales votent en faveur de ce qui a été ébauché pour une sortie de crise», a affirmé le président de la Fédération des cégeps, Jean Beauchesne. «Il y avait des collèges accotés au 30 juin» pour terminer le trimestre. «On ne veut pas reporter au mois d'août», a-t-il ajouté.

Il s'est lancé lui aussi dans le débat sémantique sur la nature du document. «On a ce qu'il faut pour une sortie de crise. Ce n'est pas une entente», a-t-il dit.

Les centrales syndicales se disent «satisfaites des échanges». Elles parlent autant d'une «entente» que d'un «document reflétant les échanges entre les parties». «Les organisations syndicales ont été très heureuses, même si ça n'a pas été très reposant, de travailler à mettre en place une feuille de route qui, selon nous, va permettre de sortir de la crise actuelle», a déclaré le président de la CSN, Louis Roy. Deux autres chefs syndicaux, Michel Arsenault (FTQ) et Réjean Parent (CSQ), ont pris part aux négociations.

Avec Denis Lessard

***

LA GRÈVE EN CHIFFRES

5 le nombre de cégeps dont les élèves ont voté cette semaine pour le retour en classe

> Cégep de Saint-Félicien

> Centre matapédien d'études collégiales

> Cégep de Gaspésie et des Îles

> Cégep de Sherbrooke

> Cégep Saint-Jean-sur-Richelieu

33,9% des étudiants et cégépiens boycottent leurs cours

Plus exactement, 164 508 étudiants et cégépiens sur 485 832 sont en grève.

(Selon les chiffres de bloquonslahausse.com et du ministère de l'Éducation)

CLASSE

En grève: 80 000

Total: 99 166 membres

Forte présence dans les cégeps montréalais et dans les départements universitaires de sciences sociales et d'arts partout au Québec.

FEUQ

En grève: 55 000

Total: 125 000 membres

Représente plusieurs grands blocs d'étudiants, dont tous ceux de l'Université de Montréal et de l'Université Concordia.

FECQ

En grève: 35 000

Total: 80 000 membres

Présence très forte en région. Seulement trois cégeps montréalais: Rosemont, Ahuntsic et André-Laurendeau.

Certaines associations sont affiliées à deux organisations nationales.

Note: Certaines associations sont affiliées à deux organisations étudiantes - la CLASSE et l'une ou l'autre des fédérations. Le nombre réel d'élèves et étudiants en grève est de 164 508.