Voilà une rare bonne nouvelle : le gouvernement Legault renonce à prolonger l’école à distance au primaire et au secondaire.

Les cours recommenceront à se donner en classe le lundi 18 janvier au secondaire, et lundi prochain au primaire (avec le masque pour les élèves de 5e et de 6e année).

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

« Je ne doute pas que la cellule de crise de Québec travaille sans relâche avec les meilleures intentions. Mais je pense qu’elle est débordée et que l’école demeure dans son angle mort », écrit notre chroniqueur.

Les classes vont rouvrir, donc. Mais certaines pourraient tout de même fermer si des éclosions se produisaient.

Fait-on tout ce qui est possible pour les prévenir ? J’ai l’impression que non. Il y a trop de suggestions constructives qui ont été écartées, trop d’avis d’experts qui ont été ignorés.

Je ne doute pas que la cellule de crise de Québec travaille sans relâche avec les meilleures intentions. Mais je pense qu’elle est débordée et que l’école demeure dans son angle mort.

En mars dernier, toute l’attention était tournée vers les hôpitaux, et les CHSLD ont été oubliés. Cela a été corrigé. Les efforts sont désormais concentrés sur ces deux types d’établissements ainsi que sur la campagne de vaccination. C’est normal et souhaitable. Mais il y a une limite au nombre de dossiers qui peuvent être menés en parallèle.

Pour régler la crise dans les CHSLD, un comité d’experts avait été créé d’urgence. Il a mené à l’envoi de brigades spécialisées — des SWAT. Cela pourrait servir de modèle pour les écoles.

L’idée vient de Marwah Rizqy, critique libérale en éducation. Elle propose que la cellule de crise accueille une personne ayant de l’expertise pour prévenir les éclosions à l’école. Une personne qui ne vient pas de la machine gouvernementale, qui a une connaissance terrain des écoles et qui peut faire le pont entre les données scientifiques et les contraintes pratiques pour trouver des solutions audacieuses.

Peu importe la formule retenue, l’idée reste la même : brasser la cage.

Vendredi, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, présentera son plan pour le retour à l’école. J’ignore ce qu’il contiendra. Mais je constate que dans les derniers mois, de nombreuses suggestions ont été ignorées ou tardent à être appliquées.

Il n’y a pas que le dossier de la ventilation, qui fait l’objet d’un certain débat scientifique et qui mériterait une chronique à lui seul.

L’été dernier, l’Institut national de santé publique du Québec, tout comme l’OMS, proposait que la taille des classes soit réduite de moitié. Il manque de locaux et de profs, a répondu le premier ministre Legault avec raison. Sauf que la critique péquiste, Véronique Hivon, a trouvé une solution : la demi-classe alternée. Le prof resterait toujours en classe et se filmerait. Le lundi, la moitié de la classe serait présente en personne, et l’autre moitié suivrait à distance. Les rôles seraient inversés le lendemain, et ainsi de suite. Cela se fait entre autres au Séminaire des Pères Maristes, école privée de Québec. Pourquoi pas dans le public ?

Pour le dépistage et le traçage, les écoles semblent aussi négligées.

Je ne veux pas noircir le portrait. Comme le rappelle le ministre Jean-François Roberge, 98 % des classes sont restées ouvertes. Mais lorsque des cas ont été détectés, le testage et le traçage ont été lents.

Par exemple, en octobre dernier, après le résultat positif d’un élève de l’école Vinet-Souligny, à Saint-Constant, les parents ont reçu une lettre leur indiquant de ne pas faire tester leur enfant. Un mois plus tard, l’éclosion se propageait, l’école fermait, et la clinique de dépistage mobile était déployée.

Mme Rizqy croit qu’on aurait pu agir plus vite, notamment en recourant aux tests de dépistage rapide.

Mais cela ne réglerait pas un autre problème : les tests des élèves sont analysés après ceux en milieu de travail. Ils attendent donc plus longtemps pour recevoir leur résultat, comme l’a révélé Mme Hivon.

En rouvrant les écoles avant les commerces, le gouvernement Legault a donné la priorité à l’éducation, mais cela ne se reflète pas encore dans le dépistage.

Et il y a la question du traçage. Bien sûr, elle ne concerne pas que l’éducation. Depuis décembre, l’école était moins le point de départ que le fil d’arrivée de la transmission communautaire, a expliqué le DHoracio Arruda. Si c’est le cas, le traçage devient d’autant plus important pour mettre les classes à l’abri d’une fermeture. À l’heure actuelle, il manque de 2000 à 6000 personnes pour cette opération. Pourquoi ne pas lancer une campagne de recrutement auprès des gens temporairement sans emploi du secteur de l’hôtellerie et de la restauration ?

Je pourrais aussi parler de l’urgence d’assouplir le régime pédagogique et de recruter des tuteurs pour freiner la vague attendue d’échecs scolaires, mais laissons le ministre présenter son plan vendredi.

L’automne dernier, M. Roberge s’est battu contre les résistances de sa bureaucratie pour alléger la paperasse des orthophonistes et autres spécialistes, afin qu’ils concentrent leurs énergies à aider les élèves en difficulté. Mais pour les mesures sanitaires, il paraît à la remorque des experts qui sont débordés avec d’autres feux à éteindre.

La rentrée scolaire ne s’est pas mal passée à l’automne, mais l’hiver pourrait être laborieux, surtout si les variants du virus apparus en Angleterre et en Afrique du Sud devaient se propager chez nous.

Il reste un dernier coup à donner pour s’assurer que les élèves ne perdent pas une journée de plus en classe. Un peu d’aide extérieure ne ferait pas de tort.