(Québec) Le gouvernement Legault doit repousser la date de l’entrée en vigueur de la vaccination obligatoire des travailleurs de la santé et des services sociaux pour éviter « des bris de services généralisés », exhortent les syndicats et le Parti québécois.

Dans une sortie commune mercredi, cinq syndicats représentant des travailleurs du réseau de la santé et des services sociaux ainsi que le Parti québécois ont demandé au gouvernement Legault de revenir sur sa décision de suspendre sans solde tous les employés qui ne seront pas adéquatement vaccinés au 15 octobre.

« Nous nous dirigeons dans un mur dans le cadre duquel il y a davantage de bris de service dans notre réseau, et ce, partout à travers le Québec. Ni le premier ministre ni le ministre de la Santé ne nous ont offert une réponse claire à la question suivante : qu’est-ce qu’on fait le 16 octobre ? », a lancé Paul St-Pierre Plamondon.

Selon le Parti québécois, le « remède dépasse la maladie » alors que « les risques sur le patient sont plus grands que les bénéfices » engendrés par l’obligation de la vaccination. Une affirmation reprise au Salon bleu par le chef parlementaire, Joël Arseneau, ce que n’a pas raté de souligner le premier ministre.

« Le remède serait pire que le mal de mettre la vaccination obligatoire, c’est quand même grave. Un parti qui est censé être progressiste, un parti qui arrive et qui dit que la vaccination obligatoire dans la santé serait une mauvaise idée », a critiqué M. Legault, en réponse à M. Arseneau.

« Naviguer dans le noir »

Les syndicats ont déploré mercredi « naviguer dans le noir » alors qu’ils n’ont obtenu aucune donnée sur le nombre de travailleurs qui seront suspendus au 16 octobre ni quels secteurs seront le plus affectés. Selon le président par intérim de l’APTS, Robert Comeau, entre 600 et 800 employés de la DPJ seraient visés.

« Ça ne peut pas être comme ça. On a besoin de données pour connaître l’ampleur, dans quel département, à quel pourcentage, qui ça va toucher », a soutenu la présidente de la FSQ-CSQ, Claire Montour. « Le personnel ne peut plus ramasser les morceaux, compenser parce que l’équipe est à moins deux [employés] […] et là, on va leur demander de continuer de faire semblant qu’il n’y a pas de bris de services ? Désolé », a-t-elle ajouté.

Jeudi dernier, le ministre Christian Dubé affirmait que quelque 16 000 employés du réseau, dont 6400 sont en contact étroit avec les patients, ne sont toujours pas adéquatement vaccinés dans le réseau public. De ce nombre, environ 2500 sont dans la région de Montréal.

Selon le Parti québécois et les syndicats, la suspension sans solde pour une durée indéterminée d’un nombre aussi élevé de travailleurs dans un réseau déjà à bout de souffle ne peut que provoquer des conséquences « catastrophiques » dans le réseau au lendemain du 15 octobre.

On demande à M. Dubé de repousser la date butoir jusqu’à ce qu’un « plan soit consenti entre les syndicats et le gouvernement » pour éviter des bris de services. Ils se disent en faveur du maintien de tests de dépistage rapide sur une base régulière pour les travailleurs non vaccinés et pour la poursuite de la sensibilisation pour la vaccination, alors que la couverture vaccinale continue de progresser.

La crainte de bris de services

Le ministre Dubé a déjà affirmé qu’il avait demandé aux établissements de prévoir des plans de contingence pour remplacer le personnel qui sera suspendu. Mais cela ne rassure pas les syndicats.

« Des bris des services, on en subit déjà. La situation peut juste être empirée, peu importe le nombre de professionnels en soin qui seront retirés. De l’improvisation aussi, on en a vécu depuis plusieurs mois, alors on peut juste douter de la situation étant donné que les chiffres ne sont pas donnés », a déploré Isabelle Groulx de la FIQ.

Le Parti libéral, qui a réclamé l’imposition de la vaccination obligatoire dans le secteur de la santé, dit espérer que le gouvernement a néanmoins « pris la pleine mesure de ce que ça voulait dire » sur le terrain.

« Moi, je ne l’ai pas entendu, à aucune reprise, nous dire : voici la situation, voici ce que ça veut dire, voici les décisions qu’on va prendre en conséquence et voici surtout les actions qu’on a prises pour compenser cette situation-là », a soutenu la porte-parole libérale en matière de santé, Marie Montpetit.

Pour Québec solidaire, qui est également faveur de la vaccination obligatoire des employés de la santé, les travailleurs sur le terrain ont surtout besoin « qu’on les écoute » et qu’on n’arrive pas seulement en « leur imposant des choses ». La formation a pour sa part déposé mercredi une motion - qui a été adoptée à l’unanimité - pour élargir le champ de compétence des sages-femmes, notamment dans le contexte de pénurie de personnel.

Québec solidaire propose de moderniser la Loi sur les sages-femmes pour étendre leur pratique à la santé de la femme en général et non seulement aux actes liés à la grossesse et à l’accouchement.