« Je ne veux pas que les plages soient les prochains gyms. » Le ministre de la Santé, Christian Dubé, n’a pas mâché ses mots jeudi à l’égard du rassemblement de 1500 personnes tenu la veille à la plage d’Oka, sans distanciation physique.

« Ce qu’on a vu à Oka hier, c’est exactement ce qui ne doit pas se produire. On ne va pas dans la bonne direction. Je comprends les gens, ils ont hâte d’aller dehors, ils sont fatigués, mais je ne voudrais pas que les plages deviennent le même problème qu’on a eu avec les gyms ou les karaokés », a martelé le ministre Dubé en mêlée de presse, jeudi à Montréal.

L’élu a rappelé que le déconfinement annoncé mardi « est conditionnel au respect des mesures sanitaires ». « Soyons prudents dans les prochaines semaines, pour s’assurer qu’on reçoive toutes les premières doses et les deuxièmes ensuite », a-t-il imploré, en déplorant au passage que ce soit souvent « une minorité » qui a ces comportements problématiques. Le problème, c’est que « tout le monde paie », dit M. Dubé.

Je suis très content que les policiers aient été capables d’agir correctement avec ces personnes. C’est une leçon. […] Si on ne veut pas retourner aux restrictions qu’on a eues l’été dernier ou pire, après Noël, il faut y aller par étapes.

Christian Dubé, ministre de la Santé

« Ce n’est qu’un début », dit le maire

On n’entendait que le bruit des goélands sur la plage d’Oka jeudi matin. Une odeur d’alcool flottait dans l’air pendant qu’un groupe d’employés s’affairait à nettoyer les lieux, qui étaient toujours imprégnés des évènements de la veille. De multiples canettes jonchaient le sol, des vêtements étaient éparpillés sur des tables de pique-nique et un préservatif traînait même par terre.

« D’habitude, je faisais ça tout seul et à 8 h, c’était fini. On en a pour la journée », a déclaré un employé qui ne voulait pas être nommé par crainte de représailles. « On ne connaît pas ça en mai. D’habitude, on voit ça en juillet », a renchéri un autre, en disant que l’effectif est réduit à cette période de l’année.

La consommation d’alcool devrait être interdite sur le site de la plage d’Oka, a évoqué le maire de la municipalité, Pascal Quevillon, « Les belles journées ne font que commencer, ce n’est qu’un début », a-t-il soutenu, appelant le gouvernement à mettre des mesures en place afin d’assurer le respect des règles sanitaires sur les plages, alors que les journées aux allures estivales se succèdent.

« Ce n’est pas le genre de clientèle que nous avons l’habitude de voir au parc national d’Oka, c’est une destination familiale. On s’est retrouvé avec une clientèle d’un endroit qui est présentement fermé, que je ne nommerai pas », a renchéri le maire, alors que plusieurs jeunes adultes faisaient la fête sur la plage mercredi.

« On dirait que c’était le Beach Club », a affirmé une jeune fille, Léticia Dockstader, venue profiter de la tranquillité de la plage avec deux amies jeudi matin.

Un rassemblement du genre a eu lieu la fin de semaine dernière. La SEPAQ, qui est gestionnaire du site, a donc pris la décision de réduire le nombre de personnes admises sur la plage, passant de 2500 personnes, soit 50 % de la capacité d’accueil habituelle de la plage, à 1500 personnes. Dès jeudi, la SEPAQ vise à ce qu’un maximum de 750 personnes soient admises pour profiter du plan d’eau.

« Il y avait de l’impolitesse et de la violence verbale de certains visiteurs », a expliqué le porte-parole de la SEPAQ, Simon Boivin. Ce comportement qui s’est ajouté au non-respect de la distanciation physique sur le site a amené la SEPAQ à enclencher le protocole de fermeture de la plage.

Des employés ont ratissé la plage, des véhicules avec des mégaphones ont demandé aux personnes de quitter les lieux et la Sûreté du Québec (SQ) est intervenue pour assurer l’évacuation, comme le veut le protocole. « On ne peut pas fermer les yeux sur une situation qui met en danger la sécurité des visiteurs, mais aussi de nos employés. On ne veut pas être le théâtre d’une éclosion », a affirmé M. Boivin.

Une situation « mal gérée », selon une citoyenne

« C’était la conversation pour savoir qui était le moins soûl pour conduire », a affirmé la Dre Nicole Seben, qui profitait de la plage avec ses parents mercredi. « Oui, il y avait beaucoup de monde, il n’y avait pas de distanciation physique, mais c’était irresponsable de la SEPAQ d’expulser les gens en état d’ébriété dans les autos », a ajouté Mme Seben.

Elle considère que des avertissements auraient dû être donnés avant de faire évacuer la plage. « La première fois que nous avons vu un agent, c’était pour nous avertir que la plage fermait », a-t-elle déploré.

La SEPAQ assure toutefois que des employés circulent sur la plage afin de demander aux personnes de respecter la distanciation physique et les consignes.