(Québec) Québec donnera le feu vert ce mardi au déconfinement des 130 000 personnes âgées en résidence. Son plan, que La Presse a obtenu, présente les conditions entourant la levée de l’interdiction des sorties dans les 1900 établissements concernés.

Dans ce « document de travail interne confidentiel » daté du 4 mai, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) prévoit en effet « certains assouplissements » pour redonner un peu de liberté aux aînés confinés depuis le début de la pandémie. L’objectif est de « réduire les effets du confinement prolongé sur la condition physique et mentale des personnes demeurant en résidences privées pour aînés (RPA) », peut-on lire dans ce « plan de déconfinement » qui ne concerne donc pas les CHSLD.

À l’heure actuelle, les sorties sont interdites dans les RPA à l’exception : 

– des sorties qui sont nécessaires à des fins humanitaires comme pour rendre visite à une personne en situation de fin de vie ;

– des sorties pour obtenir des soins ou des services essentiels requis par leur état de santé ;

– des sorties extérieures supervisées.

Les visites sont par ailleurs proscrites dans les résidences.

Selon le plan de déconfinement du gouvernement, des conditions devront être respectées pour permettre aux résidants de faire des sorties. La plus importante : il doit n’y avoir aucun cas probable ou confirmé de COVID-19 dans la résidence.

En date du 30 avril, 143 des 1900 RPA comptaient au moins un cas confirmé de COVID-19 ; 43 en avaient un seul alors que 23, surtout dans le Grand Montréal, avaient 25 % ou plus de résidants infectés, selon la liste gouvernementale qui n’est plus mise à jour depuis la fin de la semaine dernière. Parmi les 2280 morts de la COVID-19 au Québec, 372 étaient des personnes qui habitaient une RPA ; à Montréal, à Laval et en Montérégie principalement.

Les entrées et sorties surveillées

Selon le plan de déconfinement, les aînés n’auront pas à être supervisés pour aller marcher à l’extérieur, qu’ils habitent une résidence pour personnes autonomes ou une résidence pour personnes semi-autonomes. Québec demandera par contre à toutes les résidences de tenir un registre des entrées et des sorties des résidants. Il recommandera le port du couvre-visage. Il faudra se laver les mains au départ de la résidence et au retour. Un résidant pourra être accompagné d’un proche tant que la distanciation physique de deux mètres est respectée et que la personne accompagnatrice n’entre pas dans la résidence.

Le déconfinement sera à géométrie variable en fonction des régions, qui ont été regroupées en trois « étapes » selon qu’elles sont moins ou plus touchées par la pandémie. Il y a un calendrier différent de déconfinement pour chaque « étape », échelonné sur trois semaines. Les règles diffèrent selon que l’on parle d’une résidence pour aînés autonomes ou d’une résidence pour personnes semi-autonomes. Les détails peuvent être consultés dans le document de travail, mais il faut savoir que les dates d’entrée en vigueur des mesures qui y sont indiquées (4, 11 et 19 mai) seront modifiées dans l’annonce du gouvernement ce mardi. 

Parmi les mesures qui seront appliquées différemment selon le type de résidence et la région, on trouve : 

– la restriction des sorties à celles « essentielles pour la santé » comme une marche ou un rendez-vous médical ;

– la permission de fréquenter les commerces essentiels comme les épiceries et les pharmacies pour les personnes de moins de 70 ans ;

– la permission de fréquenter les commerces essentiels comme les épiceries et les pharmacies pour les personnes de 70 ans et plus ;

– la possibilité qu’un proche puisse rencontrer le résidant à l’extérieur en maintenant une distance de deux mètres en tout temps ; la création d’un horaire des visites est suggérée au besoin pour éviter les rassemblements ;

– la possibilité de faire une activité intérieure ou extérieure si une distance de deux mètres entre les participants peut être maintenue.

En gros, Québec se fait plus permissif pour les aînés du Bas-Saint-Laurent et du Saguenay–Lac-Saint-Jean, par exemple, et moins pour ceux de Montréal, Laval et la Montérégie, là où le coronavirus frappe fort. Dans le dernier cas, on ne permettra pas à un aîné de se rendre à l’épicerie ou à la pharmacie, par exemple, selon le document de travail. Et la possibilité de rencontrer un proche à l’extérieur de la résidence y sera offerte plus tard qu’ailleurs.

Ce plan de déconfinement évoque également la « mise en place d’une période spécifique réservée aux aînés dans les commerces essentiels », pour les régions où les sorties dans ces lieux seront permises.

« Un peu d’espoir »

Le premier ministre François Legault sera accompagné de la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais, pour dévoiler le plan en conférence de presse ce mardi. 

Le directeur national de santé publique, le Dr Horacio Arruda, sera également présent. Il a télégraphié lundi un desserrement de l’étau au bénéfice des personnes âgées sans toutefois parler directement des RPA. 

On va essayer d’amoindrir les contraintes et de permettre aux gens d’avoir un peu d’espoir. Je pense que c’est très important pour nos aînés. Ça va être à suivre au cours des prochains jours.

Le Dr Horacio Arruda, directeur national de santé publique

De son côté, le Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA) avait soumis une proposition au gouvernement pour procéder au déconfinement.

Dans ce document, que La Presse a obtenu, le RQRA fait valoir que « la situation actuelle est sous contrôle dans les RPA » et qu’« un nombre limité de RPA ont été atteintes ». « Les aînés veulent » un déconfinement et « en ont besoin », surtout qu’« il y a des signes de détresse psychologique de plus en plus fréquents », ajoute-t-on.

Le RQRA plaide également qu’« il doit y avoir une certaine équité avec les aînés qui sont hors des RPA et qui ont une plus grande liberté ». Selon lui, « il vaut mieux être proactif car les RPA devront faire face à de la désobéissance », surtout avec l’arrivée du beau temps.

Le RQRA a proposé de procéder à un déconfinement par région, en commençant par celles qui sont le moins affectées par la pandémie, comme le gouvernement le fait pour les entreprises, les écoles primaires et les garderies. Le RQRA a suggéré, par exemple, la création d’un registre des sorties pour chaque résidence ainsi que l’obligation pour l’aîné d’indiquer le lieu de la visite et de porter un masque.